Donald Trump va sûrement perdre l’élection présidentielle aux Etats-Unis au profit de Joe Biden, pour le bien de tous ses adversaires et celui de la paix mondiale. Mais à vrai dire, l’adversaire de Trump n’est pas Biden, ni les Démocrates, mais d’abord lui-même, son arrogance et son excès, et ensuite la crise sanitaire de la Covid-19 qui a anéanti les réalisations des trois premières années de son mandat, notamment la relance économique et la baisse du chômage. Reste que le Trumpisme risque de perdurer encore des années, et pas seulement aux Etats-Unis
Par Dr Abderrahmane Cherfouh *
Tous les regards sont aujourd’hui tournés vers les États-Unis qui ont organisé le 3 novembre 2020 leur élection présidentielle qui a coïncidé cette année avec la crise mondiale de la Covid-19 ayant fait des ravages particulièrement dans ce pays où les contaminations dépassent les 100.000 cas quotidiennement.
Les Etats-Unis ont toujours fasciné le monde de par la place qu’ils occupent dans le monde, leur influence, leur prestige, leur savoir scientifique, leur apport à l’humanité et le message humaniste qu’ils ont toujours véhiculé à travers les siècles. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, ils ont toujours occupé les devants de la scène dans tous les domaines. Ils sont à l’origine de beaucoup de découvertes et d’inventions et, à l’instar d’autres pays, ont fait progresser l’humanité et lui ont permis de faire des avancées scientifiques considérables dont nous profitons tous des bienfaits et des avantages.
Les Etats-Unis entre ombres et lumières
De tout temps, le pays de Lincoln, de Mohamed Ali, de Marilyn Monroe, de Martin Luther King, du Coca Cola et de Google a exercé une attraction considérable sur les immigrants qui caressaient le fol espoir de s’y installer et d’y trouver une société stable, riche, et sans problème, qui va leur permettre de construire leur avenir et celui de leurs enfants à la hauteur de leurs rêves et de leurs aspirations. Or, une fois confrontés à la réalité du terrain, ceux parmi ces derniers qui ne s’y sont pas bien préparés, déchantent et découvrent l’autre facette de cette Amérique et les côtés impitoyables du libéralisme économique, mais ça c’est là une histoire.
Il faut dire que les Etats-Unis, qui ont tant donné à l’humanité dans le domaine scientifique, traînent une histoire parfois peu reluisante et un passé peu glorieux, surtout avec ses intervenions militaires au Vietnam, en Afghanistan ou en Irak, celui d’un pays qui a toujours cherché à exercer son hégémonie sur le reste du monde. On comprend que, lorsque ce pays organise son élection présidentielle tous les quatre ans, le monde entier s’y sent concerné de près ou de loin, er ce pour plusieurs raisons. Entre autres parce que les États-Unis sont la première puissance économique et militaire du monde et ont une grande responsabilité à assumer vis-à-vis de leurs alliés et de leurs partenaires à travers le monde qui attendent avec impatience le nom du vainqueur et tous espèrent l’élection du bon président susceptible de nouer des relations privilégiées avec leur pays.
Par ailleurs, et compte tenu de l’ampleur de l’influence qu’exercent les Etats-Unis sur le reste du monde et afin de saisir toute l’importance, la portée et les conséquences potentielles, espérées ou redoutées, de cette élection pas comme les autres, tous les dirigeants du monde, amis comme ennemis, suivent avec attention son déroulement et appréhendent son résultat.
En tout état de cause, le monde est impatient de connaître le dénouement de l’actuel scrutin et le nom du futur vainqueur, Américains et autres, qui tous retiennent leur souffle et espèrent se trouver demain dans camp du futur vainqueur. Et comme toujours, il est de tradition que cette élection divisent les Américains en deux camps, aujourd’hui incarnés par Joe Biden pour les Démocrates et Donald Trump pour les Républicains. Pour une fois, les deux candidats sont tous les deux avancés dans l’âge : ils ont plus de 70 ans.
Il faut toujours se méfier de la bête blessée
Pour avoir été le président des Etats-Unis pendant 4 ans, Trump est mieux connu sur la scène internationale que Biden. Tout le monde connaît la personnalité controversée du président sortant, ses réactions impulsives, ses déclarations tonitruantes, ses sautes d’humeur et ses excès parfois équitants de la part du président de la première puissance mondiale. L’homme, qui a plusieurs facettes, n’a pas la langue dans la poche et ne recule devant aucune énormité.
