Ceux qui s’attendaient (ou craignaient), ce matin, une nouvelle révolution tunisienne, après la diffusion, hier soir, de l’émission Enquête exclusive présentée par Bernard de La Villardière sur la chaîne française M6, consacrée à la Tunisie, en ont finalement eu pour leur frais.
Par Imed Bahri
En fait, l’émission au titre ô combien accrocheur ‘‘Tunisie, entre misère et dictature, le grand retour en arrière’’, n’a rien révélé que les Tunisiens ne connaissent déjà, à de rares exceptions près dues à un excès de langage (comme d’accuser le président Kaïs Saïed d’antisémitisme).
Les journalistes français, qui ont pénétré dans le pays profond, ont déroulé un miroir où nous avons vu ou revu nos tares, nos déboires et nos ratés des dix dernières années et les conséquences qui en ont découlé sur notre vie quotidienne : inflation, baisse du pouvoir d’achat, pénuries, chômage, malaise général…
Evolution politique en dents de scie
On a à peine vu et entendu les opposants au régime réunis au siège du parti Al-Joumhouri à Tunis. On a eu droit à quelques images de manifestations dans les artères de la capitale contre le régime mis en place le 25 juillet 2021 par le président Saïed, qualifié d’autoritaire. Mais on n’a à aucun moment senti, de la part des producteurs, une volonté de nuire à la Tunisie ou de porter atteinte aux excellentes relations entre notre pays et la France, comme l’a déclaré, très maladroitement du reste, le Premier ministre Ahmed Hachani, lors de la conférence de presse qu’il a donnée avec son homologue français Gérard Darmanin lors de sa première visite officielle à Paris, la semaine écoulée.
Le fait que cette émission ait consacré un programme de fin de soirée à la situation en Tunisie n’a rien de saugrenu, d’exceptionnel ou de choquant. C’est un travail journalistique banal. Car il est normal que notre pays, dont l’évolution politique en dents de scie interpelle l’opinion internationale, suscite des interrogations et appelle des explications.
Aussi et au lieu de crier au complot et de nous en prendre aux autres, nous ferions mieux de nous regarder en face et d’interroger nos tares, nos déboires et nos ratés, sans complaisance ni autojustification, pour nous corriger et nous remettre sur les rails du progrès et de la prospérité.
Sortir du trou où nous nous sommes fourrés
Disons-nous, une fois pour toute, qu’il n’y a pas pire ennemi que nous-mêmes lorsque nous ratons tout ce que nous faisons et que nous nous mettons à guerroyer contre des moulins à vent, au lieu de retrousser nos manches et de nous remettre au travail. Il est vraiment temps, et cela, personne ne le fera à notre place.
Nous devons aussi à la vérité de reconnaître que sans l’aide de nos partenaires internationaux, l’Union européenne en tête, sous formes de dons, de prêts ou d’assistance technique, notre situation serait encore plus désastreuse qu’elle n’a été montrée dans l’émission de M6, avec ces interminables queues devant les magasins pour acheter du sucre ou du pain.
Tout cela pour dire que l’intérêt national nous recommande de garder nos amis et, surtout, de ne pas perdre ceux d’entre eux qui sont encore prêts à nous aider à sortir du trou où nous nous sommes fourrés par notre irresponsabilité et notre gabegie.
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