L’économie tunisienne dépend à hauteur de 70 à 75% de l’Union européenne (UE) qui est en plein marasme économique des suites de la guerre russo-ukrainienne, à commencer par sa locomotive habituelle, l’Allemagne, qui broie elle aussi du noir. Les perspectives sont peu reluisantes pour les Européens et leurs partenaires du sud, y compris donc la Tunisie.
Par Habid Glenza *
Entraînée par les Etats-Unis et l’Otan, comme d’ailleurs le reste de l’UE, dans un conflit (Russie-Ukraine) qui ne sert que les intérêts géopolitiques américains, l’Allemagne, 4e puissance économique mondiale et 1ère européenne, est au bord d’une récession qui perdurera pendant des années.
Longtemps présentée comme un modèle de pays économiquement et socialement prospère, l’Allemagne est en train de vivre une grave crise, semblable à celle qu’elle a connue avant la seconde guerre mondiale et qui a conduit Hitler à déclarer la guerre au monde entier.
L’histoire va-t-elle se répéter? Sans doute pas dans les mêmes termes, car beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis 1945. Mais les Américains, seuls gagnants de l’affaire, ont bien réussi à faire d’une pierre deux coups: l’affaiblissement simultané de l’Allemagne et de la Russie, deux puissances concurrentes, et ce faisant aussi, de l’Europe qui avait montré, ces dernières années, des velléités d’indépendance militaire, tout en restant solidement amarrée à l’Otan.
Inflation au plus haut niveau et baisse du PIB
Des augmentations de prix à deux chiffres n’ont pas été observées dans l’Oder depuis la Seconde Guerre mondiale. L’inflation de l’Indice des prix à la consommation (IPC) en septembre 2022 était de 10% en Allemagne. Pendant ce temps, les économistes abaissent les prévisions du PIB pour l’économie allemande en 2023 de 3,1% à – 0,4 %.
L’accélération de l’inflation en Allemagne était attendue. Les baisses du prix des billets de transport en commun et le bouclier anti-inflation carburant ont expiré cet été. Cependant, la hausse des prix a été beaucoup plus élevée que prévu. Les estimations étaient de 9,4%, tandis que – d’une année sur l’autre – les prix ont augmenté de 10%. Berlin tente de contenir l’inflation avec un autre paquet de protection. Hier, jeudi 29 septembre 2022, le gouvernement allemand a annoncé un gel des prix du gaz et 200 milliards d’euros destinés à des mesures de protection liées à la crise énergétique.
Cependant, une inflation élevée en Allemagne augmente le risque d’une augmentation des taux d’intérêt par la Banque centrale européenne (BCE) de 75 points de base. Un tel mouvement est soutenu, entre autres, par les membres du Conseil des gouverneurs de la BCE originaires des États baltes, d’Autriche, de Slovaquie et de Slovénie. Actuellement, le principal taux directeur de la BCE est de 1,25%.
L’Allemagne entre déjà en récession
Pendant ce temps, quatre grands instituts économiques allemands ont réduit les prévisions du PIB de l’Allemagne pour l’année prochaine de 3,1 % à moins 0,4%. Les analystes de l’Ifo, de l’IHW, du RWI et de l’Institut de l’économie mondiale de Kiel indiquent que la principale raison de la détérioration de la situation économique en Allemagne sera la hausse des prix de l’essence, qui réduira le pouvoir d’achat des consommateurs.
«Alors que nous ne prévoyons pas de pénurie de gaz en hiver par temps normal, la situation d’approvisionnement reste extrêmement difficile. S’il devrait s’améliorer à moyen terme, le prix du gaz devrait rester bien au-dessus des niveaux d’avant la crise. Cela signifie une perte constante de prospérité pour l’Allemagne», écrivent les analystes des quatre instituts économiques allemands.
Selon leurs calculs, le PIB allemand généré en 2022 et 2023 sera au total inférieur de 160 milliards d’euros à l’estimation incluse dans leurs prévisions de printemps. Les prévisions des économistes allemands sont également de mauvais augure pour l’inflation, qui risque de se maintenir à des taux à deux chiffres.
* Conseiller à l’exportation agréé par le ministère tunisien du Commerce.
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