«Faut-il un autre assassinat politique pour se réveiller ?» C’est un wake-up call on ne peut plus clair qu’a lancé Mustapha Ben Jaâfar à la classe politique et aux Tunisiens. À l’heure où la tension politique est à son paroxysme et où le climat est de plus en plus délétère, le président de l’Assemblée nationale constituante (ABC) a appelé le chef de l’Etat à organiser un débat national sous sa houlette. Sera-t-il entendu?
Par Imed Bahri
M. Ben Jaâfar, qui se fait rare et qui a pris du recul ces dernières années mais qui reste un homme sage ne cédant jamais à la facilité du populisme et de l’agitation, a posté une vidéo Facebook d’un peu plus de trois minutes durant laquelle il a été concis mais clair et très direct.
M. Ben Jaâfar estime qu’à l’heure où les appels se multiplient pour dissoudre l’Assemblée, où d’autres manigancent pour faire tomber le gouvernement et où le débat politique n’a jamais atteint un tel niveau de violence et un niveau de médiocrité aussi bas, on ne peut pas rester les bras croisés. «Faut-il attendre un assassinat politique pour se réveiller ?», s’est-il interrogé.
L’étrange et dangereux mutisme de Kaïs Saïed
La seule solution aux yeux de M. Ben Jaâfar pour sortir de la situation stérile actuelle et pour ne pas se diriger vers le pire est le dialogue. Un dialogue qui regroupe tous les protagonistes politiques et qui, dira-t-il vers la fin, le soit sous la houlette du président de la République. «En espérant qu’il m’écoute», conclura M. Ben Jaâfar.
L’écouter a-t-il? Telle est la question. M. Saïed est responsable, premier responsable de l’Etat, veut-il qu’en sorte de cette situation chaotique par le dialogue et donc être de l’avis de M. Ben Jaâfar ou bien est-il partisan d’une autre stratégie qui consiste à ne jamais intervenir et à laisser la situation pourrir afin que le système implose?
Cette deuxième solution est plus radicale mais aussi plus risquée et peut-être dangereuse même pour la paix civile surtout que la paix sociale tient à un cheveu, le voisinage est explosif, le contexte régional est très tendu et le contexte international est flou.
Le président de la République ne consulte personne (il serait bien inspiré de recevoir et de discuter avec des personnes comme M. Ben Jaâfar) et il ne donne aucune interview. Aucune. Il reste muet. Il préfère quand des occasions comme l’Aïd pour prononcer un mot aux Tunisiens, comme ça il dit ce qu’il veut dire et ne dit pas ce qu’il ne veut pas dire. En évitant l’interview, il évite la contradiction et esquive ce qu’il veut esquiver.
Elyès Fakhfakh ne montre pas d’enthousiasme
Lors de son interview télévisée, hier soir, dimanche 14 janvier 2020, Elyès Fakhfakh n’a pas montré un grand enthousiasme quant à l’initiative de son mentor M. Ben Jaâfar. Or, celui qui a intégré Ettakatol le 15 janvier 2011 au matin et qui était l’ami du fils de M. Ben Jaâfar, aurait facilité l’initiative de son mentor en essayant de convaincre M. Saïed de son utilité mais «les fils politiques» quand ils commencent à prendre leur envol ont souvent tendance à couper le cordon avec le père.
Maintenant M. Saïed écoutera-t-il M. Ben Jaâfar? Mystère et boule de gomme.
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