Les enquêtes judiciaires sur de présumés complots contre la sûreté de l’Etat en Tunisie se suivent et se ressemblent, et la liste des prévenus mis en dépôt parmi les opposants au président Saïed s’allonge, sans que les autorités judiciaires ne communiquent officiellement sur les affaires en cours. (Illustration : Rayan Hamzaoui).
Une nouvelle enquête, la troisième de la série, a été ouverte cette semaine sur des personnalités politiques, notamment des opposants notoires au président Kaïs Saïed, soupçonnés de complot contre la sûreté de l’État, ont révélé des avocats aux médias.
L’affaire survient après une vague d’arrestations de personnalités de l’opposition lancée le 11 février dernier et que les détracteurs de Saïed assimilent à de la répression politique, ce que les partisans du chef de l’Etat nient catégoriquement.
Parmi les 20 personnes accusées dans cette nouvelle affaire figurent le principal chef de l’opposition Rached Ghannouchi, et son bras droit, l’ancien chef de gouvernement Ali Larayedh, qui sont déjà en prison pour d’autres affaires, l’ancien Premier ministre Youssef Chahed, réfugié en France, et l’ancienne directrice de cabinet de Saïed Nadia Akacha, elle aussi réfugiée en France et faisant l’objet d’autres poursuites judiciaires, ainsi que Rayan Hamzaoui, le très populaire ancien maire d’Ezzahra, mis en dépôt au début de la semaine. Selon l’avocate de ce dernier, Nadia Chouachi, la liste comprend également un ancien responsable sécuritaire et un journaliste indépendant.
Ghannouchi, l’ancien président du parlement, était l’une des personnalités politiques les plus en vue de l’histoire récente de la Tunisie, son parti Ennahdha ayant joué un rôle de premier ordre dans les gouvernements successifs pendant la période post-révolution de 2011.
Aujourd’hui âgé de 81 ans, il a été condamné ce mois-ci à un an de prison pour incitation à la violence pour des propos tenus lors de l’éloge funèbre d’un membre de son parti. La police a fermé les bureaux d’Ennahdha dans toute la Tunisie.
Chahed a été chef de gouvernement de 2016 à 2020 et faisaient partie des candidats qui ont perdu contre Saïed lors de l’élection présidentielle de 2019.
Nadia Akacha était considérée comme la confidente la plus proche de Saïed jusqu’à ce qu’elle quitte le poste de chef de cabinet l’année dernière, déménage en France et adresse des critiques acerbes à Saïed dans des enregistrements audio fuités.
L’opposition tunisienne accuse Saïed d’avoir accaparé tous les pouvoirs après un coup d’État, pour gouverner par décret et adopter une nouvelle constitution par référendum à faible taux de participation, en vertu de la laquelle il s’est mis hors de tout contrôle démocratique.
Des groupes de défense des droits ont également accusé le président de porter atteinte à l’indépendance de la justice en remplaçant les principales personnalités du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et en avertissant que les juges qui libèrent les personnes accusées de complot contre l’Etat seraient considérés comme complices.
Kaïs Saïed continue de nier avoir organisé un coup d’État, affirmant que ses actions étaient légales et nécessaires pour sauver la Tunisie, et accuse ses opposants d’être des criminels, des traîtres et des terroristes.
Avec Reuters.
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