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« Le Monde » parle de «l’humour sans tabous» et «provocateur» de Lotfi Abdelli


Lotfi Abdelli aux Journées cinématographiques de Carthage 2016.

Un article de Lilia Blaise, publié dans « Le Monde » du 16 août 2019, est consacré à Lotfi Abdelli, l’artiste de 49 ans «volontiers provocateur», qui brosse un portrait acerbe de la société tunisienne et n’épargne personne. Il se présente comme «l’ennemi numéro 1 des politiciens». Extraits.

«Dans les salles archi-combles du centre-ville de Tunis ou devant des parterres plus réduits en banlieue, son succès ne se dément pas (…). L’humoriste Lotfi Abdelli, à 49 ans, faire rire toutes les générations, toutes les classes sociales de Tunisie.

Sa marque de fabrique est un humour subversif qui se nourrit des discussions de café, comme de la richesse du dialecte tunisien dont il raffole.

Son atout est d’avoir su installer sa popularité dans le temps. Professionnel depuis ses 17 ans, il a été formé par l’élite du théâtre tunisien (…). Il produit ses one man shows depuis plus de 10 ans devant un public fidèle, qui se renouvelle grâce à l’arrivée de nombreux jeunes.

«Sous Ben Ali, j’avais 3 ou 4 flics dans la salle»

« Je fais les bêtises à leur place, c’est ça que les gens aiment, dit-il. Parce qu’eux ne peuvent pas les faire, souvent à cause de leurs tabous ou de leurs complexes. C’est mon travail de provoquer.»

Les «klem zeid» (gros mots) sont toujours revisités pour créer un jeu de mots, sans tomber totalement dans la vulgarité (…). L’artiste dresse un portrait acerbe de la société tunisienne et de son évolution, sans pour autant prétendre changer les mentalités. «Car un Tunisien peut être à la fois très ouvert sur certaines choses et très fermé sur d’autres, observe-t-il. Cela a toujours été notre force et notre contradiction.»

Il joue de la gestuelle apprise pendant ses années de danse et du comique de situation, tirant la plupart de ses tirades de moments cocasses de la vie d’un Tunisien lambda : l’enfance ponctuée de sorties à la plage où chacun se rappelle un père serrant la «fouta» entre ses dents pour enfiler son maillot de bain à l’abri des regards (…); ou «à des images de Bourguiba qui nage».

Même sous Ben Ali, l’humoriste savait tourner en dérision le carcan imposé. «Il fallait contourner la censure, mais la dictature était aussi une matière première pour l’humour. A chaque spectacle, j’avais 3 ou 4 flics dans la salle qui prenaient des notes et se marraient en même temps», se souvient-il.

Aujourd’hui encore (…) Lotfi Abdelli n’épargne personne. Il compare les politiciens à Mark Zuckerberg (…).

L’humoriste est aussi présent au cinéma, où il multiplie les rôles dramatiques dans des productions tunisiennes (…). L’artiste qui criait « Dégage » à Ben Ali en 2011, refuse de se qualifier d’«engagé» mais dit être «l’ennemi numéro 1 des politiciens».

(…) Volontiers provocateur, il donne régulièrement son point de vue sur Instagram où il est suivi par plus d’un million d’internautes (…). Il est l’un des rares humoristes à pouvoir parler de sexualité et de tabous sociaux même en plein mois saint, pour faire rire son public.

En outre, dans un pays où l’artiste n’a pas de statut juridique, Lotfi Abdelli est un défenseur de la profession et parvient à vivre de son travail».

Source: « Le Monde ».

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