Des vacances en Tunisie ? Non, merci, pas pour moi…

L’auteur, universitaire et écrivain néerlandais de 76 ans, relate ici la mésaventure qu’il a vécue récemment à l’aéroport de Tunis-Carthage où des agents de la douane lui ont pris 3400 euros. Injustement, pense-t-il… Et exige la restitution de son argent. Les autorités seraient bien inspirées de s’expliquer pour éviter des malentendus à l’orée d’une saison touristique qui s’annonce bonne… (Illustratiuon : l’auteur est un grand voyageur, ici au Népal, en décembre 2022).

Par Abram J. Krol

Vous passez des vacances dans un pays ensoleillé ? Insouciant? Vous n’avez pas besoin de la Tunisie pour cela.

Le fait est qu’un nationalisme effrayant a surgi récemment dans ce pays, où les étrangers ont tort et où il n’est pas rare de les voir volés ou agressés. Ce phénomène touche principalement les Africains noirs. Ils sont parfois battus, volés et maltraités. Même la police participe à cette maltraitance et fait peu ou pas d’efforts pour faire sanctionner les agressions contre les Noirs. Toute personne à la peau foncée est par définition dangereuse et criminelle.

Revenons maintenant à ma propre expérience. Je ne suis pas noir de peau, mais j’ai vécu moi aussi une mauvaise expérience à l’aéroport de Tunis-Carthage : 3400 euros – dont j’avais un besoin urgent – ​​m’ont été pris (volés ?) par les douaniers. Je voyageais plus au sud en Afrique et j’ai été traité comme un ennemi de l’État et un criminel.

Le fait que j’étais un passager en transit, qui avait raté un vol en raison des circonstances, ne comptait pas. «Cet argent peut avoir des origines criminelles», ont déclaré les douaniers. «Je peux prouver le contraire. J’ai mon ordinateur avec moi», ai-je répliqué. «Tais-toi maintenant, ou tu vas manquer le prochain vol.», m’a lancé l’un des agents. Un autre a menacé de me prendre toutes mes affaires et ce qui restait de mon argent.

Corruption? Vol? Prouve-le ! C’est ce m’a été dit un douanier subalterne et, plus tard, un journaliste tunisien. Il existe des mesures contre les grosses sommes d’argent qui sont acheminées vers l’Afrique noire. Mais je ne transportais rien, sauf les 5000 euros dont j’avais besoin. Les banques de nombreux pays du Sud fonctionnent au ralenti ou ne sont tout simplement pas présentes partout. On doit donc apporter de l’argent sur soi pour parer à toute urgence.

Au départ, cela semblait si agréable. Avec Tunisair vers Abidjan. Horaires de vol favorables, prix bas. Mais il y a des accros. L’information à l’aéroport de Tunis-Carthage était lacunaire. Les panneaux d’annonce ne fonctionnaient pas et la sonorisation était défectueuse.

J’étais assis dans le bon hall de départ en train de lire quelque chose. Le vol a été retardé, mais personne ne savait de combien de temps. C’est ainsi que, sans que je le sache, l’avion est parti, mais apparemment seul un petit groupe de personnes près de la sortie était au courant. Mon nom n’a pas été annoncé, pas même par les fonctionnaires dans un haut-parleur. Et c’est souvent le cas à Tunis…

Bien sûr, j’ai essayé de récupérer mon argent. «Nous avons une procédure pour ça», a déclaré le chef de service qui m’a pris mon argent. «Laisse tomber», murmura l’un de ses subordonnés. J’ai quand même essayé en envoyant trente lettres au système bureaucratique des douanes, aux institutions de contrôle, au ministère du Tourisme et à la compagnie aérienne et j’ai reçu trois réponses. Vous devez vous adresser ailleurs, m’a-t-on dit, mais ce n’est pas vrai. ! Deux fois, on m’a donné la mauvaise adresse web. C’est l’art de la tromperie. Un touriste ne compte pas. Il n’est là que pour être dépouillé.

Vous êtes en Tunisie pour vous faire escroquer et puis vous êtes encore raisonnablement aisé. Si quelqu’un a la peau foncée, il est immédiatement considéré comme un criminel potentiel. Je ne suis pas le seul à avoir vécu une telle expérience. Quand j’ai commencé à en parler autour de moi, j’en ai entendu des histoires, et des biens bonnes. Des vacances en Tunisie ? C’est seulement pour ceux qui ne recherchent ni la paix ni le plaisir.

Photo du document remis par les douaniers tunisien en guise de PV de plainte déposée par le concerné.

