Il y a encore des doutes quant à l’octroi au président Saïed de fonds d’urgence du Fonds monétaire international (FMI), mais Washington (et d’autres capitales) ont pris note de la stratégie de l’Italie pour aider à stabiliser la région – d’autant plus que la Russie tend la main à Tunis.
Comme l’a rapporté Il Foglio, le ministre britannique des Affaires étrangères, James Cleverly, a récemment plaisanté en disant qu’il «est totalement d’accord avec les deux Tonies». Il faisait référence au ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani et au secrétaire d’État américain Antony Blinken – ce dernier soutenant finalement les appels du chef de l’Otan pour que l’organisation se concentre sur son flanc sud ainsi que sur l’Ukraine.
Washington pourrait se rallier à la position de Rome
Les ministres des Affaires étrangères de l’Alliance atlantique se sont réunis mercredi 5 avril 2023 à Bruxelles pour discuter des questions en cours… et cette boutade signale que Washington pourrait se rallier à la façon de penser de Rome sur la crise tunisienne en cours.
Que se passe-t-il en Tunisie ? Le pays d’Afrique du Nord est toujours en proie à une profonde crise socio-économique à laquelle le président Kaïs Saïed peine à faire face. Tunis attend un prêt de 1,9 milliard de dollars du Fonds monétaire international (FMI). Cependant, les tendances autocratiques du dirigeant tunisien et sa réticence à respecter les exigences du FMI poussent certains pays à retarder l’approbation.
Les États-Unis appartiennent à ce dernier groupe, car ils sont sceptiques quant à la remise de l’argent à un régime qui pourrait affaiblir davantage le seul pays à émerger du printemps arabe en tant que démocratie.
Jeudi 6 avril, le président Saïed a rejeté l’accord de prêt tant attendu et a qualifié ses conditions de «diktats» étrangers qui «ne causent que plus d’appauvrissement […] L’alternative est que nous devons compter sur nous-mêmes».
Pendant ce temps, l’Italie a préconisé de travailler au déblocage des fonds pour stabiliser le pays et empêcher les puissances étrangères de profiter de la situation de la Tunisie – et ainsi de frapper indirectement les pays de l’Otan avec des tactiques de guerre hybrides, qui incluent la migration, selon la mise en garde du gouvernement Meloni.
Entre-temps, le ministre russe Sergueï Lavrov a pris contact avec son homologue tunisien.
La position italienne
Comme l’a rappelé lundi FM Tajani, Rome est «en contact permanent» avec Tunis et a annoncé un plan d’aide de 100 millions de dollars, dont la moitié est destinée aux PME. L’Italie pense que le meilleur plan d’action est de débloquer une partie des fonds – afin de traiter les questions les plus urgentes – et de lier le reste de l’argent aux réformes.
Cela, a déclaré M. Tajani, «peut être un moyen de démontrer la bonne volonté des pays amis de la Tunisie et du FMI» tout en maintenant l’accent sur les réformes.
Un consensus grandissant ? Les alliés de l’Otan semblent désormais plus réceptifs à la solution italienne : Tajani lui-même a déclaré qu’il pensait que «nous avançons dans la bonne direction […] Il me semble qu’il y a une attitude plus volontaire de la part des États-Unis, de la France», et après la visite du commissaire européen Paolo Gentiloni à Tunis, «également de la part de l’Union européenne».
Dans les prochaines semaines, les ministres des Affaires étrangères belge et portugais se rendront également à Tunis.
Et en attendant, au-delà des propos de M. Blinken, l’ambassadeur américain en Tunisie, Joey Hood, a rencontré son homologue italien Fabrizio Saggio à deux reprises ces derniers jours.
Cela s’est produit à la suite de l’appel téléphonique du 28 mars entre MM. Tajani et Blinken, suivi de contacts entre les services de renseignement américains et italiens, rapporte Il Foglio, notant que les dialogues étaient centrés sur les raisons de la géopolitique l’emportant sur celles de la bureaucratie.
Traduit de l’anglais.
Source : Decode 19.
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