Selon l’ex-ministre chargé des Grandes réformes Taoufik Rajhi, la Tunisie envisage d’inviter, le mois prochain, le Fonds monétaire international (FMI) à des pourparlers sur la sixième revue du programme de prêts de l’institution de Bretton Woods –après la prise de fonction de la nouvelle équipe gouvernementale. Il faut bien boucler le budget de l’Etat pour 2020…
Par Marwan Chahla
Pour rappel, en décembre 2016, la Tunisie avait conclu avec le FMI un accord de prêts d’une valeur de 2,9 milliards de dollars, soit plus de 8,27 milliards de dinars tunisiens (MdDT), dont, jusqu’ici, 4,56 MdDT ont été décaissés sur cinq tranches –soit près de 55% du total octroyé à notre pays par l’institution financière internationale et qui était conditionné par un programme de réformes profondes d’une économie tunisienne sclérosée, notamment par la réduction des déficits chroniques et l’allègement d’une fonction publique pléthorique.
Depuis plus de trois ans, à l’occasion de chaque rencontre entre les représentants du gouvernement tunisien et la délégation du FMI, la promesse tunisienne de changement de cap dans la gestion des affaires du pays a été réitérée et, à chaque fois, la Tunisie a beaucoup peiné à convaincre le bailleur de fonds mondial que les réformes envisagées ou engagées avancent au bon rythme et que «les choses iront mieux» au prochain rendez-vous… A tel point que, l’an dernier, le déboursement de la tranche de 247 millions de dollars (707 millions DT) était devenue presque inespérée.
Pour une poignée de dollars…
Depuis l’été dernier, que d’eau est passée sous les ponts en Tunisie et que de confusions et d’incertitudes marquent le contexte actuel dans le pays: des élections générales ont transformé de fond en comble le paysage politique, une nouvelle distribution des cartes à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), une gestion des affaires courantes qui s’éternise, un nouveau gouvernement difficile à former… bref, un pays qui a déjà pris trop de retards et qui risque de perdre ses appuis externes.
Pourtant, Taoufik Rajhi (Ennahdha) préfère positiver: «Nous sommes prêts pour la sixième revue… Nous n’attendons plus que la formation du prochain gouvernement [d’Elyès Fakhfakh, ndlr] pour inviter officiellement, le mois prochain, la délégation du FMI afin d’entamer la sixième revue», a-t-il confié à l’agence Reuters.
Traduire : nous avons respecté nos engagements contractuels, nos dossiers sont solides et nous sommes éligibles au décaissement de la sixième tranche du prêt FMI dont le pays a grandement besoin pour espérer boucler son budget de l’Etat pour l’année 2020.
Entre l’exaspération des uns et la résistance des autres
Cette revue, si elle a lieu dans des conditions favorables, devrait permettre à notre pays de mobiliser des ressources financières pour l’exercice 2020 et faciliterait l’obtention de crédits auprès d’autres créanciers, y compris la Banque mondiale (BM), la Banque africaine de développement (BAD) et de l’Union européenne (UE), et même sur les marchés internationaux de capitaux où le gouvernement prévoit de sortir dans le courant de l’année en cours. C’est dire l’importance que revêtent ces rendez-vous Tunisie-FMI: ces rencontres de revue serviraient à calmer les impatiences et les exaspérations que peuvent exprimer certains des partenaires de la Tunisie. Ils permettraient aussi à notre pays de réitérer ses engagements anciens en matière de réformes structurelles, réformes qui avancent cahin-caha, en raison des résistances et des pressions de toutes sortes, celles des catégories sociales les plus vulnérables (chômeurs, pauvres…), des organisations nationales (UGTT, Utica, Etap…), des lobbys d’intérêts et des corporations professionnelles (avocats, médecins, etc.).
Pour rappel, notre pays aura besoin d’emprunter, en cette année 2020, sur le marché international, près de 3 milliards de dollars, soit plus de 8,5 MdDT, pour faire face à ses engagements en matière de dépenses.
Il faudra les trouver.
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