Moins connu, même s’il a été deux fois vice-président sous le mandat de Barack Obama, Biden est âgé de 77 ans et doté d’une mémoire qui lui joue souvent de mauvais tours. Il fut aussi accusé de plagiat à deux reprises. Une première fois pour avoir copié mot à mot des passages d’un discours de l’ancien chef du parti travailliste britannique Neil Kinnock et une deuxième lorsqu’il s’est inspiré d’un texte qu’avait écrit l’ancien chef du NPD canadien Jack Layton, quelques jours avant son décès, en 2011, impardonnable de la part du dirigeant politique d’un pays où les droits d’auteur sont sacro-saints. Moins glorieux encore : Biden fut aussi accusé par certaines femmes de harcèlement sexuel, ce qu’il a évidemment démenti.
Pour la préparation de cette élection très importante, chacun avait affûté ses armes, ne ménageant aucun effort et ne lésinant pas sur les moyens, qui furent colossaux dans les deux camps. Et avant le jour J, tout le monde pensait que l’élection était déjà pliée et qu’elle ne serait qu’une formalité pour Biden, d’autant plus que tous les pronostics donnaient le Démocrate comme vainqueur et prédisaient une vague bleue (couleur des Démocrates). Ce qui n’eut pas lieu, Trump ayant causé encore une fois la surprise et démenti tous les pronostics.
Comme dit l’adage, il faut toujours se méfier de la bête blessée. Détesté à l’extrême par la plupart des médias mondiaux surtout occidentaux qui voient en lui un danger potentiel pour la paix mondiale, Trump a subi un lynchage médiatique savamment orchestré, à tort ou à raison. Haï et vomi par beaucoup, pour qui il incarne le mal, la mauvaise foi, le mensonge, la malhonnêteté, on lui reproche son manque d’humilité, de retenue et de compassion. Amoral, inculte, impoli, ne cultivant aucune valeur humaine, il fait la honte à beaucoup d’Américains et symbolise, à leurs yeux, la décadence des États-Unis et la dégradation de son image dans le monde. Cependant, tous ces mauvais qualificatifs et ces dénigrements n’ont pas eu d’emprise sur son public qui l’a toujours soutenu et continue de voir en lui le sauveur de l’Amérique et le chef providentiel capable de réaliser les aspirations des Américains.
Tout ça, c’est presque déjà de l’histoire, car Trump va sûrement perdre cette élection pour le bien de tous ses adversaires, pour la paix mondiale et pour d’autres raisons encore.
Trump est peut-être fini mais le trumpisme a de beaux jours devant lui
À vrai dire, l’adversaire de Trump n’est pas Biden, ni les Démocrates, mais d’abord lui-même, son arrogance et son excès, et ensuite la crise sanitaire de la Covid-19 qui a anéanti les réalisations des trois premières années de son mandat, notamment la relance économique et la baisse du chômage. Malgré tout ce que le monde pensait de lui, et malgré son impopularité dans le monde et sa mauvaise réputation dans les médias, Trump a failli gagner. En prenant à la légère cette pandémie, il a précipité sa chute. Il ne voyait pas venir les conséquences de ce redoutable fléau qui allait écraser tout sur son passage.
Il faut avouer, en toute honnêteté, qu’il n’avait pas la capacité de gérer cette pandémie et rien ne le prédisposait à y faire face. Ce fut le grain de sable qui déglingua la machine jusque-là bien huilée.
Pour certains analystes, malgré tout ce que le monde pense de lui, le Trumpisme est un mouvement en marche et les Républicains, malgré leur défaite, vont sortir renforcés. Comment expliquer ce phénomène ? Quel est le secret de cet homme au style si particulier, affreux, méchant et éminemment controversé, qui ne laisse personne indifférent, attirant par dizaines de millions sympathisants et adversaires ? Pour répondre à cette question, il faut éviter de s’enfermer dans des ghettos idéologiques et, au-delà de Trump lui-même, interroger l’évolution des Etats-Unis et de la démocratie dans le monde qui n’a pas fini d’enfanter des monstres.
* Médecin algérien établi à Montréal.
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