Après avoir surpris tout le monde, en annonçant, mardi dernier, 19 février 2019, dans un communiqué laconique, le relèvement du taux d’intérêt directeur de 100 points de base le portant à 7,75, la Banque centrale de Tunisie (BCT) a décidé de s’expliquer, en publiant une note technique dans laquelle elle justifie sa politique de resserrement monétaire.
Par Khémaies Krimi
Schématiquement, et pour comprendre cette technique, les banques centrales pratiquent deux types de politique monétaire. Une baisse des taux d’intérêt (sur la base desquels elles prêtent aux banques et aux organismes de crédit) et l’injection de davantage de liquidités sur les marchés s’apparentant à une politique expansionniste ou de détente monétaire (en cas de déflation ou de ralentissement économique).
Un relèvement des taux et la diminution des liquidités constituent une politique restrictive, ou de resserrement monétaire (en cas de forte inflation ou de surchauffe de l’économie).
L’objectif final de la politique monétaire est de préserver la stabilité des prix tout en soutenant le développement économique.
Dans sa note, la BCT relève que les tensions inflationnistes observées, depuis 2017, se sont poursuivies tout au long de l’année 2018 portant le taux d’inflation à 7,3% en moyenne, sur toute l’année écoulée, contre 5,3% une année auparavant.
En janvier 2019, l’inflation globale s’est établie à 7,1%. Cette relative détente qui porte la marque, principalement, d’un effet de base favorable (étant donné que si l’on rapporte l’Indice des prix à la consommation de janvier 2019 à celui de janvier 2018 (qui est exceptionnellement élevé), le ratio obtenu s’inscrit en baisse) ne doit en aucun cas dissimuler les pressions susceptibles d’entretenir les tensions inflationnistes pour la période à venir.
D’ailleurs, relève la BCT, les principaux indicateurs de l’inflation sous-jacente se maintiennent à des niveaux supérieurs à la moyenne historique, et demeurent largement au-delà de l’inflation globale, présageant de la persistance des tensions inflationnistes.
Desserrer les tensions inflationnistes
La BCT devait résumer ensuite en dix points ce que les Tunisiens doivent savoir sur sa politique de resserrement monétaire.
1- En janvier 2019, l’inflation globale s’est établie à 7,1%. Cette relative détente ne doit en aucun cas dissimuler les pressions susceptibles d’entretenir les tensions inflationnistes pour la période à venir.
2- L’aggravation sans précédent du déficit courant de la balance des paiements, qui se maintient à deux chiffres pour la deuxième année consécutive, continue à attiser les pressions sur le taux change du dinar vis-à-vis des principales devises, et par voie de conséquence, sur l’inflation.
3- Le dinar s’est déprécié, en moyenne, de 12,9% contre l’euro et de 8,6% contre le dollar américain. Cette dépréciation s’est transmise rapidement aux prix intérieurs, contribuant à la persistance des tensions inflationnistes.
4- Les hausses passées et récentes des salaires; qui confèrent un pouvoir d’achat additionnel; lesquelles constituent la charge principale qui incombe aux entreprises, risquent d’entretenir une spirale prix-salaires très préjudiciable à l’économie.
5- L’orientation restrictive de la politique monétaire dont l’objectif consiste à contraindre la capacité des agents économiques à dépenser, à limiter la demande, principalement de consommation, et à contenir, par conséquent, les tensions sur les prix à la consommation.
6- Le coût de l’inaction aurait été très élevé. En effet, sans les actions de la Banque centrale, l’inflation aurait été encore plus élevée voire même à deux chiffres !
7- Un tel niveau d’inflation risquerait de compromettre la reprise économique encore fragile, et qui pourrait être davantage fragilisée avec un taux d’inflation aussi élevé, facteur qui pourrait même avoir des répercussions sur la visibilité des investisseurs et donc impacter négativement les décisions d’investissement !
8- La Banque centrale, dont le mandat est de veiller à la stabilité des prix, ne ménagerait aucun effort pour juguler l’inflation et agir sur les anticipations.
9- Un dérapage de l’inflation affecterait considérablement les couches sociales les plus démunies et ce, notamment, à travers une érosion conséquente de leur pouvoir d’achat.
10- La meilleure contribution que puisse apporter une Banque Centrale à l’économie c’est de préserver une inflation faible et prévisible, permettant d’assurer une croissance saine et durable.
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