Né à El Aroussia, en 1947, le poète Tahar Hammami, fut dans les années soixante-dix, avec Habib Zannad et Fadhila Chebbi, un des chefs de file du mouvement d’avant-garde poétique «Poésie autre que métrique et libre».
La poésie irrésistiblement ironique et provocatrice de Hammami emploie à dessein des mots et expressions populaires, met en cause les classes et les injustices sociales, se plaçant du côté des démunis et des laissés-pour compte.
Intellectuel engagé, Hammami fut aussi essayiste, prônant la modernité et le discours de progrès. Menant des activités syndicales, il a été Prof. d’université. Il laisse une œuvre riche en essais et recueils qui peuvent se lire parfois comme des manifestes ou des déclarations publiques. Il décède à Madrid, en 2009.
Quelques titres de recueils (en arabe): Le siège, 1972; Le soleil s’est levé comme un pain, 1973; Un été de braise, 1985; Je vois les palmiers marcher, 1986; Le porteur de feu, 1994; Calmez-vous ô blessures, 2004.
Tahar Bekri
1
Et maintenant je vous massacre
Et vous élimine par intérêt
Je suis un crocodile populaire
Ma maison est blanche
Ma nuit est blanche
Mon cheval est blanc
Mon drapeau est blanc
Mes œufs sont blancs
Et moi comme un taureau espagnol
Je cours je cours je cours
Après la couleur rouge
2
Présentez-vous au paradis
Et hâtez-vous
Je ne suis qu’un crocodile
Je ne possède rien de ce bas monde
Je possède une résidence d’hiver
Une résidence au pacifique
Autour de mon palais un verger
Et huit salles de bain…
Mais le monde est éphémère
Et mon petit cœur est blanc
Ma petite paume est blanche
Je suis un crocodile patriotique…
Et j’aime mon pays
Mon amour est le feu des canons
Mon aimé est mon peuple
Dans la guerre sont vos intérêts
Et dans la faim
Mon amour coulant du sang
Coulant des larmes
Mon amour campe dans les tripes
Et mes amoureuses sont noires
Aggrave-toi crise tu exploseras poudre
Et maintenant je vous fais avaler mon feu
Et vous fais retourner sur le gril
Mon amour est Néron
Il vous envahit la nuit
Lance des raids sur les oliveraies
Et vous fait souffrir
Si quelqu’un s’évanouit
a faim
ou vieillit
Attendez Godot
Et mangez les fruits du «décollage»
©Traduit de l’arabe par Tahar Bekri
Tahar Hammami, poète de braise et de cendre
Le poème du dimanche : «La vieillesse de la mère» de Fadhila Chebbi
Le poème du dimanche : «La femme bateau» par Habib Zannad
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