Profitant de la faiblesse et des dissensions des partis de la place, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), notre vaillante centrale syndicale au passé glorieux qu’il est inutile de rappeler ici, semble faire sa mue pour se transformer en un partenaire politique de premier plan voire même en un parti incontournable.
Par Tarak Arfaoui *
Jouant dans la cour purement politique en procédant à un syndicalisme de façade, se mêlant avec le folklore des partis, s’acoquinant avec les uns dénigrant les autres, s’arrogeant tous les droits de regard dans les orientations politiques du gouvernement et même un droit de veto dans les nominations gouvernementales, l’UGTT, au vu des événements qui ont secoué le pays ces dernières années et dont elle était la principale instigatrice, est devenue de fait un véritable parti politique.
Le génie tunisien a créé le «syndico partitisme»
Sans vouloir heurter la fibre syndicaliste des ses valeureux militants, il faut bien se résoudre à constater que la centrale a bel et bien enterré le vrai combat syndical qui est vital pour le pays mais malheureusement cantonné à des demandes matérielles exclusives.
Le génie tunisien a créé le «syndico partitisme». L’UGTT n’a actuellement rien à envier à un parti politique fort de la démocratie de ses institutions de sa commission administrative dirigeante qui est de facto un bureau politique, de ses militants de ses idéologues et comme dans tous les partis de ses tauliers et de ses opportunistes.
Les événements récents me permettent d’affirmer sans hésitation que le timing de ses manifestations est purement politique. Son cheval de bataille, son seul slogan est l’augmentation des salaires des 650.000 fonctionnaires.
Je n’ai pas entendu ses responsables défendre la cause des 650.000 chômeurs qui n’ont jamais touché un seul salaire de leur vie et dont une grande frange est formée par des diplômés. Ils n’ont présenté aucune solution pour faire infléchir la courbe du chômage. Aucun programme économique digne de ce nom pour résoudre la crise financière du pays.
Pas un mot sur les devoirs essentiels des travailleurs qui est pour la centrale un sujet tabou dont on ne parle jamais. Pas un mot sur la productivité désastreuse du travailleur tunisien. Pas un mot sur l’absentéisme majeur qui gangrène la fonction publique. Pas un mot sur le train de vie royal de ses apparatchiks , encore un sujet tabou qui fâche, qui circulent avec une protection sécuritaire rapprochée en voitures de luxe avec chauffeur, carburant et assurances gratuites, voyagent à l’étranger aux frais de la princesse et profitent de passe-droits de toutes sortes.
Le Parti UGTT mènera le bal
Le fond de commerce de l’UGTT est le pauvre travailleur tenu au bout de la laisse par des revendications uniquement matérielles et constituant le réservoir inépuisable de «l’action militante syndicale».
Son secrétaire général, Noureddine Taboubi, un illustre universitaire bardé de diplômes, grand expert en macro économie, PIB et taux de croissance, l’a bien expliqué, sans aucune hypocrisie, dans un récent discours, le Parti UGTT mènera bel et bien toutes les batailles électorales prochaines pour diriger effectivement le pays en plaçant ses pions.
En attendant, vive la grève !
* Médecin de libre pratique.
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