Un taux de croissance économique de 2,2 % prévu pour 2020 en Tunisie ne semble pas convaincre la Banque mondiale (BM). Par la voix d’Antonius Verheijen, le responsable de ses opérations dans notre pays, l’institution financière internationale a fait comprendre à la Tunisie qu’elle devrait faire beaucoup plus, notamment en mettant en œuvre, de toute urgence, les réformes convenues depuis un certain temps…
Par Marwan Chahla
Hier, mercredi 22 janvier, lors d’une conférence de presse annonçant le lancement d’un Dialogue sur les politiques économiques (Economic Policy Dialogue) en Tunisie, sous l’égide du Programme des nations unies pour le développement (PNUD) et de la Banque mondiale (BM), Antonius Verheijen a rappelé cette vérité élémentaire sur la faiblesse de la croissance économique de notre pays – c’est-à-dire, un petit point de pourcentage, en 2019, et la prévision de deux petits points pour 2020. Rien de bien réconfortant, il faut l’admettre.
Avec un taux de croissance de 2%, on ne peut espérer créer des emplois
«La Tunisie est sur la voie d’une croissance maximum de 2%, en 2020. Si l’on est optimiste, cela pourra être mieux. Par contre, si l’on est pessimiste et si l’environnement économique du pays – à savoir la crise en Libye, le différend irano-américain et les autres conflits moyen-orientaux – ne s’améliore pas, cela peut être pire. D’ailleurs, il y va de même pour un pays comme le Maroc», assène le représentant de la BM, sans aucun ménagement.
Dans ce qui ressemble à un agacement – que certains pourraient interpréter comme le signal d’un lâchage imminent de notre pays par l’un de ses plus fidèles créanciers –, Verheijen ajoute: «Avec un taux pareil [de 2 ou 2,2%, ndlr], raisonnablement, on ne peut pas espérer pouvoir créer des emplois. Tout le monde sait que c’est à partir de 5 ou 6% qu’il devient possible de générer des emplois.»
Stimuler davantage les modèles économiques alternatifs
De l’avis du banquier mondial, pour atteindre ce palier de croissance des 5 ou 6%, la solution est évidente : «Il faut que l’Etat tunisien investisse moins dans tout ce qui est subventions pour les industries traditionnelles et pour les produits traditionnels, et plus pour stimuler des modèles économiques alternatifs –en prenant exemple sur ce qui se fait dans les pays du sud-est asiatique. Dans cette région du monde, les choses se développent sur la base d’initiatives innovantes appuyées par l’Etat –d’ailleurs, ces initiatives changent constamment. C’est ce qui crée de la richesse et des emplois… C’est tout le contraire de dépenses publiques allant toujours dans le même sens, dans les mêmes secteurs et en faveur des mêmes produits et services.»
Le «rappel» d’Antonius Verheijen est net et direct: «On espère que le nouveau gouvernement prendra des engagements dans ce sens…» Encore faut-il, ajouterions-nous, qu’on lui laissera les coudées franches pour mettre en oeuvre les réformes douloureuses rendues nécessaires par la crise économique structurelle sévissant dans le pays depuis plusieurs années. Ce dont on peut sérieusement douter, sachant la forte opposition de certaines forces politiques et sociales à certaines de ces réformes, notamment celles relatives à l’assainissement des entreprises publiques, dont la plupart sont au chapitre de la faillite, au système de compensation de certains produits ou au dégraissage du secteur public, souffrant de sureffectif et d’inefficacité.
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