Ahmed Safi Saïd, journaliste et écrivain au parcours on ne peut plus trouble, qui a investi la scène politique tunisienne au lendemain de la révolution tunisienne de 2011 avec de grandes ambitions, est un vrai filou. Ses relations avec les despotes arabes, de Saddam à Kadhafi, sont bien documentées, et son goût pour l’argent des dictateurs est de notoriété publique. De nouveaux éléments viennent éclairer son sombre passé…
Par Imed Bahri
Nos collègues d’Al-Katiba viennent, en effet, de révéler l’existence d’un compte en son nom dans une banque étrangère, le Crédit Suisse en l’occurrence, ce qui est interdit par loi tunisienne aux Tunisiens résidant en Tunisie.
Interrogé à propos de ce compte, l’intéressé n’a pas démenti, affirmant même – par forfanterie ou par provocation – en posséder d’autres dans plusieurs autres pays européens et arabes, justifiant cela par ses activités éditoriales, tout en déplorant les lois dépassées en vigueur en Tunisie.
Pour un homme qui a présenté sa candidature à la présidence de la république et qui a même siégé pendant deux ans à l’Assemblée, de 2019 à 2021, avouons que cette façon cavalière de parler des lois de son pays est pour le moins déplacée.
«De quel droit vous mêlez-vous de mes comptes bancaires?»
Critiquer des lois et estimer qu’elles sont obsolètes ou sous-développées (ce sont ses mots) est une chose, mais ne pas les respecter et se faire prendre la main dans le sac en sont une autre. Mais cette arrogance à la limite de l’insolence et de la grossièreté ne surprend pas de la part de cet homme dont toute la carrière a consisté à servir les plus atroces dictateurs de la région, mettant sa plume de mercenaire à faire leur propagande, sans aucun état d’âme.
Mis face à la vérité qu’il a longtemps cachée, Safi Saïd a perdu son sang froid et a lancé à nos collègues d’Al-Katiba : «De quel droit vous mêlez-vous de mes comptes bancaires? Et de quel droit un Etat et ses lois arriérées se mêlent-ils de ce que je possède à l’étranger ?», s’est-il interrogé sur un ton goguenard mais qui trahit un fort agacement.
Les collègues qui ont épluché le compte de Safi Saïd au Crédit Suisse ont découvert qu’il a été créé le 12 avril 1990 et qu’il a enregistré d’importants mouvements, entre virements et retraits. Le 31 décembre 2002, il était crédité de 300 000 dolars US.
Mis face à ces données, Safi Saïd a expliqué que ce compte est en veilleuse et n’a pas connu de mouvements depuis 2004. Car il ne s’en serait pas occupé depuis son retour en Tunisie. L’homme politique affirme même qu’il ne possède pas un seul compte à l’étranger mais plusieurs, ouverts au gré de ses activités et de ses déplacements, notamment au Liban et en France (où il a vécu), mais aussi au Maroc, et dans d’autre pays, en précisant qu’il a besoin de ces comptes pour ses déplacements professionnels à l’étranger.
Pourquoi le journaliste n’a-t-il pas fermé ses comptes à l’étranger quand il a décidé de s’installer définitivement en Tunisie? Réponse : il s’agit de comptes quasi vides, et comme il doit payer pour les fermer, il a préféré les laisser ouverts!
«Je n’ai pas connaissance de ces lois obsolètes»
Personne ne reproche à Safi Saïd de gagner de l’argent, même si, en tant que journaliste, acteur politique et personnalité de la vie publique, il est tenu de révéler ses sources de financement aux autorités et, surtout, de payer ses impôts comme tous les autres citoyens, ce qu’il ne fait pas, puisqu’en présentant sa candidature à la présidence de la république, en 2019, il s’est contenté de déclarer un revenu annuel de 9 800 dinars tunisiens, soit celui d’un ouvrier non qualifié.
Cette même année, Safi Saïd a pourtant dépensé pour sa seule campagne électorale 254 000 dinars tunisiens, soit 25 fois les montants qu’il a déclarés au fisc en 2017, 2018 et 2019, selon les chiffres révélés par la Cour des comptes, qui a épluché les comptes des candidats aux élections.
Interrogé par la Cour des comptes à propos de ses dépenses électorales, Safi Saïd a produit des contrats de service et de location d’une maison, mais n’a nullement parlé de ses comptes à l’étranger, restés secrets jusqu’à ce jour.
«Je n’ai pas connaissance de ces lois obsolètes (qui interdisent à un Tunisiens résidant en Tunisie de posséder des comptes à l’étranger, Ndlr), et puis, je n’ai jamais travaillé avec l’Etat, et l’Etat n’a même pas dépensé de l’argent pour mes études. Cet argent est à moi et je suis libre de l’utiliser comme je veux et je ne suis pas obligé de le déclarer, puisque je ne l’ai pas gagné en Tunisie, et je ne le déclarerai pas», a lancé Safi Saïd à nos confrères d’Al-Katiba.
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