Donald Trump a décidé de pousser vers la désignation des Frères musulmans comme organisation terroriste internationale, suite à la demande du président égyptien Abdelfattah Sissi, au cours d’un entretien privé, lors de sa visite, le 9 avril 2019, à Washington.
Traduit de l’américain par Amina Mkada
L’administration Trump insiste pour que soit annoncée la décision qui ferait des Frères musulmans une organisation terroriste étrangère, portant le poids des sanctions américaines, à l’encontre d’un mouvement politique islamiste légendaire et influent, comptant des millions de membres à travers le Moyen-Orient, selon des responsables proches du dossier.
La Maison Blanche a demandé aux responsables de la sécurité nationale et à la diplomatie de trouver le moyen d’imposer des sanctions à l’organisation, après la visite à la Maison Blanche du président égyptien Abdelfattah Sissi le 9 avril, sans prendre en considération le fait
que les Frères musulmans représentent une force d’opposition politique.
Trump et Sissi, même combat contre les Frères musulmans
Lors d’une réunion privée, sans journalistes ni photographes, A. Sissi a exhorté D. Trump à franchir cette étape, et à se joindre à l’Égypte pour faire de ce mouvement une organisation terroriste.
Une telle désignation impose de lourdes sanctions économiques et des restrictions aux déplacements, pour les entreprises et les individus, en interaction avec cette organisation. Le président a répondu par l’affirmative à A. Sissi, déclarant que cela aurait du sens. Certains des conseillers de D. Trump ont interprété cela comme un engagement, selon des responsables.
La proposition a toutefois suscité un débat acharné au sein de l’administration, notamment lors d’une réunion de haut niveau de décideurs de différents départements, convoquée la semaine dernière par le Conseil de sécurité nationale à la Maison Blanche, ont indiqué des responsables.
Dans un communiqué, Sarah Huckabee Sanders, attachée de presse de la Maison Blanche, a reconnu que l’administration travaillait à désigner les Frères musulmans comme terroristes . «Le président a consulté son équipe de sécurité nationale, et les dirigeants de la région qui partagent ses préoccupations, et cette désignation est en train de progresser dans le processus interne», a déclaré Mme Sanders.
Les lourdes conséquences juridiques et politiques
John R. Bolton, conseiller national pour la sécurité, et Mike Pompeo, secrétaire d’État, soutiennent cette idée, ont déclaré des responsables. Mais le Pentagone, le personnel de sécurité nationale de carrière, des avocats du gouvernement, et des diplomates ont formulé des objections d’ordres juridique et politique, et se démènent pour trouver une solution qui satisferait la Maison-Blanche.
En termes de droit, les responsables ont fait valoir que les critères de désignation d’une organisation terroriste ne se prêtent pas aux Frères musulmans. Ceux-ci sont moins une organisation cohérente, qu’un mouvement informel, ayant des sections dans différents pays qui utilisent ce surnom, ou qui ont des liens historiques forts avec elle. Plusieurs partis politiques, dans des pays tels que la Tunisie et la Jordanie, se considèrent comme des Frères musulmans ou y ont des liens, mais évitent l’extrémisme violent.
En règle générale, une telle désignation pourrait avoir de lourdes conséquences, notamment en ce qui concerne les relations avec la Turquie, dont le président, Recep Tayyip Erdogan, est un ardent défenseur des Frères.
Les conséquences, pour les Américains et les organisations humanitaires américaines ayant des liens avec l’organisation ne sont pas claires non plus. Les responsables des droits de l’homme craignent que A. Sissi ne s’en serve, pour justifier une répression encore plus dure de ses opposants.
Ancien général, A. Sissi a contribué à mener un coup d’Etat en 2013, qui a destitué Mohamed Morsi, premier président égyptien élu démocratiquement, et ancien dirigeant des Frères, et a réimposé le régime d’homme fort en Égypte.
Le gouvernement égyptien a qualifié les Frères d’organisation terroriste, il y a plusieurs années, dans le cadre d’une répression brutale contre ses partisans. A. Sissi, à plusieurs reprises, a fait pression sur le gouvernement Obama pour qu’il en fasse de même. Mais l’équipe Obama a refusé, pour des raisons à la fois juridiques et politiques.
Parmi les autres idées évoquées lors de la réunion de la semaine dernière, la tentative d’identifier et de cibler un groupe lié au terrorisme, lié aux Frères et qui n’a pas encore été désigné, ou de limiter la portée de cette désignation, à la branche égyptienne, ont indiqué des responsables.
Les Frères musulmans ont été fondés en 1928 en Égypte et, dans les années 1940, ont formé une branche armée secrète, pour lutter contre le régime colonial britannique. Ils ont renoncé à la violence dans les années 1960, et ont plus tard adopté la démocratie électorale, bien que certaines branches et d’anciens membres, se soient livrés à des activités terroristes.
Source : The New York Times,
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