La nomination de Yadh Elloumi comme président de son bureau politique va-t-elle mettre fin aux divisions apparues ces dernières semaines dans les rangs de Qalb Tounes ? Rien n’est moins sûr, d’autant que le bloc parlementaire de ce parti a déjà enregistré plusieurs démissions en moins d’un an et rien ne garantit que d’autres défections n’auront pas lieu prochainement.
Par Imed Bahri
Déjà, la semaine dernière, le même Yadh Elloumi annonçait dans des déclarations de presse, avec son style tonitruant, qu’il pourrait bien quitter bientôt Qalb Tounes sans donner plus de précision. Mieux encore : lors de son passage, en ce début de semaine, dans l’émission ‘‘Rendez-vous 9’’ sur la chaîne Attessia, il avait confirmé l’existence de divergences au sein de la direction du parti, devenues criardes depuis l’incarcération de son président-fondateur Nabil Karoui, poursuivi pour évasion fiscale, corruption financière et blanchiment d’argent. «Nabil Karoui savait aplanir les divergences, rapprocher les points de vue et sédimenter l’unité du parti. Il faut dire que c’est un génie. Son absence a laissé un grand vide», avait-il dit sur un ton mielleux qu’on n’apprend pas à un ancien RCDiste, fort en courbettes et en «donne ta main que je la mords».
La décision est venue de la prison de Mornaguia
La menace de démission de M. Elloumi, qui est très proche de Salwa Smaoui, l’épouse de M. Karoui, était donc, à n’en pas douter, un moyen de chantage et la réaction n’a pas tardé puisque sa promotion à la tête du bureau politique a été dictée par M. Karoui lui-même qui en a donné les instructions du fond de sa cellule de la prison de Mornaguia.
Les démêlées du magnat de la télévision et de la publicité avec la justice étant appelées à durer longtemps, le temps de la justice étant habituellement long et celui de la justice tunisienne l’est encore davantage, les problèmes de Qalb Tounes sont loin d’être terminés et tout porte à croire que la récente promotion de M. Elloumi ne va rien régler du tout, mais va plutôt exacerber les querelles de leadership en son sein ou, connaissant le tempérament impulsif et le caractère cassant de l’expert-comptable – très fort en (mauvais) calculs –, provoquer de nouvelles divisions, défections et démissions, alors que les appétits s’aiguisent sur un fond de crise politique généralisée, suscitant des alliances et des contre-alliances parlementaires à n’en plus finir.
En attendant le prochain épisode
Yadh Elloumi, véritable girouette politique, qui n’est pas à un retournement de veste près, passé sans transition du RCD au CPR puis à Qalb Tounes, pourrait bien briguer la présidence de ce parti ou… en claquer la porte si ses ambitions venaient à y être contrariées pour aller renforcer les rangs d’une autre formation. Ennahdha, par exemple… Avec lui, le spectacle est toujours garanti et on ne risque jamais de s’ennuyer. Et c’est peut-être là son unique qualité. Alors wait and see…
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