Face aux difficultés que rencontre le chef du gouvernement désigné Habib Jemli à former une équipe gouvernementale, Ennahdha serait sur le point de mettre de l’eau dans son vin en acceptant carrément d’associer son sort à celui de Qalb Tounes pour la direction des affaires du pays… et tant pis pour le reste…
Par Marwan Chahla
C’est ce qu’a tenté d’expliquer hier, mercredi 27 novembre 2019, le dirigeant nahdhaoui Abdelhamid Jelassi, dans une déclaration au micro de Mosaïque FM.
Selon M. Jelassi, le parti islamiste n’a pas le choix: «Nous, en tant que première formation politique à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), avec nos 52 sièges, voulons travailler et faire avancer les choses. Mais il faut qu’on nous aide à assumer cette responsabilité nationale. Malheureusement, il y a des jours où nous avons l’impression que certains éprouvent un malin plaisir à nous placer dans le coin pour nous asséner des coups. Ils ne savent que faire du chantage et nous tenir la dragée haute… C’est vraiment à vous désespérer: ils veulent ceci, ils veulent cela», se plaint-il.
La résistance coriace d’Ettayar et Echaâb
Les «ils» auxquels le dirigeant nahdhaoui fait allusion ne sont un secret pour personne: il s’agit d’Ettayar de Mohamed Abbou et du mouvement d’Echaâb de Zouhair Maghzaoui, qui tiennent vraiment «à clarifier toutes les choses» au sujet d’une éventuelle alliance gouvernementale avec Ennahdha. Simple question de garanties – que les stratèges de Montplaisir ne veulent pas donner -, simple question de logique d’un donnant-donnant politique.
Or, Ennahdha ne l’entend pas de cette oreille-là – en tout cas, pas avec de potentiels alliés aussi coriaces qu’Ettayar et Echaâb.
Par contre, avec Qalb Tounes, les choses ne se posent pas de la même manière. La première partie du troc Ennahdha-Qalb Tounes a déjà eu lieu: le parti de Nabil Karoui a voté comme un seul homme pour que le président d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, obtienne la présidence de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). La contrepartie de ce deal conclu – «contre toute attente», diraient les naïfs – serait qu’Ennahdha renvoie l’ascenseur à Qalb Tounes en associant ce dernier au prochain gouvernement.
Ennahdha «contraint» à composer avec Qalb Tounes
Pour faire avaler cette pilule aux électeurs du parti islamiste et à l’opinion nationale et internationale, Abdelhamid Jelassi explique qu’Ennahdha se trouverait contraint de composer avec cette situation et de «collaborer» avec Qalb Tounes – laissant entendre que «la lutte contre la corruption pourrait ne plus figurer en tête des priorités de la prochaine équipe gouvernementale», comme si la lutte contre la corruption a jamais figuré parmi les priorités des Nahdhaouis, aussi solubles dans l’argent de la corruption et les privilèges indus que les partisans de Nabil Karoui, leurs alliés objectifs.
Pour Abdelhamid Jelassi, le tour de prestidigitation est joué: «Nous veillerons à ce que les membres du prochain gouvernement soient des personnes intègres, honnêtes, irréprochables…», promet-il, en prenant les Tunisiens pour des idiots.
Personne ne verrait jamais rien à ce tour de passe-passe !
M. Ch.
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