Les douze prochains mois seront les plus importants pour la Tunisie depuis la révolution de 2011 et tout dépendra de la capacité des Tunisiennes et des Tunisiens à obtenir des devises de l’étranger pour importer les médicaments, l’énergie et le matériel étranger (PC, scanners, machines outils, voitures…). Et pour cela, des mesures sont à prendre en urgence et de nouvelles pistes à explorer.
Par Pr Bruno Bernard *
Les Tunisiennes et les Tunisiens ne voient pas le changement radical qui s’opère : les jeunes parmi eux postulent encore plus à l’étranger, des milliers de jeunes diplômé.e.s cherchent à partir à l’étranger pour fuir le pays.
Après la catastrophe de la Covid-19, vous perdrez vos meilleurs éléments. J’ai vu par centaines dans les cabinets des ressources humaines à Bruxelles, Londres, New York, Berlin, Paris… de nombreuses propositions d’emplois qualifiés, de nombreuses candidatures de Tunisiennes et de tunisiens.
Avec les pertes démographiques liées à la Covid-19 les pays vont ouvrir les
frontières pour les visas des diplômé.e.s. (médecins, infirmier.e.es,
managers, ingénieur.e.s IT, pilotes…).
Pousser la ligne et trouver de nouvelles opportunités
Sans jeunes entrepreneurs ou jeunes cadres, le pays sera en danger. Un État de 11 millions d’habitants ne peut pas résister à la pression des voisins surpeuplés s’il n’a pas de jeunes leaders avec du sang frais et de nouvelles idées …
Les 12 prochains mois seront les plus importants pour votre pays depuis la révolution de 2011 et tout dépendra de votre capacité à obtenir des devises de l’étranger pour importer les médicaments, l’énergie et le matériel étranger (PC, scanners, machines outils, voitures…).
Vous avez besoin de sang frais de jeunes entrepreneur.e.s pour pousser la ligne et trouver de nouvelles opportunités commerciales comme la production bio de légumes pour l’export, de nouveaux projets de services en ligne et une nouvelle structure de tourisme basée sur la demande du 21e siècle.
Votre pays doit exporter davantage non seulement pour faire des affaires, mais aussi pour survivre. Nous sommes dans un point de non-retour pour votre industrie surtout vos PME-PMI et votre tourisme.
J’ai fait une interview le 3 mars 2019 à Tunis concernant les exportations dans le cadre de la francophonie et déjà avant la Covid, je martelais le message d’entrepreneuriat et de collaboration économique avec la diaspora.
Des pistes pour accroître les opportunités économiques
À ce propos, je fais ici quelques propositions…
Il convient d’augmenter le nombre de femmes entrepreneures car les résultats de réussites des femmes entrepreneures sont 14% supérieurs à ceux des hommes; et laisser les femmes conduire le commerce plus facilement augmentera énormément vos résultats économiques.
Il convient aussi d’augmenter la production agroalimentaire biologique (épices, légumes, poissons, fruits transformés) et d’accroître les exportations sur le marché européen qui importe par exemple des quantités incroyables du Maroc.
Autre piste : changer la communication pour le tourisme concernant l’Union européenne (UE) et cibler les nouveaux visiteurs qui recherchent un nouveau style de tourisme post-Covid mais aussi de nouveaux marchés comme la classe moyenne d’Afrique qui ne peut aller en Europe.
Dans ce cadre, cibler le tourisme à l’intérieur du pays, et pas uniquement le littoral, les circuits gastronomiques locaux, la formation de cadres étrangers pour des séminaires détentes mais aussi liés aux réseaux sociaux (une école de formation pour youtubeur étrangers francophones et arabophones à Djerba)…
On peut faire aussi un focus sur les influenceurs web (invitez-les à «mettre votre nom sur la carte») et non sur la promotion traditionnelle comme les brochures papier ou les sites web.
Vous devez vous réapproprier les anciens touristes sur la mode revival-nostalgia, activité pour cinquantenaires qui leur parlent : exemple concert Stars 80 pendant leurs vacances ou trek en Renault 4.Les menus végétarien ou vegan doivent être sur toutes les cartes et adaptés aux nouveaux touristes de 2021…
Chercher de nouveaux clients avec de gros avantages
Pour l’industrie, on doit pouvoir trouver de nouveaux partenaires en Afrique comme Ankara l’a fait pour exporter des services et des produits de qualité moyenne pour les marchés qui demandent une production standard et non des produits européens coûteux ou de mauvaise qualité en provenance de Chine. Il y a une place pour la production standard tunisienne pour exporter sur ce marché avec 8% de croissance. L’Afrique subsaharienne est la Chine des années 80, c’est un partenaire solide pour l’avenir.
Il faut également repenser la valeur de la langue française et trouver des partenaires export sur la francophonie comme le Canada, Haïti ou Madagascar.
Pour les services, visez les petits pays ignorés par les majors et trouvez de nouveaux clients avec de gros avantages. Luxembourg, Monaco, Djibouti, Seychelles, Belgique, Chypre et Taiwan recherchent des solutions et les ingénieurs tunisiens sont en mesure de leur apporter des produits finaux.
Pour soutenir la Tunisie dans la crise et le chaos de la Covid-19, j’enseignerai en ligne (gratuitement sans salaire) un module d’exportation Benelux à l’Université libre de Tunis (ULT) comme en 2019 lors du Forum de la Francophonie.
Mon objectif est d’enseigner ce module d’exportation car le Benelex (Belgique – Neerderland – Luxembourg) sont 3 pays qui importent 28% du marché européen: l’un des plus grands au monde. Contrôler les règles et les portes du Benelux est la clé du succès de l’exportation.
Je suis volontaire pour venir GRACIEUSEMENT aider votre pays comme en 2019 et je suis à la disposition de vos ministres du Tourisme et de l’Economie pour une semaine de travail avec leurs équipes.
Tunisair est un symbole qu’il ne faut pas perdre ni totalement privatiser, il y a des solutions via le tourisme de masse qui peut revenir si on y travaille fort et intelligemment.
* Dr H.C., expert export pour la Commission européenne.
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