Le président Béji Caïd Essebsi est-il vraiment conscient des graves dérives de son fils et du non moins grave préjudice qu’il a porté au parti qu’il a créé Nidaa Tounes et au marasme politique qu’il a instauré?
Par Tarak Arfaoui *
Je ne sais pas qui, dans l’entourage du président de la République parmi ses conseillers en communication, conseillers politiques, ou parmi son cercle familial, a eu l’ingénieuse idée de massacrer de la sorte l’image du Président.
Béji Caid Essebsi semble pris au piège dans ce simulacre de pseudo interview qu’il a récemment accordé à la chaîne de télé Nessma qui est arrivée à discréditer aussi bien le personnage, que l’institution républicaine et certains médias télévisuels.
Ni le timing ni la réalisation ni le contenu n’étaient digne de cet événement solennel, à savoir un président s’adressant à la nation dans une période de grande crise politique.
Un événement transformé en une véritable mascarade
Cet événement a été malheureusement transformé en une véritable mascarade.
De tous ces travers, le plus intrigant reste le consentement (?) du président à effectuer cette interview dans ces conditions ce qui me laisse extrêmement dubitatif sur son état de perception de la réalité sociale et politique du pays en se laissant manipuler de la sorte par un entourage malsain.
Choisir une chaîne télé privée ayant maille à partir avec la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica), dont le patron Nabil Karoui a des fréquentations politiques partisanes connues ainsi que des démêlées avec les autorités fiscales et qui n’a pas honte à utiliser un langage de charretier (bien documenté sur une vidéo fuitée) était déjà une énorme bourde et un très mauvais message adressé aux Tunisiens. M. Caid Essebsi en était il conscient?
Le boycott de la télévision nationale était inadmissible et vraisemblablement prémédité par les organisateurs de cette farce dans le seul but était de manipuler le contenu de l’interview et de faire dire au Président ce qu’ils veulent faire entendre à l’opinion publique.
La manipulation s’est poursuivie dans le montage télévisuel puisque l’interview déjà enregistrée la veille a été taillée en pièces par les ciseaux bien aiguisés de M. Karoui, grand spécialiste en magouilles, dans le but de régler leurs comptes à ses adversaires et en premier lieu le chef du gouvernement Youssef Chahed.
Les «journalistes», quant à eux, étaient à côté de la plaque, téléguidés, n’osant pas poser les questions qui dérangent en laissant l’interviewé complètement à son aise dans son exercice favori de hâbleur insaisissable, rôle dans lequel il a toujours excellé pour manipuler comme il sait le faire l’auditoire.
L’entreprise était vraiment grotesque et insultait l’intelligence de tous les téléspectateurs.
Personnage sans envergure, sans consistance et sans saveur
Caid Essebsi ne s’est pas privé de faire son show et s’est malheureusement discrédité sur tous les plans en jouant une partition suspecte, voulant pernicieusement accuser le chef du gouvernement en oubliant qu’il l’a personnellement désigné à ce poste et par là qu’il se discrédite lui-même, en lui mettant sur le dos tous les travers du pays alors qu’il en est aussi responsable, en glorifiant ses adversaires politiques qu’il s’est engagé à combattre dans ses campagnes électorales précédentes en maintenant avec eux un cap politique foireux sous la bannière du «tawafoq», et surtout en persistant dans le soutien indéfectible à son vénéré fils Hafedh dans son combat contre Youssef Chahed.
Caïd Essebsi est-il vraiment conscient des graves dérives de son fils et du non moins grave préjudice qu’il a porté au parti qu’il a créé Nidaa Tounes et au marasme politique qu’il a instauré? Est-il conscient de son amateurisme politique et du rejet d’une grande frange des militants de ce parti et de beaucoup de Tunisiens de ce personnage sans envergure, sans consistance et sans saveur?
Caid Essebsi est-il conscient de l’image désastreuse qu’il renvoie aux Tunisiens dans cette attitude partisane? S’il n’en est pas conscient, cela est bien sûr de la plus haute gravité et s’il en est conscient je ne trouve pas les mots pour qualifier son attitude sauf comme souvent il aime bien le dire lui-même : «La haoula wala qoua illa billah» (Il n’y a pas de préservation ni de force si ce n’est par Allah.)!
* Médecin de pratique libre.
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