Son planning est léger, ses activités officielles se comptent sur le bout des doigts d’une seule main, ses voyages à l’étranger sont plutôt rares, il adopte le mutisme total, il boude les réunions en visioconférence avec ses pairs, bref c’est une présidence dilettante à laquelle s’adonne le président de la République Kaïs Saïed.
Par Imed Bahri
La semaine dernière, M. Saïed n’a eu qu’une seule et unique activité officielle. Il a reçu Nasser Bourita, le ministre marocain des Affaires étrangères, le mercredi 10 juin 2020. Puis du 10 au 16 juin, aucune activité. Un trou béant sur la page officielle de la présidence sur Facebook.
Cette semaine, dans l’après-midi du mardi 16 juin, il reçoit le chef du gouvernement pour l’audience régulière entre les deux têtes de l’exécutif puis Sihem Bensedrine, ancienne présidente de l’Instance Vérité et Dignité (IVD). Mercredi 17, il préside le Conseil supérieur des armées et depuis, rien. Que fait-il? Mystère et boule de gomme. L’entretien hebdomadaire avec le ministre des Affaires étrangères n’a pas eu lieu ni cette semaine ni la semaine dernière. Le boude-t-il déjà ?
Un président hyper-absent…
Hier, jeudi 18 juin 2020 s’est tenu par visioconférence le sommet Chine-Afrique présidé par le président chinois Xi Jinping et avec la participation de tous ses homologues africains. L’Égypte, l’Algérie, le Ghana, le Nigéria, le Gabon et tous les pays africains, grands, moyens ou petits, étaient représentés et représentés par leur chef d’Etat. Le secrétaire général de l’Onu y a pris part. Notre Kaïs Saïed national, dont l’absence n’a même pas été remarquée, tant il se fait transparent sinon invisible et inaudible sur la scène internationale, a préféré bouder.
Les chefs d’Etat d’une cinquantaine de pays ont entre autres évoqué la crise mondiale relative à la pandémie du Covid-19 et la résolution de l’Onu sur ce sujet, une question que Saïed n’a cessé pourtant de marteler.
Rappelons que fin janvier, le président tunisien avait boudé le sommet de l’Union africaine à Addis Abeba alors qu’il y avait annoncé sa présence. Il prétexta une maladie. Il a aussi boudé le Forum mondial de Davos auquel il était convié et le sommet Royaume Uni-Afrique auquel la Tunisie a été conviée parmi une vingtaine de pays africains. Ses homologues ont tous répondu présent sauf lui.
Rappelons également que Kaïs Saïed, dont on se demande comment il passe ses longues journées dans un palais de Carthage étrangement calme et silencieux, ne donne aucune interview. Il préfère les allocutions brèves durant lesquelles, il dit ce qu’il a envie de dire et ne dit pas ce qu’il n’a pas envie de dire. Il évite ainsi la contradiction et réduit le risque de laisser entrevoir ses insuffisances ou de commettre carrément des bourdes.
… pour une présidence a minima
Pour le voyage de «travail» du chef de l’Etat à Paris, la semaine prochaine, on notera, sans surprise, qu’il ne durera qu’à peine 24 heures et se limitera aux étapes protocolaires habituelles clôturée par une petite visite à l’Institut du monde arabe (IMA).
Avec M. Saïed, c’est une présidence dilettante, doucement le matin, pas trop fort le soir. Ou son mandat s’apparente plus à une retraite présidentielle pour l’universitaire. Mais pourquoi cette présidence en rodage? A-t-il un problème? Est-il intimidé par la fonction? Est-il asocial? A-t-il un problème physique? Nous devons savoir en tant que citoyens les raisons de cette présidence à éclipse et au rendement très faible qui nuit à la Tunisie et qui l’efface. Jamais un président de la république n’a été aussi populaire et aussi… transparent à la fois. Car même le nonagénaire Béji Caïd Essebsi, qui n’était pas un bourreau de travail, apparaît aujourd’hui comme un hyper-président comparé à son successeur, de 30 ans son cadet.
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