Commentant l’annonce, dans la soirée du mardi 23 février 2021, de la dégradation de notation souveraine de la Tunisie par l’agence américaine Moody’s de B2 à B3 en maintenant la perspective négative, Abdelkrim Lassoued, directeur général du Financement et des Paiements extérieurs à la Banque centrale de Tunisie (BCT), a précisé qu’on l’a échappé belle et que cette nouvelle notation aurait pu être pire. Doit-on donc s’en féliciter ?
Par Imed Bahri
Non bien sûr, M. Lassoued qui intervenait ce matin, mercredi 24 février 2021, dans la ‘‘Matinale’’ d’Express FM, a estimé que cette dégradation est douloureuse et grave et va compliquer davantage la tâche du gouvernement qui a besoin de mobiliser des financements extérieurs pour boucler son budget de l’année en cours, des financements qui lui coûteraient désormais beaucoup plus chers, si tant est qu’il trouverait des bailleurs de fonds pour les lui accorder.
Un camouflet bien méritée
Cette dégradation, du reste attendue, s’explique par plusieurs indicateurs économiques négatifs, notamment : 1- le taux de croissance (-8,8% en 2020, contre une moyenne de 0,5% au cours des 10 dernières années, difficile de faire pire); 2- le creusement du déficit commercial à 10,1 du PIB en 2020, contre de 3,5% en 2019 (soit une hausse de 6,6% en une année); 3- la hausse du taux d’endettement à 84,6% du PIB en 2020, contre 74% en 2019, soit 10 points supplémentaires en une seule année, et contre 34% en 2010, soit 50% de plus en 11 ans. Moody’s prévoit même que ce taux pourrait atteindre 100% en 2022.
Un quatrième indice très négatif a sans doute pesé dans la décision des experts de Moody’s, c’est le taux de chômage qui a atteint 17,4%, en raison de la faiblesse des investissements, aussi bien intérieurs qu’extérieurs, le site Tunisie n’inspirant plus la confiance qu’il inspirait, pourtant, avant 2011, sous la dictature de Ben Ali. Merci qui ?
À tout cela s’ajoute l’instabilité politique, qui ne plaide pas pour une relance de l’investissement, de la croissance et de l’emploi. Et Moody’s parle aussi de la mal-gouvernance qui ne permet pas de mettre en œuvre les réformes économiques qu’exige la situation, les gouvernements successifs ayant montré une grande incapacité à agir pour redresser la situation. Et les engagements pris à ce propos ne sont jamais respectés…
La stupidité n’a pas de limite
Il y a donc toujours la menace d’une autre dégradation de la notation souveraine de la Tunisie à C, et ce sera pire qu’une catastrophe : une descente aux enfers.
Conclusion: le chef du gouvernement Hichem Mechichi, plus soucieux de sa carrière politique que du sort du pays dont il a la charge, et qui a déjà prouvé son irresponsabilité, peut continuer à signer des accords d’augmentations salariales et de primes exceptionnelles avec les représentants de tous les corps de métiers dont il espère l’appui à sa petite personne. Et le parti islamiste Ennahdha, au pouvoir depuis 2011 et principal responsable de la gabegie régnant dans le pays depuis cette date, peut maintenir sa marche de soutien au gouvernement en place, samedi prochain, 27 février, pour prouver, s’il en est encore besoin, que la stupidité n’a pas de limite.
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