C’est l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) qui se penche désormais sur la réforme des entreprises publiques. Et cela est compréhensible, car l’écrasante majorité de ces entreprises sont en quasi-faillite et risquent de mettre bientôt la clé sous le paillasson, avec la mise au chômage de dizaines de milliers de salariés. Il y a donc péril en la demeure et la puissante organisation syndicale ne peut pas continuer à se dérober à ses responsabilités et à renvoyer toujours la balle à un gouvernement aux prises lui-même avec de graves difficultés financières.
Par Imed Bahri
C’est dans ce contexte pesant que le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi. a ouvert, hier, mercredi 1er décembre 2021, un premier atelier de deux jours sur ce thème brûlant de la réforme des entreprises publiques, consacré cette fois au secteur de la santé et, plus précisément, au cas de la Société des industries pharmaceutiques de Tunisie (Siphat), aux prises avec de graves difficultés financières ayant carrément mis à l’arrêt ses laboratoires situés dans le gouvernorat de Ben Arous, au sud de Tunis.
Le tabou de la privatisation empêche toute solution
Les discussions, auxquelles ont pris part, aux côtés des experts du secteur, des représentants de la présidence de la république, du gouvernement et de plusieurs structures professionnelles, ont porté sur les moyens de restructurer la Syphat, qui traverse une grave crise financière depuis plusieurs années.
L’entreprise fait, d’ailleurs, partie d’un accord entre l’UGTT et le gouvernement pour entamer la réforme de 7 entreprises publiques. «Nous avons un accord avec le gouvernement pour commencer à réformer sept entreprises publiques, et nous cherchons à proposer une vision commune de cette réforme loin des discours pompeux», a déclaré le responsable syndical, dont l’organisation est fermement opposée à la solution, pourtant incontournable, de l’ouverture du capital de ces entreprises au capitaux privés, nationaux et internationaux, de manière à renforcer leur assise financière, à les doter des moyens pour opérer les évolutions nécessaires pour être plus compétitives et à assainir leur gouvernance, sans parler du transfert technologique dont elles pourraient bénéficier si elles parviennent à convaincre un partenaire stratégique d’entrer dans leur capital.
L’UGTT, qui est consciente de la nécessité de réformer les entreprises publiques, se dit attachée à une démarche concertée avec toutes les parties concernées, mais au cas par cas, selon le type de difficultés de chaque entreprise et les moyens de les solutionner, sans recourir nécessairement à la privatisation, un concept qui hérisse l’organisation syndicale, laquelle, soit dit en passant, recrute l’essentiel de ses adhérents au sein des établissements et des entreprises de l’Etat. Pour elle, privatisation est donc synonyme de perte d’influence…
Un plan de sauvetage basé sur une vision commune
Le ministre de la Santé, Dr Ali Mrabet, a exprimé, de son côté, l’intention de son ministère de coopérer avec l’UGTT et tous les autres intervenants du secteur en vue de sauver la Siphat et la sortir de la crise financière où elle se débat depuis plus de 10 ans. Il s’agit, selon lui, d’élaborer un plan de sauvetage sur la base d’une vision commune et applicable dans les meilleurs délais, afin que ladite société reprenne son rôle central dans l’approvisionnement du pays en médicaments, notamment dans le contexte actuel de la pandémie de coronavirus.
D’autre part, le président du Comité des contrôleurs d’Etat, Sami Hamdi, qui a représenté le gouvernement à l’atelier, a avancé plusieurs visions pour réformer la Siphat, assurer sa pérennité et renforcer sa compétitivité par rapport aux autres sociétés pharmaceutiques.
Parmi les axes qu’il a abordés figurait l’élaboration d’un plan de production visant à augmenter la capacité de l’entreprise à fabriquer des médicaments, l’élargissement de la liste des médicaments qu’elle produit, sa dotation par les derniers équipements de l’industrie et l’augmentation de son chiffre d’affaires. Il s’agit aussi d’accélérer les procédures d’octroi de licences pour la mise sur le marché des nouveaux médicaments et d’accompagner de la Siphat dans la recherche des liquidités financières dont elle a besoin et le renforcement de sa gouvernance dans le sens d’une plus grande rigueur de gestion.
La Siphat, dont la Pharmacie centrale de Tunisie (PCT) détient 68% du capital, fabrique environ 112 médicaments sur un total de 800 distribués sur le marché tunisien.
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