L’Union européenne (UE) restera pour 20 ou 30 ans encore le premier marché pour la Tunisie, et pour peu qu’elle rétablisse l’Etat de droit, l’autorité de la loi et la sécurité des systèmes productifs et logistiques, la Tunisie pourrait, d’ici 2025, doubler ses exportations vers les pays européens.
Par Khémaies Krimi
L’événement en matière de partenariat économique a été créé par la tenue des assemblées générales annuelles de deux grandes chambres mixtes, la Chambre tuniso-allemande (AHK, 3 mai 2018) et la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (CTFCI, 10 mai 2018).
Au cours de ces deux réunions, l’accent a été mis sur la balance commerciale excédentaire en faveur de la Tunisie avec l’Allemagne et la France, sur l’augmentation des flux d’investissement direct en Tunisie et sur les perspectives qu’offre un éventuel raffermissement des relations tuniso-européennes, et ce, à la lumière d’une étude présentée lors de ces deux assemblées par Afif Chelbi, président du Conseil des analyses économiques (CEA).
Brahim Debache.
Des balances commerciales excédentaires en faveur de la Tunisie
En ce qui concerne l’Allemagne, en 2017, les échanges commerciaux avec la Tunisie ont atteint 10 milliards de dinars tunisiens (3,35 milliards d’euros), en augmentation de 11% par rapport à 2016, sachant que les exportations tunisiennes vers ce pays excédent les importations de 538 millions de dinars (180 millions d’euros).
S’agissant de l’investissement off-shore allemand, Ibrahim Debache, président de l’AHK, a tenu à signaler que «depuis 2011, aucune entreprise allemande n’a quitté la Tunisie». C’est de toute évidence un signe de confiance dans le site Tunisie.
Pour sa part, Andreas Reinicke, ambassadeur d’Allemagne en Tunisie, a déclaré que son pays soutient actuellement la Tunisie dans divers projets pour un montant global de 4,5 milliards de dinars (1,5 milliard d’euros).
Avec la France, les échanges commerciaux tunisiens ont atteint, en 2017, 18,3 milliards de dinars (6,3 milliards d’euros) dégageant un solde commercial positif pour la Tunisie de 3 milliards de dinars environ (1 milliard d’euros).
La France demeure ainsi le premier partenaire économique de la Tunisie : premier investisseur hors énergie, deuxième fournisseur (avec une part de marché de 16%), premier client et premier bailleur de fonds sur le plan bilatéral.
Fouad Lakhoua.
Concernant l’investissement off-shore français, la CFTCI met en avant les flux d’IDE de la France vers la Tunisie en 2017 qui la placent en première position avant l’Italie, l’Allemagne et le Qatar. En termes de valeurs, le flux des IDE français s’est élevé à 585,1MDT (200 M€) soit près de 45% du total des IDE hors énergie.
Le nombre de projets français réalisés en 2017 a atteint 193, dont 353 en création ayant généré 666 nouveaux emplois et 158 en extension favorisant la création de 2144 emplois.
Commentant ces indicateurs, Foued Lakhoua, président de la CFTCI, a déclaré que «l’apparition de signaux de reprise de l’activité économique en Tunisie, de restauration de la confiance des opérateurs et du renforcement du partenariat tuniso-français impliquent plus que jamais de réfléchir sur les meilleurs moyens pour accélérer ce trend et lui conférer un caractère pérenne».
Renforcement de l’intégration de la Tunisie dans l’Euroméditerranée
Dans cette perspective, Afif Chelbi a présenté, lors des deux assemblées annuelles, les résultats d’une étude effectuée par le Conseil des analyses économiques (CEA) qu’il préside sur «les préalables à la relance de l’économie tunisienne».
Cette étude plaide, sans ambages et sans réserve, pour un renforcement des relations avec l’Union européenne (UE) et pour l’intégration de la Tunisie dans son environnement euroméditerranéen.
À ce sujet, il esquisse un scénario des plus idylliques. Ainsi, selon cette étude, la Tunisie pourrait, peu qu’elle réunisse certaines stabilités (politique, sociale, fiscale, juridique et monétaire), doubler, d’ici 2025, ses exportations vers l’UE pour les porter de 9 milliards d’euros (27 milliards de dinars) actuellement à 16 milliards d’euros en 2025 (48 milliards de dinars).
Afif Chelbi.
Afif Chelbi a ajouté que l’Europe restera pour 20 ou 30 ans encore le premier marché pour la Tunisie, notamment pour les secteurs mécanique et électrique.
Pour le président du CEA, l’Accord de libre-échange conclu en 1995 avec l’UE a été une réussite totale, citant les chiffres d’Eurostat (organisme européen chargé de l’information statistique) selon lesquels les exportations tunisiennes vers l’Europe sont passées de 2 à 9 milliards d’euros (de 6 à 27 milliards de dinars).
«À travers le futur Accord de libre échange complet et approfondi (Aleca), la Tunisie, qui n’est qu’à une heure de vol de l’Europe, aspire à un statut semblable à celui de la Norvège, à condition d’avoir une libération progressive et différenciée selon les secteurs», a-t-il dit. Et d’ajouter : «Si on est dans l’Aleca, on est dans l’Union européenne».
En prévision du renforcement de cet arrimage avec l’Europe, l’étude recommande aux Tunisiens de réunir certains pré-requis : rétablir l’autorité de l’Etat de droit, en assurant la sécurité des systèmes productifs et logistiques, en veillant au strict respect des lois et des réglementations et en garantissant le fonctionnement normal des institutions, et ce dans l’ultime objectif de rétablir la confiance, préalable clé à toute relance. Le message est des plus clairs.
Relations commerciales : La Tunisie s’émancipe-t-elle de l’Union européenne ?
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