Le problème de fond du Club africain (CA) c’est qu’il est devenu ingérable, traversé par toutes les contradictions, par la faute des aventuriers arrivés depuis 2011, comme l’ancien président Slim Riahi, mais aussi par la faute des divisions de ceux qui s’identifient à cette association historique.
Par Hassen Mzoughi
Le Club africain (CA) est de nouveau sanctionné par la Fifa. Moins d’une semaine après le retrait de 6 points de son solde au classement du championnat de Ligue 1 (et désormais lanterne rouge), le CA est frappé d’une interdiction de recrutement pendant les prochains mercatos d’hiver et d’été 2020. En vertu de la nouvelle sanction, l’attaquant Saber Khalifa, qui a signé pour 4 ans en faveur du club «rouge et blanc», sera contraint de le quitter car son inscription sur la liste ne se fera pas en décembre 2019.
Un club devenu carrément «ingérable»
Enorme colère des supporteurs et un nouveau communiqué du président du club, affirmant, pour les calmer, que le litige avec Matthew Rusike sera réglé illico presto.
Le litige avec El Eulma, club d’Ibrahim Chenihi transféré au CA en 2015, n’étant pas réglé (il date d’un an), qu’un autre litige refait surface. Il s’agit de l’ancien buteur zimbabwéen du CA, Matthew Rusike, qui réclame toujours ses impayés, d’un montant de 292.000 euros, après la fin du délai fixé par le comité de discipline de la Fifa. Ce joueur a joué pendant 10 mois au CA, de janvier à octobre 2017, avant de quitter définitivement le club, sans toucher son salaire pendant cinq mois.
Il est à rappeler que le CA était interdit de recrutement pendant le mercato d’hiver passé et le mercato d’été qui vient juste de s’achever le 15 septembre 2019. Il pensait avoir franchi cette période «creuse» mais le voilà qu’il commence une autre, sans parvenir à régler tous les litiges.
Outre Rusike, le dossier Yoann Touzghar serait de nouveau à l’ordre du jour à la Fifa et la sanction risque de tomber. Le Tribunal arbitral du sport (TAS) a sommé le Club africain de payer 1.463 million de dinars tunisiens (MDT) à son ancien joueur, à titre de salaire impayés et d’indemnité de résiliation de contrat. Lui aussi refuse un paiement sur plusieurs versements. Faudrait-il s’attendre à une nouvelle surprise désagréable ?
Toutes les sanctions étaient attendues mais la gestion des dossiers de litiges n’est pas de l’efficacité requise. Au contraire, les dirigeants ont préféré jouer la montre, lancer des promesses sans fondement, pour apaiser la colère des supporteurs. Le louvoiement et les hésitations ont ajouté à la crise.
Les clivages sont tellement prononcés au CA que la sortie de crise paraît impossible. On a beau accuser, à juste titre d’ailleurs, Slim Riahi d’être derrière ces «catastrophes», seulement l’ex-président n’est plus là et il est absolument prioritaire de liquider ces litiges, quitte à recadrer les objectifs sportifs.
Le problème de fond c’est que le CA est devenu ingérable, traversé par toutes les contradictions, par la faute des aventuriers arrivés depuis 2011, comme du reste dans le pays, mais aussi par la faute de l’abdication et des divisions de ceux qui s’identifient à cette association historique. Le CA séduit mais il est abandonné, malgré un peuple de supporteurs intransigeants et… impuissants.
Le CA séduit en sa défaveur; le paradoxe est énorme. La situation s’est dégradée, en raison d’un déficit d’expérience et de moyens. Abdessalem Younsi, l’actuel président, a certes hérité d’une situation catastrophique et son prédécesseur, Marouen Hamoudia, était là que seulement pour la transition. Mais quel est finalement leur poids financier ? Au final, la crise est encore là. Le grand paradoxe aussi : celui d’attendre un nouveau «Slim Riahi» plein aux as pour sortir le club du marasme.
Le risque de se laisser encore «manipuler» par des incompétents
La nature ayant horreur du vide, le CA risque de se laisser davantage «manipuler» par des incompétents et donc perdre son âme, alors que plusieurs clubistes (à l’étranger notamment) sont disposés à mettre beaucoup de moyens et à gérer le club avec des outils modernes. Avec leurs méthodes, sans les «anciens» qui sont davantage des ego que des solutions, sans les parasites qui se servent du club, sans les excès en tout genre, résultat d’une profonde frustration.
Le CA n’arrive toujours pas à trouver un minimum d’équilibre parce que chaque président qui arrive instaure son propre système. D’autant que le Comité des «Sages», aujourd’hui disparu, a été l’origine de nombreux dysfonctionnements. Et quand en plus le dirigisme «personnel» se substitue au travail collégial, quand les clans font la loi depuis le regretté Cherif Bellamine, difficile de garder le cap. Slim Riahi est arrivé après les excès de Jamel Latrous à l’égard de Bellamine.
Deux personnalités «emblématiques», deux riches hommes d’affaires, Hamadi Bousbia et Ferid Abbès, incarnent cette longue lutte intestine dans les coulisses. Au final, tous les deux constatent maintenant les dégâts. Comme beaucoup d’autres. Slim Riahi le sait et sait-on jamais, il pourrait rebondir au Parc Mounir Kebaili, parce que justement le CA est abandonné.
Les résultats du premier tour de l’élection présidentielle anticipée montrent bien que ceux qu’on n’attendait pas peuvent surprendre tout le monde et monter en haut de l’affiche. Parce que les autres candidats ont abandonné la place. Nabil Karoui et Kaies Said ont tout simplement rempli le vide.
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