Lettre de M. Krol aux autorités tunisiennes

Nous reproduisons, ci-dessous, la lettre que le citoyen néerlandais a envoyée aux autorités tunisiennes pour exiger la restitution du montant que lui a pris la douane tunisienne. Nous avons juste corrigé quelques fautes de langue pour une meilleure lisibilité du texte.  

Cher Monsieur, Madame,

Mardi le 10 janvier, j’ai été confronté – totalement contre ma volonté – à une mesure de la douane tunisienne à l’aéroport de Tunis-Carthage. On m’a pris 3400 euros, un montant dont j’ai vraiment besoin. Cette mesure m’a posé un grand problème. Je suis convaincu que la douane a commis une faute grave et répréhensible.

Laisse-moi expliquer ce qui s’est passé: j’ai manqué lundi le 9 janvier mon vol vers Abidjan avec Tunisair. Je me trouvais malgré tout dans la salle du départ, mais l’information sur l’écran manquait presque totalement et la sonorisation ne marchait pas. J’étais entouré des gens, mais ils attendaient un autre vol. Je n’ai pas réalisé que mon vol était déjà sur le point de partir. Puis, on n’a pas appelé ceux qui étaient en retard, au moins pas d’une manière que moi je pouvais l’entendre. Pas de mauvaises pensées de ma part envers Tunisair ou l’aéroport. C’est comme ça. Il y avait des gens qui m’attendaient à Abidjan. Mais bon…

J’ai demandé aux autorités sur place (la police et la douane) ce que je dois faire. En effet, selon eux, il n’y avait pour moi rien d’autre que régler mon bagage. C’est cela ce que j’ai fait.

J’ai dû quitter la partie intérieure de l’aéroport pour régler mon vol pour l’autre journée.

Le personnel de la section du bagage m’a bien aidé.

Après avoir reçu un autre billet d’avion, j’ai passé la nuit sur une chaise. J’avais déjà perdu de l’argent. J’ai pris justement un petit peu pour la nourriture.

Bien à temps, je suis retourné à l’intérieur de l’aéroport pour prendre mon vol.

A la question des douanes (toujours très actifs quand il y a des vols vers l’Afrique noir, où dans beaucoup des cas les banques ne marchent pas ou bien difficilement). «Combien d’argent avez-vous?» J’ai répondu la vérité: «5.000 euros» (pas assez pour les voyages que je devais effectuer). On m’a dit qu’il était interdit de prendre sur soi plus de 1600 euros, une loi inconnue par les spécialistes que j’ai consultés. Car j’étais un passager en transit… On m’a pris (volé?) 3400 euros. On m’a insulté et menacé.

Quand j’ai dit que je pouvais leur fournir la preuve de l’origine du montant que je transportais sur moi (j’avais mon ordinateur avec moi). On m’a demandé un ton insistant et menaçant de me taire. On m’a aussi menacé de prendre ce qui restait de mon argent, ou de me faire manquer mon vol.

Le douanier qui m’avait laissé passer la nuit avant était là. Il a pris ma défense, mais son supérieur lui a coupé la parole. Je compris que si l’homme avait fait son travail comme il le fallait, il aurait dû me donner une déclaration concernant l’argent que je portais avec moi. C’est un grand montant, certainement pour moi, mais il ne faut pas oublier qu’en Europe, on peut prendre 10.000 euros en voyageant.

Malgré tout, on m’a informé que je pouvais porter plainte auprès du procureur. Et à ma grande surprise, ce sont seulement les coordonnées de la douane qui se trouvaient sur le P.V. de cette affaire. Cela ne m’a pas donné beaucoup d’espoir.

A l’ambassade des Pays-Bas à Tunis, on m’a dit de suivre malgré tout cette voie, ce que j’ai fait. Ils n’étaient pas au courant d’une limitation de 1600 euros pour les voyageurs. Selon eux, cela devrait être un montant de 6.000 euros. Assez des raisons pour qu’on me rende les 3400 euros qu’on m’a pris (ou bien volé?) sur le compte bancaire que je mentionnerai ci-dessus.

Même si la loi mentionnée par les douaniers, selon laquelle un voyageur ne peut transporter sur lui qu’un maximum 1600 euros, existe, il y a toujours des exceptions, par exemple pour quelqu’un qui doit être considéré comme un passager en transit (mais retardé), ou bien quand les douaniers eux-mêmes ont commis une erreur. Il n’y a pas des lois sans exceptions, et la loi n’est pas contre les bons, mais contre les méchants.

J’envois cette lettre aussi au conseiller juridique de notre fondation et à l’ambassade des Pays-Bas à Tunis. Il faut bien comprendre que vous m’avez ruiné. Il va me falloir deux ou trois années pour remettre ça en ordre. Récupérer ce montant est presqu’impossible à mon âge (76 ans).

Salut,

Abram J. Krol

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