Par son entêtement farouche à refuser le système du «tawafoq» (consensus) imposé par Ennahdha et ses alliés, Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL), est devenue la femme à abattre par les idiots utiles de l’ensemble de la classe politique tunisienne.
Par Lotfi Maherzi *
Abir Moussi et ses partisans ont été violemment pris à partie récemment par des islamistes ou assimilés à Sidi Bouzid. Son parti est régulièrement victime de la vindicte de toute la classe politique, multipliant les injures, les menaces et les insultes sexistes dans une société où le fait d’être femme n’est pas toujours un avantage.
Une véritable chasse aux sorcières amplifiée par la caisse de résonance de nombreux médias qui la présentent comme le symbole de l’ancien régime tout en oubliant le nombre d’ancien RCD reconvertis en démocrates et sollicités par tous les gouvernements successifs, la plupart des partis politique dont Nidaa et Ennahdha et dans la haute fonction publique et diplomatique. Ceux-là, on les tolère pour leur cagnotte généreuse, leur réseau de mobilisation et leur capacité de nuisance.
La voix des Tunisiens lassés par une cohabitation calamiteuse
Alors pourquoi Abir Moussi est devenue la femme à abattre par les idiots utiles de l’ensemble de la classe politique ?
D’abord parce qu’elle est la seule personnalité politique qui refuse de baisser la tête devant le système du «tawafoq» (consensus) fabriqué par les islamistes et consenti par l’ensemble des gouvernements successifs qui par électoralisme, lâcheté ou confort calculé, ont pactisé avec l’islam politique et sa mouvance Ennahdha. Abir Moussi est la seule à refuser de céder à ce simulacre politique et ses trahisons multiples.
Elle s’y emploie sans faiblesse, avec l’accord visible de plus en plus de Tunisiens, lassés de cet excès de cohabitation calamiteuse mais heureuse pour Ennahdha. Car tous gardent en mémoire ces écoles de l’enfer wahhabite, les assassinats politiques, l’affaire de l’organisation secrète et sa chambre noire, les cas graves de noyautage du ministère de l’Intérieur et l’entrisme discret et tentaculaire dans les entreprises publiques et les organes de l’Etat.
Puis cette femme démontre, contrairement à la médiocrité de ses adversaires au pouvoir, de réels traits de caractère d’un leader avec une volonté déterminée, intransigeante et peu enclin aux compromissions avec l’islam politique. Avec aussi cette certitude, d’avoir raison contre les voleurs du printemps tunisien qui feignent à jouer la démocratie mais pour mieux la confisquer. Dès lors, elle devient pour ces tricheurs une menace à ne pas négliger et doit, par conséquent, être mise hors jeu coûte que coûte même s’il fallait avoir recours à des méthodes bien plus violentes.
De plus, Abir Moussi est peut-être la seule à avoir un programme construit qui comporte des idées simples, claires et réalisables : revaloriser le travail, améliorer les infrastructures, développer l’agriculture, mobiliser les ressources hydrauliques, soutenir les industries de transformation et investir dans une politique solidaire avec les plus pauvres.
Comme elle est peut-être la seule à s’engager à changer une constitution et un code électorale, imposé par Ennahdha et quelques juristes égarés, qui consacrent un système partisan mortifère conduisant à l’impuissance de l’action politique.
Une voix qui n’entre pas en résonance avec la pensée unique
Enfin, Abir Moussi est la seule avec le Front populaire à dénoncer les réformes imposées par le FMI favorisant entre autre un détricotage des acquis sociaux et le démantèlement des services publics. Un combat à mener sur tous les fronts mais qui ne peut être gagné sans l’appui de l’ensemble des Tunisiens dont nombreux ne se retrouvent pas dans son refus de dépénaliser l’homosexualité ou de valider l’égalité dans l’héritage. Deux points sombres qui paradoxalement la rapproche du conservatisme moral des islamistes et l’éloignent des jeunes générations tunisiennes sensibilisées à la tolérance et au respect de la différence.
De toutes les façons, qu’on aime ou pas le personnage parfois complexe, Abir Moussi fait partie de ces leaders qui frappent les esprits et force le respect et dont la voix n’entre pas en résonance avec la pensée unique du moment : le consensus et son statut quo devenu un mal gouvernance fait de petits arrangements, de copinage et de magouilles discrètes, générant l’une des corruptions la plus active dans la région et un pays gangrené par l’argent et la mafia politico-financière.
L’on comprend pourquoi, pour de nombreux tunisiens Abir Moussi est aujourd’hui la seule personnalité qui leur donne de l’espoir et leur promet un entêtement farouche pour enrayer l’inéluctable déclin de la Tunisie. Elle est d’ailleurs de plus en plus populaire avec des chances électorales confirmées par les sondages qui la replacent pleinement dans le jeu politique.
C’est pour cela qu’elle est devenue cette femme à abattre par des adversaires qui multiplient haines et injures, signes révélateurs qui montrent qu’elle est passée d’une personnalité politique d’opposition à une personnalité politique aspirant à gouverner.
* Professeur des universités.
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