C’était bien l’euphorie le vendredi soir, 9 novembre 2018 en Tunisie. De Bizerte à Ben Guerdane, presque partout, les rues se vident et les cafés débordent de monde… Pour voir Le match.
Par Salah Darghouth *
À Radès, le stade fait le plein. Mais, la tension est forte de peur que la foule ne se déchaîne pour tout casser et mettre les gradins à feu après la défaite à l’aller et le sentiment dominant que l’arbitre aurait vendu le match…
Au fait, rien de cela: un temps radieux, une ambiance bon enfant, une foule en liesse, enchantée et même disciplinée sous l’œil vigilant d’une sécurité en parfaite maîtrise de la situation!
Cerise sur le gâteau: les joueurs se donnent à fond, l’Espérance renverse la vapeur, gagne le match, arrache une victoire écrasante méritée et s’accapare dignement du trophée africain!… L’apothéose!
Mais ce qui attire l’attention c’est la présence pesante et très médiatisée du chef du gouvernement.
C’est lui qui, après tout, se fait supplier pour autoriser l’ouverture de l’accès du stade à 60.000 spectateurs.
C’est lui qui a fait mobiliser un service d’ordre massif, jamais connu auparavant dans nos stades. Et c’est lui qui, sourit gesticule, salue la foule, se fait prendre en photo, se fait remercier, se laisse embrasser, pour enfin marquer sa présence à la tribune d’honneur et féliciter, décorer et cajoler les joueurs avant d’immortaliser sa présence en remettant la coupe synonyme de sacre à l’équipe méritante, tunisienne de surcroît.
Pas loin de lui, profitant des caméras des chaînes télévisées tunisiennes et étrangères, une pléiade de personnalités allant des chefs du parti islamiste certains corrompus de marque du régime déchu, font des coudes pour se faufiler parmi les officiels attitrés et occuper le devant de la scène.
Et pour couronner le tout, le chef du gouvernement s’adresse solennellement à la presse pour dire: «Nous voulons donner un message positif, celui d’une Tunisie qui gagne. Nous sommes capables de tout faire, il suffit juste d’en avoir de la volonté…».
Mais de quoi parle-t-il au juste? Qui, «nous»? «Message positif», sur quoi?
«Gagner» quoi? «Capables» de quoi? «Volonté» de qui et en quoi?
Bref, la campagne électorale semble bel et bien avoir démarré… Et rien ne semble pouvoir empêcher l’occupant actuel de la Kasbah et sa pléthore de ministres de mettre les moyens de l’Etat au service des rendez-vous électoraux de l’année prochaine!
Toujours est-il que, le lendemain, la vie reprend son cours de la veille : économie chancelante, chômage chronique, inflation persistance, administration pléthorique et peu performante, corruption endémique, ressources naturelles surexploitées devant un laisser-aller généralisé.
Et par-dessus tout, une population désabusée et profondément déçue par tant de discours trompeurs fustigeant tant de promesses non tenues!
Non, la Tunisie mérite mieux!
* Citoyen désabusé.
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