Dans une déclaration accordée à l’émission «La Matinale», à la radio Shems FM, ce matin, 12 septembre 2019, la candidate à la présidentielle du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, a – une fois de plus – affiché son opposition à certaines libertés individuelles, dont celle de l’orientation sexuelle.
Par Cherif Ben Younès
Interrogée par l’animateur Hamza Belloumi sur sa position concernant la consolidation des libertés individuelles en Tunisie, Mme Moussi s’est lancée dans un long discours, à travers lequel, elle a essayé de rassurer les électeurs quant à son intention de conserver les acquis relatifs aux droits et libertés.
Toutefois, elle s’est montrée très réticente lorsque M. Belloumi a évoqué le sujet des libertés sexuelles, qui sont particulièrement bafouées en Tunisie, malgré «la révolution de la liberté» de 2011… Clairement tendue, l’ex-RCDiste réplique : «Ta liberté s’arrête là où commence celle des autres. Ça c’est connu !».
Moussi n’a pas de problème avec le test anal… ordonné par un juge
Mais l’animateur, qui n’avait pas l’intention de s’en contenter, a poussé un peu plus loin le débat. Et, histoire d’être concret, il lui rappelle que certaines lois tunisiennes criminalisent l’homosexualité.
«La question de l’homosexualité est claire pour nous. Il y a une différence entre la liberté sexuelle et l’homosexualité. On ne va pas toucher au principe de la criminalisation de l’homosexualité. Mais en contrepartie, on ne va pas légitimer la violation de l’intégrité physique des gens», a répondu Mme Moussi.
On a cru, pendant quelques secondes, que la candidate a l’intention d’abolir le test anal, ce qui serait un pas progressiste acceptable, à défaut d’avoir le courage d’accepter de donner aux citoyens tous leurs droits relatifs à la liberté sexuelle. Une liberté qui englobe, n’en déplaise à Mme Moussi, celle de choisir l’orientation sexuelle et de la pratiquer librement.
Mais détrompez-vous ! Contrairement à ce qu’elle prétend, Mme Moussi n’a même pas de problème avec la violation de l’intégrité physique des gens, en vue de déterminer s’ils ont eu ou pas des rapports sexuels anaux. Elle aimerait simplement que les choses soient mieux organisées: «Concernant le recours au test anal, il ne doit avoir lieu qu’à la suite d’une autorisation judiciaire.»
La dépénalisation de l’homosexualité affecterait le modèle familial tunisien tel que défini dans le Code du statut personnel, selon Abir Moussi, qui craint, le cas échéant, d’autres revendications, telles que le mariage des homosexuels.
L’avocate a, par ailleurs, réitéré son opposition à l’égalité successorale entre les deux sexes, telle qu’elle figure dans le projet de loi proposé par le défunt président de la république Béji Caïd Essebsi, suite à une recommandation de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe), et se montre ainsi, aussi conservatrice que le parti qu’elle accuse, jour et nuit, d’être anti-moderniste, à savoir Ennahdha.
Pour une nouvelle constitution à connotation présidentielle
Abir Moussi a, d’un autre côté, rappelé son intention de mettre en place
«une nouvelle constitution», dans le cadre d’une initiative législative conforme à l’article 143 de celle qui est actuellement en vigueur.
«Beaucoup de choses changeront dans la vie du simple citoyen [à l’issue de ce grand changement constitutionnel], parce que tout est lié. Aujourd’hui, le Tunisien souffre du désordre, de la détérioration de son pouvoir d’achat, de la médiocrité des institutions éducatives et sanitaires et de la fragilité de l’infrastructure. Les soldes financiers de l’Etat sont, de leur côté, ajourés, etc.», a-t-elle déploré.
Mme Moussi aspire à remédier à cette situation, en tant que présidente de la république, et compte à cet effet, donner à ce rôle les prérogatives nécessaires dans la constitution. Cela passerait donc forcément par un changement du régime politique pour qu’il devienne présidentiel.
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