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L’absurde enquête sur les circonstances de la mort de Béji Caïd Essebsi

Béji Caïd Essebsi à l’hôpital militaire de Tunis entouré du collège de médecins qui s’occupait de lui.

Comme si les Tunisiens n’ont pas suffisamment de soucis avec les difficultés financières de leur pays, aujourd’hui au bord de la cessation de paiement, on leur en invente d’autres, en remuant de vieilles histoires sans queue ni tête, comme celle, vaguement évoquée à la mort de l’ancien président de la république, feu Béji Caïd Essebsi, le 25 juillet 2019, qu’il ait pu être assassiné. De prime abord, cette hypothèse, qu’il va falloir étayer par des preuves matérielles tangibles et non par de vagues allégations judiciairement stupides, semble devoir finir dans les poubelles de l’Histoire, comme ceux qui en furent la source.

Par Imed Bahri

Souvenons-nous, le premier à avoir parlé de ce sujet, c’était le soir du 25 juillet 2019, Hafedh Caïd Essebsi, le fils du défunt président, cité par Nessma TV, et à l’époque, aussi bien le fils du défunt que le patron de la chaîne télévisée aujourd’hui suspendue, cherchaient à déstabiliser le chef du gouvernement Youssef Chahed, qui était en conflit ouvert avec eux et en froid depuis plusieurs mois avec le défunt président.

La bombe qu’on avait voulu, à l’époque, faire exploser, n’eut cependant pas le retentissement recherché et le Béji Caïd Essebsi eut droit à des obsèques nationales émouvantes, suivies par des dizaines de milliers de citoyens amassés aux abords de la route entre le palais de Carthage et le cimetière du Jellaz où il fut inhumé en grandes pompes.

Deux témoignages très peu crédibles

En fait, Béji Caïd Essebsi était hospitalisé à l’hôpital militaire de Tunis, suivi par un collège de médecins militaires, dont faisait partie son médecin personnel, qui était aussi son propre gendre, et tout Tunis savait qu’il était très très malade depuis un certain temps et qu’il souffrait de bien gros bobos qui auraient laissé peu de chance de survie à un homme de son âge (93 ans).

C’est tout naturellement donc – les Tunisiens faisant une totale confiance au sérieux, à la rigueur et au savoir-faire de leurs médecins, et notamment ceux de l’hôpital militaire – que la bombe que Hafedh Caïd Essebsi et Nabil Karoui, alors alliés pour le meilleur et pour le pire, ont cherché à faire exploser, a finalement fait pschitt. Car non seulement les deux hommes manquaient cruellement de crédibilité, mais ils s’étaient jusque-là distingués par leurs manœuvres de bas étage et Nessma TV était considérée à juste titre comme une arme de désinformation massive, qui diffusait à longueur de journée des bobards dont les adversaires de son patron Nabil Karoui faisaient systématiquement l’objet.

Ces deux garnements, qui avaient fait tant de mal à la Tunisie, sont aujourd’hui en fuite à l’étranger, car faisant l’objet d’enquêtes judiciaires pour corruption et blanchiment d’argent. Hafedh Caïd Essebsi se trouve aujourd’hui en France qu’il a rejoint dès le lendemain de l’enterrement de son père; il n’a d’ailleurs pas cru devoir rentrer pour assister à l’enterrement de sa mère, décédée elle aussi peu de temps après, le 15 septembre 2019. Quant à Nabil Karoui, il a quitté, avec son frère et associé Ghazi Karoui, le territoire national de manière illégale via l’Algérie où il passa quelques semaines de prison avant d’être relâché et de se perdre dans la nature. La dernière fois que les deux frères ont été vus, c’était à Barcelone, en Espagne, le 6 novembre 2021.

Autant que l’absurdité de l’accusation, le manque de crédibilité de ceux qui l’avaient proférée à l’époque, les circonstances dans lesquelles ils l’avaient fait, les objectifs politiques qu’ils poursuivaient et leurs comportements pour le moins louches, avant et après le décès de Béji Caïd Essebsi, jettent le discrédit sur cette histoire à faire dormir debout et avec laquelle on essaie, aujourd’hui, d’occuper les Tunisiens…

De son vivant, Béji Caïd Essebsi avait longtemps servi de faire-valoir et de protecteur au tandem Hafedh Caïd Essebsi et Nabil Karoui et c’est en son nom que ces derniers avaient commis tous les abus imaginables, en bénéficiant d’une impunité totale. Faut-il s’étonner dès lors qu’après la disparition de leur protecteur, ils n’aient pas tardé à être rattrapés par la justice et à fuir à l’étranger?

Reste que le retour, aujourd’hui, à cette histoire, trois ans après, dans un entretien télévisé avec un agitateur islamiste hostile à Ennahdha, Mohamed Hentati, dimanche dernier, a de quoi rendre pantois et susciter des interrogations. D’autant que l’histoire a été très judicieusement «récupérée» (et c’est le cas de le dire) par la ministre de la Défense, Leila Jaffel, qui a ordonné l’ouverture d’une enquête judiciaire sur cette affaire. Comme pour détourner les Tunisiens de leurs problèmes et les occuper, très judicieusement, d’autant que beaucoup d’entre eux offrent une bonne disposition à avaler des couleuvres, et les plus grosses sont souvent les plus appréciées. Notamment par les médias dont on connaît la versatilité et l’inconsistance.

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