La rupture entre Abdessalem Younsi et Faouzi Sghaier va-t-elle en provoquer d’autres ?
Le bureau directeur du Club africain (CA) a écarté Faouzi Sghaier de son poste de vice-président responsable des sections jeunes. Poste momentanément confié au directeur exécutif, Khalil Mahjoub.
Par Hassen Mzoughi
L’ex-défenseur central du CA est «sanctionné» pour ses déclarations faites à propos du nombre impressionnant de joueurs étrangers venus cet été pour des tests au parc A.
Dans un statut facebook, il avait clairement pointé le directeur sportif chargé des recrutements, Sofien Hidoussi, lui reprochant «sa mauvaise gestion des affaires techniques et les flops des joueurs testés» et demandant son limogeage.
Faouzi Sghaier n’est pas loin de la réalité. Il a résumé en 2 lignes le cafouillage technique au CA. Ce qu’il a dit en clair, c’est que le club de Bab Jedid, déjà en proie à nombre de problèmes, a brassé du vent…
Neuf étrangers arrivés, vite partis !
En fait, cet homme d’affaires prospère, qui n’est pas le premier venu, pour avoir longtemps joué et dirigé au CA, parle à juste titre des nombreux flops du mercato clubiste. Dernier exemple : le CA a fait venir deux joueurs sans envergure avant de les laisser partir sans même les tester: l’attaquant congolais Claude-Dominique Moulinga et le défenseur tuniso-hollandais Karim Bennani.
Pour information, le joueur congolais n’a plus joué depuis janvier 2018. Il a débuté sa carrière professionnelle en 2007 et pendant ces 11 ans, il a beaucoup voyagé parmi plusieurs clubs souvent en prêt, marquant… 65 buts, soit une moyenne de… 6 buts par saison. Négligeable (voir le site Transfermarkt). Pourtant Sofien Hidoussi l’a présenté aux médias comme étant «la nouvelle force de frappe» du CA pour la nouvelle saison 2018-2019 qui va rivaliser, grâce à «cette pépite», avec les concurrents en Tunisie et les ténors en Ligue des champions 2019. Quant à Karim Bennani, l’entraîneur Jose Riga a dit qu’il n’a pas l’étoffe.
Cela fait 9 joueurs étrangers passés par le Parc A. À l’exception du défenseur malien Abdoulaye Diakhite, engagé pour trois ans, tous les autres sont partis après des jours de «farniente» dans des hôtels de la banlieue nord! On cite les Camerounais Itami Ngumbi, Didier Rostand, Yimga et Serge Nicolas Song, les Congolais Oledor Kayemba, Kitambala Paula Gifta et Dominique Malonga, le Malien Abdoulaye Diakité, le Burundais Shaka Bienvenu, parti vite à l’Etoile sportive du Sahel (ESS) et le Liberien William Jebor. Et comme si c’était insuffisant, on annonce l’arrivée ces jours-ci d’un énième étranger, un attaquant ghanéen d’on ne sait quel club ! Tout ce tralala a fait réagir Faouzi Sghaier.
Pourquoi tout ce tâtonnement, ces échecs répétés ?
Pourquoi le CA avait-il cherché à débaucher, la semaine dernière, l’attaquant libérien William Jebor, alors qu’il venait de signer, fin juillet, un contrat béton de trois ans avec le Wydad de Casablanca, avec notamment une forte clause libératoire de… 800.000 dollars? Pourquoi le directeur sportif avait-il essayé de forcer la main à José Riga pour «cautionner» le Libérien ?
Aventurisme et double rôle
Aventurisme de la part d’un directeur sportif qui semble être sous l’influence de quelques intermédiaires et autres groupes de pression. En tous les cas, Hidoussi n’est pas rompu au monde complexe des transferts, sinon il n’aurait jamais pensé à William Jebor et à d’autres joueurs qui n’ont pas le niveau requis.
Si des sources proches de l’entourage du CA expliquent ces flops par des règlements de compte entre intermédiaires, le doute s’installe déjà parmi les fans quant au sérieux des démarches faites pour renforcer l’équipe. Ils ne savent de quoi sera fait demain et demandent, via les réseaux sociaux, à décharger Hidoussi de sa mission de directeur sportif. Ils rappellent au passage que Slim Riahi avait procédé de la même manière hasardeuse à son arrivée à la tête du CA en 2012.
On reste tout de même très réservé sur le «casting» adopté cet été, car si l’on croit des sources crédibles, il n’y a pas uniquement Hidoussi sur scène mais aussi un «intermédiaire», Abdelbasset Chebbi (dit Bastos), accusé de «courtage» par Sghaier. Ce «conseiller spécial» en recrutement du président du CA, Abdessalem Younsi, et auprès de qui il a pris beaucoup d’envergure, est, dit-on, derrière la quasi majorité des joueurs étrangers arrivés cet été au Parc A.
Cette confusion n’est pas sans entacher le crédit du président du club auprès de la base qui refuse de revenir en arrière, aux méthodes douteuses qui ont affaibli le club pendant plusieurs années. Pourquoi cette course folle pour ramener des joueurs étrangers – pour beaucoup sans sérieuses références – alors que, primo, deux ou trois transferts ciblés suffiront aux besoins et, secundo, le vivier mérite attention et investissement ?
Les intermédiaires auraient-ils tellement d’influence qu’ils ont fini par imposer leur «méthode» qui leur est profitable ?
Le départ de l’ex-directeur sportif, le très sérieux et compétent Kamel Kolsi, pour aller entraîner l’Union sportive monastirienne, serait une réaction à cette confusion au sein du département technique?
Le président devant deux choix
En osant lever le couvercle, Faouzi Sghaier s’est mis du monde sur le dos mais l’homme a osé dire ce beaucoup pensent tout bas, même parmi les dirigeants.
Il est clair que des divisions traversent la direction notamment parce que le président du club s’est entouré d’un petit groupe de collaborateurs comme Majdi Khlifi – lui aussi pointé par Sghaier –, Hidoussi et Abdelbasset Chebbi. Sghaier a révélé que des réunions se déroulent aux Berges du lac entre le président et un groupe restreint de membres du club, ce qui a «contribué à provoquer des fissures au sein de la direction», a-t-il ajouté.
Face à tout ce qui se passe au CA, beaucoup se sont interrogés sur le pourquoi de «l’absence» d’Abdessalem Younsi. Le président du club a surpris beaucoup par sa passivité. Il a dû prendre des décisions dès le départ pour imposer son autorité mais continuer ainsi la fuite en avant ferait empirer les choses.
Après les déclarations de Faouzi Sghaier, l’homme de Hamadi Bousbia, le puissant mécène du club, que certains considèrent par ailleurs comme l’œil de Moscou, deux décisions sont à prendre: soit abandonner les parties accusées d’opportunisme par ce dernier ou simplement réfuter ces accusations et lui faire assumer ses responsabilités.
Younsi n’est pas en mesure, selon certains, d’imposer sa «politique» mais ne peut indéfiniment laisser traîner les problèmes. Il faut s’attendre à ce qu’il prenne des mesures pour rétablir les choses. Il doit décider, sinon, le CA ne sortira pas de l’auberge et les déceptions ne seraient pas loin !!
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