«Ce gouvernement est une catastrophe et doit partir», phrase signée par l’inamovible chef de file de l’extrême-gauche tunisienne Hamma Hammami. Mais la question qui se pose et que beaucoup n’ont le courage de poser, M. Hammami est-il une catastrophe pour la gauche?
Par Imed Bahri
A-t-on le droit de critiquer la momie de l’extrême-gauche tunisienne? Une momie figée, sclérosée et qui n’évolue pas. Une momie figée dans le dogmatisme, une momie figée dans une idéologie et dans des théories préconçues.
Ok, M. Hammami a été un opposant au régime de l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali mais cela suffit-il pour jouer un rôle politique quelconque? Est-ce une assurance vie qui garantit à son titulaire de rester à vie le chef de file du Front populaire, la coalition de la gauche radicale, et de rester à vie secrétaire-général du Parti des Travailleurs? Lui qui s’est opposé au régime d’Habib Bourguiba sera-t-il le Bourguiba de l’extrême-gauche tunisienne en restant son inamovible chef de file?
Ubu Roi de l’extrême-gauche
Quel est le programme de M. Hammami? À part son jargon politique qui est devenu un vieux disque rayé dont les «classiques» sont «ils ont échoué», «catastrophiques», «il faut qu’ils partent»…, ne devrait-il pas, lui, le Ubu Roi de l’extrême-gauche plier bagage, se retirer de la direction de la famille politique à laquelle il appartient et prendre part ainsi au renouvellement de la classe politique? Ou bien doit-on encore le supporter lui et sa démagogie pendant des décennies?
Ce grand grincheux devant l’Éternel et insatisfait de naissance a déclaré, jeudi dernier, 19 juillet 2018, sur les ondes de Mosaïque FM: «C’est un gouvernement d’occupation et de vendus qui hypothèquent le pays morceau par morceau», quel bel homme ce Hamma Hammami! Et celui dont le parti quitte la salle du conseil municipal lors du second tour de l’élection du maire de Tunis et dont cet acte de désertion a donné la capitale aux islamistes, comment l’appelle-t-on? Un grand résistant?
Certes, il y a eu deux élus sur la liste Afek qui n’ont pas respecté la consigne de vote de leur tête de liste et ont voté pour Souad Abderrahim, candidate d’Ennahdha, certes des élus dits «indépendants» mais pas si indépendants en réalité ont voté pour Mme Abderrahim; cependant l’extrême-gauche en désertant a offert la municipalité de la capitale aux islamistes.
Un éternel donneur de leçons
Ce Hamma est un éternel donneur de leçons arrogant mais il devrait commencer à se remettre en cause et faire son propre bilan à la tête de sa formation politique. Il est mégalomane et égocentrique. Son nombrilisme légendaire lui fait croire que la gauche tunisienne c’est lui et que son auguste personne est l’incarnation de la gauche tunisienne.
Pour M. Hammami et pour ses groupies au sein de l’extrême-gauche, il est une vache sacrée et il est défendu de le critiquer. Mais il faut lui rappeler que personne n’est au-dessus de la critique. Personne.
Une question qui s’impose: N’y a-t-il pas eu du sang entre les islamistes et l’extrême-gauche? Hamma Hammami et ses camarades du Front populaire ont-ils pensé un seul instant à feu Chokri Belaïd et à feu Mohamed Brahmi en offrant la municipalité de la capitale aux islamistes? Ou bien faut-il rappeler que M. Hammami était contrarié et gêné par la présence de Chokri Belaïd car il lui disputait le leadership du Front et lui volait incontestablement la vedette. D’ailleurs rappelons que le Front populaire n’a pu voir le jour que grâce à Chokri Belaïd.
Un facteur de stagnation politique pour la gauche
Faut-il rappeler que M. Hammami et ses groupies ne sont pas à leur premier coup de bassesse. Ils ont déjà été pris en flagrant délit de copinage avec les islamistes qu’ils considèrent comme un cancer et dont ils considèrent le projet sociétal comme fatal pour le pays et bien à El Aroussa, ville natale de M. Hammami (gouvernorat de Siliana), le Front populaire et Ennahdha se sont alliés au Conseil municipal le 17 juin dernier, ce qui a donné lieu à une vive polémique et à une dénonciation unanime de la tartuferie politique de M. Hammami. Et ce n’est qu’après cette vive polémique et qu’après avoir cocufié son électorat que M. Hammami a déclaré, en prenant les Tunisiens pour des idiots: «Cette alliance est une erreur».
In fine, M. Hammami est un facteur de stagnation politique pour la gauche que se soit au niveau des idées (dogmatisme) ou au niveau des résultats électoraux, il a totalement échoué pour étoffer le poids politique de la formation qu’il dirige. Il est temps qu’il rende des comptes et qu’il passe la relève car c’est son bilan qui est catastrophique avant de jeter l’anathème sur les autres. La gauche le contraindra-t-elle à rendre ses comptes et à partir pour pouvoir faire peau neuve avec de nouvelles figures? Mystère et boule de gomme.
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