La contrebande de drogues et d’alcool fait régulièrement les gros titres des journaux tunisiens. Et pour cause, de par sa situation stratégique, la Tunisie est très exposée à ces types de trafics.
Par Meriem Majdoub
La situation de la Tunisie au cœur de la Méditerranée, sa proximité avec la Libye, où la consommation d’alcool est prohibée, et avec le Maroc, plus libéral en matière de cannabis, sont autant d’éléments qui contribuent à en faire un paradis pour la contrebande.
Contrebande d’alcool à destination de la Libye
Bouteilles de whisky et de vodka se trouvent régulièrement au centre de toutes les attentions dans les ports tunisiens. Les agents de la douane se trouvent souvent confrontés à des tentatives de contrebande d’une grande quantité d’alcool à destination de la Libye, principalement. S’il est possible de se procurer de l’alcool en toute légalité en Tunisie, le pays voisin adoptant une politique bien moins permissive. La Libye fait, en effet, partie des 15 pays dans le monde qui interdisent la consommation et la vente d’alcool. Résultat : des ressortissants libyens tentent régulièrement de faire sortir illégalement de Tunisie des bouteilles de whisky et de vodka.
Une loi sévère pour les consommateurs de cannabis
Mais les trafics qui sévissent en Tunisie ne se limitent pas à la contrebande d’alcool. Une autre substance s’échange de manière illégale aux frontières de la Tunisie : le cannabis. Contrairement à l’alcool, la Tunisie ne le tolère pas et applique une des politiques les plus sévères du Maghreb à son encontre.
Votée sous Ben Ali, la loi prévoit une peine de prison de 1 à 5 ans pour la consommation ou la détention de cannabis. En comparaison, les fumeurs de joints risquent de 2 mois à 1 an de prison au Maroc, et de 2 mois à 2 ans en Algérie. Mais ces deux derniers pays se montrent enclins à abandonner les poursuites si l’auteur de l’infraction s’engage à une cure de désintoxication. Une faveur que n’accorde pas la Tunisie.
La législation y est tellement sévère que les auteurs d’infractions relatives aux drogues représentaient 28% de la population carcérale en 2016, comme le démontre un rapport édifiant de Human Rights Watch. Le pays voit aussi logiquement la contrebande de cannabis en provenance des pays voisins se multiplier.
Un collectif appelle à la dépénalisation du cannabis
Cette situation, le médecin, membre du Collectif pour la légalisation du cannabis (COLEC), Fares Chergui, interrogé par le journal français ‘‘Libération’’, la déplore : «La criminalisation pousse les jeunes à consommer davantage en signe de protestation. Or l’augmentation de la demande a fait de la Tunisie un paradis pour la contrebande. Nous recevons du Maroc et d’ailleurs des substances non contrôlées extrêmement nocives.»
Les membres de ce collectif espèrent bien assouplir la situation du pays. Depuis plusieurs années, il bataille pour obtenir sa dépénalisation. En avril 2017, ils sont parvenus à faire amender la loi, laissant ainsi le soin aux juges de se prononcer ou non sur une peine de prison. Prochaine échéance : les élections législatives, qui se tiendront à l’automne. Les membres du collectif espèrent bien en faire un thème de campagne.
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