L’affaire du Palestinien Mahmoud Khalil secoue les États-Unis

La décision d’expulser le citoyen palestinien Mahmoud Khalil des États-Unis par l’administration Trump soulève un énorme tollé car à travers l’arbitraire auquel est confronté le jeune homme, c’est la liberté d’expression garantie par le Premier amendement de la Constitution américaine qui est menacé. Il est illégal d’expulser une personne en situation régulière, détentrice de la fameuse green card (carte verte), qui plus est, sans avoir commis aucun crime. L’administration Trump accuse le Palestinien de faire l’apologie du Hamas mais n’a fourni jusque-là aucune preuve. 

Imed Bahri

Le Washington Post a consacré son éditorial au cas du Palestinien Mahmoud Khalil qui constitue un précédent grave menaçant le Premier amendement de la Constitution américaine qui garantit la liberté d’expression. Puisque Trump veut expulser le jeune homme résidant légalement aux États-Unis en raison de ses positions. 

Mahmoud Khalil, titulaire d’une green card et étudiant soutenant la cause palestinienne a été arrêté samedi par les services de l’immigration et des douanes pour des déclarations qu’il a faites et non pour quelque acte criminel. «Si Donald Trump parvient à l’expulser, comme il le souhaite, le risque est que les résidents légaux et peut-être les citoyens américains soient punis pour avoir exercé leurs libertés garanties par le Premier amendement», écrit le comité éditorial du WP

Khalil, un Palestinien de 30 ans qui a grandi en Syrie, est arrivé aux États-Unis avec un visa étudiant en 2022 pour poursuivre un master en administration publique à l’Université de Columbia à New York. Il est devenu un leader important du mouvement pro-palestinien et anti-guerre sur le campus provoquant la colère des militants pro-israéliens dont certains ont appelé à son expulsion la semaine dernière.

Première d’une longue série d’arrestations à venir

Lundi, Trump, qui a fait campagne contre les manifestations universitaires comme celles qui ont secoué l’Université de Columbia au printemps dernier, s’est vanté de l’arrestation de Khalil avertissant sur Truth Social que c’est la première d’une longue série d’arrestations à venir.

Le journal américain a ajouté que Khalil n’a été accusé d’aucun crime et qu’il n’existe aucune preuve suggérant qu’il soit lié au terrorisme cependant il se trouve dans une cellule de prison parce que le secrétaire d’État Marco Rubio, selon les documents judiciaires, a estimé que «la présence de Khalil sur le sol américain aurait de graves répercussions sur la politique étrangère des États-Unis». Rubio n’a pas révélé comment il avait pris cette décision ni précisé la nature de la menace que Khalil représentait s’il restait aux États-Unis. 

Interrogé mercredi, Rubio n’a accusé Khalil d’aucun crime précis mais a éludé la question du Premier Amendement en déclarant: «Cela n’a rien à voir avec la liberté d’expression». Il a ensuite décrit la nature des manifestations organisées par Khalil que le tribunal a pourtant considérées comme des formes d’expression protégées: «Vous payez tout cet argent pour des frais de scolarité universitaires pour des études qui sont censées être prestigieuses mais vous ne pouvez pas aller en cours et vous avez peur d’y aller parce que ces fous se promènent avec le visage couvert et crient des choses horribles. Si vous nous aviez dit que vous aviez l’intention de faire cela à votre arrivée en Amérique, nous vous aurions arrêté et si vous aviez fait cela en entrant, nous vous aurions expulsé».

La veille, la porte-parole de la Maison Blanche, Caroline Levitt avait déclaré que Khalil avait relayé de la «propagande pro-Hamas» lors de rassemblements et distribué des «tracts portant le logo du Hamas» bien qu’elle n’ait fourni aucun document pour étayer ces dires.

Avant d’achever ses études en décembre, l’Université de Columbia a sanctionné Khalil pour sa potentielle participation à un «rassemblement non autorisé» célébrant l’opération Déluge d’Al-Aqsa du 7 octobre 2023 menée par le Hamas. Ses détracteurs affirment que ses publications sur les réseaux sociaux concernant le sionisme sont antisémites. Cependant, ses soutiens rejettent cette accusation affirmant qu’il défend les droits humains des Palestiniens.

À l’intérieur du trou noir

L’éditorial du WP  note: «Quelle que soit la description de ce qu’il a dit, cela reste un discours mais rien dans ce cas ne semble normal. Khalil a été emmené dans un centre d’immigration du New Jersey puis rapidement transporté à 1 300 miles jusqu’au centre de détention de LaSalle près de Jena en Louisiane, un établissement qui a une très mauvaise réputation répertorié par l’American Civil Liberties Union dans une enquête de 2024 sur le système de détention des immigrants intitulée Inside the Black Hole (À l’intérieur du trou noir, Ndlr)». 

Les autorités de l’immigration peuvent y transférer des détenus mais elles n’ont pas expliqué la décision de l’éloigner de sa famille et de son avocat. Lors d’une audience de procédure à New York mercredi, un juge a décidé que les autorités pouvaient le garder en Louisiane. L’un des avocats de Khalil a déclaré qu’ils n’avaient pas pu joindre leur client depuis son arrestation.

Le journal américain note que si le gouvernement poursuit la procédure judiciaire et que l’équipe juridique dépose un appel, l’affaire sera portée devant la Cour d’appel des États-Unis pour la cinquième circonscription située dans la Nouvelle-Orléans, une cour pro-Trump que les défenseurs de l’immigration ont surnommée le «pipeline anti-immigration». Si c’était à New York, l’appel aurait lieu devant la Cour d’appel pour la deuxième circonscription réputée plus libérale.

Malgré le tollé médiatique entourant l’affaire, le gouvernement est resté vague sur ses détails. Bien que les procédures d’immigration ne soient pas publiques comme les affaires civiles ou pénales, l’administration Trump prévoit d’utiliser Khalil comme modèle pour les futures expulsions.

Le comité éditorial du WP estime que public a le droit de savoir ce que prévoit l’administration et si le secrétaire d’État peut expulser un résident légal simplement parce qu’il n’apprécie pas son opinion sur un sujet déterminé? Et qui sera le prochain à perdre ses droits qui sont normalement garantis par le Premier amendement?

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