Pourquoi le Qatar soutient-il Ennahdha en Tunisie, les Frères Musulmans en Egypte, les Talibans en Afghanistan et autres mouvements islamistes à travers le monde ? Ce n’est surtout pas par conviction idéologique, sinon les Qataris auraient laissé ce genre de mouvements prospérer chez eux. Mais ils se gardent de le faire. Le chaos c’est pour les voisins, proches et lointains… Tout ce que fait le richissime émirat gazier se fait sur instructions des États-Unis. C’est leur État satellite chargé de la sous-traitance de certains aspects de leur politique pour le monde arabo-musulman. Décryptage.
Par Chedly Mamoghli *
Le Qatar est un État satellite des Etats-Unis avec tous les outils nécessaires aussi bien du hard power que du soft power pour accomplir comme il se doit son rôle d’Etat satellite.
L’Etat satellite des Etats-Unis qu’est le Qatar n’abrite pas une simple base militaire américaine comme c’est le cas dans d’autres pays mais le Centcom, la zone de commandement des États-Unis au Moyen-Orient, en Asie centrale et en Asie du Sud. Ça c’est pour le hard power.
Le soft power qatari mis à la disposition de Washington
Pour le soft power qatari au service de la politique américaine dans le monde arabo-musulman, il se compose de médias comme Al Jazeera, Al Araby, Araby 21, Middle East Eye, le célèbre journal londonien Al-Quds al Araby racheté à Abdelbari Atwan, etc., sans parler des mercenaires sur les réseaux sociaux, des trolls, des sociétés de lobbying et de PR (relations publiques) avec lesquels le Qatar signe de gros contrats pour influer sur les journalistes et les médias occidentaux. Ce soft power se compose également des think tank financés par le Qatar, des clubs de football européens, etc.
La manne gazière intarissable fait que l’émirat est richissime et peut financer tout ce que lui demandent les États-Unis.
Tous les ingrédients pour être un État satellite existent donc s’agissant du Qatar pour accomplir les rôles, les tâches et les basses besognes que l’on attend d’un État satellite. On l’a vu lors de la guerre d’Irak en 2003, les avions américains et britanniques décollaient de la base d’Al-Udeid pour bombarder ce pays. Base utilisée aussi lors de la guerre d’Afghanistan puis lors de la guerre en Syrie, etc.
Pour le soft power qatari, il a servi pour vendre l’arrivée au pouvoir des Frères Musulmans soutenus par l’administration Barack Obama lors des printemps arabes. Il sert aujourd’hui à nouveau pour vendre la «cession» de l’Afghanistan par les Américains aux Talibans en les présentant comme ayant évolué et connu une mutation sachant que le deal pour céder l’Afghanistan aux Talibans a eu lieu comme par hasard à… Doha. D’ailleurs le bureau des Talibans à Doha a été ouvert sur la consigne des Américains en 2013.
Un sous-traitant de l’Oncle Sam pour le monde arabo-musulman
Aujourd’hui, Washington sous-traite ses relations avec l’Afghanistan des Talibans au Qatar qui applique à la lettre les instructions américaines. Le vice-Premier ministre et ministre de la Défense qatari Khalid Al-Attiyah a été le premier officiel reçu au Pentagone après l’arrivée au pouvoir des Talibans en Afghanistan, c’était le 19 août dernier. Hier soir, dimanche 5 septembre, le secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken arrivait à Doha pour donner les directives concernant le même dossier afghan.
En conclusion, ceux qui croient que le Qatar soutient Ennahdha, les Frères Musulmans, Talibans et autres par conviction ou par amour des islamistes n’ont rien compris. Absolument rien. Tout ce que fait le Qatar, État satellite des Etats-Unis, se fait sur instruction des Américains. Le Qatar n’est que le sous-traitant de l’Oncle Sam pour le monde arabo-musulman, qui décide ce que son satellite qatari exécute.
* Juriste.
** «État satellite» est un terme politique désignant un pays officiellement indépendant de droit, mais en fait sous la coupe ou sous la forte influence politique, économique et militaire d’un autre pays, par analogie avec des lunes tournant autour d’une grosse planète.
Articles du même auteur dans Kapitalis :
Afrique du Nord : L’influence américaine décroît, la Tunisie doit en tirer des conclusions
Kaïs Saïed poursuit le nettoyage d’une écurie appelée Tunisie
L’attitude poutinienne de Kaïs Saïed est indispensable dans cette phase
Donnez votre avis