L’affaire du passeport rouge utilisé par Kaïs Charfeddine, le fils du ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, fait des gorges chaudes dans les réseaux sociaux. Et cela s’explique, car la manière provocatrice avec laquelle le concerné a revendiqué ce privilège (une photo et une story sur son compte Instagram) avait de quoi choquer.
Ceux qui ont demandé des explications au ministère de l’Intérieur sont d’autant plus fondés à le faire que celui-ci est resté étrangement silencieux sur l’affaire depuis sa révélation hier, samedi 16 juillet 2022.
Or, des clarifications s’imposent à propos des raisons et des circonstances ayant entouré l’octroi d’un passeport spécial au fils du ministre de l’Intérieur, d’autant que le président de la république Kaïs Saïed fait de la lutte contre les passe-droits, le népotisme et la corruption son cheval de bataille.
Rappelons, à ce propos, que la présidence de la république avait rejeté, en décembre 2019, une demande de la présidence de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) relative à l’octroi de passeports diplomatiques aux députés, se basant essentiellement sur les dispositions de la loi numéro 40 de 1975 sur les passeports, les documents de voyage et sur les traités internationaux dans ce domaine.
Cette loi ne prévoit pas, en effet, l’octroi de passeports diplomatiques (passeports bleus) aux députés par le ministère des Affaires étrangères, mais stipule que le ministère de l’Intérieur peut délivrer des passeports spéciaux (passeports rouges) aux élus, qui doivent les restituer, obligatoirement, une fois leurs missions à l’étranger terminées.
A notre connaissance, cette loi n’autorise pas le ministre de l’Intérieur à attribuer un passeport rouge à son fils !
Rappelons, également, dans le même contexte, que lorsque la Commission des droits, des libertés et des relations extérieures de l’ARP était revenue à la charge pour adopter, le 20 février 2020, un projet de loi octroyant des passeports diplomatiques aux députés, la polémique rejaillit et la présidence de la république refusa de ratifier une telle décision, qui fut ainsi tuée dans l’œuf.
Enfin, et en pleine polémique, le célèbre juriste Slim Laghmani s’invita dans le débat pour préciser que seules 3 catégories de personnes peuvent bénéficier -en vertu de la coutume internationale- de l’immunité et des privilèges diplomatiques, à savoir les chefs d’Etat, les chefs de gouvernement, et les ministres des Affaires étrangères.
Que pense Kaïs Saïed de cette affaire, au moment où l’opposition l’accuse de vouloir instaurer un pouvoir personnel et autoritaire, un pouvoir qui, sous toutes les latitudes, est généralement synonyme de passe-droits, de népotisme et de corruption ?
I. B.
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