Ce n’est qu’avec une mémoire apaisée que Français et Tunisiens pourront enfin oublier les douleurs du passé et construire ensemble un avenir commun.
Par Moncef Kamoun *
Le président français Emmanuel Macron, en visite d’Etat en Tunisie, depuis hier, mercredi 31 janvier 2018, a prononcé, aujourd’hui, un discours devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), réunie en session plénière extraordinaire. Le discours a été assez convenu, consacré principalement sur la relance de la coopération entre la France et la Tunisie, notamment dans les domaines économique, social, culturel et de la lutte antiterroriste, surtout que la Tunisie, qui a 450 km de frontières avec la Libye, est située en première ligne de cette lutte au sud de la Méditerranée.
Aussitôt après avoir prononcé son discours sous la coupole du Bardo, le président français a co-présidé, avec le chef du gouvernement Youssef Chahed, au Palais des Congrès à Tunis, le Forum économique tuniso-français sur le thème : «Réussir ensemble aujourd’hui et demain», qui, au-delà du slogan, a valeur de programme.
La lettre ouverte, ci-dessous, est celle d’un citoyen tunisien au président de l’une des principales puissances mondiales.
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Monsieur le président, vous avez déjà le mérite d’avoir dit que la colonisation a entraîné la négation des peuples colonisés et que cela a produit des guerres qui n’étaient pas dignes d’un pays comme la France, laquelle doit aujourd’hui assumer ses responsabilités.
C’était à Alger, en février 2017, à la veille de votre campagne électorale.
Monsieur le président, le pays frère que vous visitez aujourd’hui a été pendant 75 ans sous la colonisation de la république que vous représentez, et qui a réprimé les combats et les révoltes de plusieurs générations de Tunisiens, combats et révoltes que nous n’avons jamais oubliés et que nous célébrons encore chaque année.
Macron reçu par Caïd Essebsi au palais de Carthage, mercredi 31 janvier 2017.
Pour faire la paix avec le passé, la république française doit, monsieur le président, tendre la main à la Tunisie, rétablir toute la vérité sur la période coloniale et, surtout, permettre l’accès aux archives de la république française. Ce n’est qu’ainsi seulement que l’on pourra rendre justice à toutes les victimes de la répression et leurs familles et éclairer les zones d’ombre qui demeurent encore dans notre histoire commune, une histoire encore tronquée et qui n’aide pas à refermer les cicatrices et à soulager les souffrances des Tunisiens, dont beaucoup ont perdu des êtres chers lors de la lutte nationale.
Monsieur le président, votre première visite en Tunisie en tant que chef de l’Etat français aurait pu (ou dû) constituer une occasion pour assumer cette responsabilité historique au nom de tous vos compatriotes et prendre ainsi rendez-vous avec l’histoire, car ce n’est qu’avec une mémoire apaisée que l’on peut oublier les douleurs du passé pour construire ensemble un avenir commun.
* MK Architecte.
Tunisie-France : Une coopération bilatérale à «réinitialiser» !
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