Plusieurs centaines de personnes se sont réunies, le soir du jeudi 30 janvier 2020, à l’occasion de la Nuit des Idées, à l’Institut français de Tunisie (IFT), mais aussi dans différents espaces à Tunis et dans les régions. Placé cette année sous le thème «Être vivant», l’événement mondial a réuni des participants de différents horizons pour un dialogue interculturel le temps d’une soirée festive et créative.
Par Fawz Ben Ali
La Nuit des Idées arrive cette année à sa 5e édition mondiale et 4e édition tunisienne, un événement culturel, artistique et intellectuel lancé en 2016 à Paris, ayant depuis, conquis le monde.
Jeudi soir, près de 200 villes sur cinq continents ont célébré – de façon simultanée – cette Nuit des Idées, tous réunis autour d’un thème commun «Être vivant».
En Tunisie, l’événement a connu un succès retentissant depuis sa première édition en 2017. Trois ans après, il n’est plus célébré uniquement à l’IFT, mais s’organise aussi au Lycée Gustave Flaubert (La Marsa), à l’Ecole internationale de Carthage, à l’Université Esprit… ainsi qu’en dehors de la capitale, à Bizerte, à Sousse, à Sfax, au Kairouan et au Kef.
Retrouver un certain équilibre écologique
Ce soir-là, vers 18h, l’IFT a ouvert ses portes à un public venu très nombreux, entre fidèles, nouveaux adeptes et curieux, rassemblés le long d’une énorme file d’attente devant l’Institut qui avait transformé ses différents espaces en des lieux de fêtes et de rencontres à l’accès libre et gratuit.
«Être vivant c’est s’engager dans le tourbillon de la vie, c’est explorer tous les possibles spatiaux, scientifiques ou encore artistiques. C’est être ouvert au monde, attentif à son environnement, pour en découvrir les merveilles, mais aussi parfois les limites. Être vivant c’est résister et s’engager», disait la directrice de l’IFT Sophie Renaud, dans son allocution en ouverture de soirée.
En ces temps où la planète terre va de plus en plus mal, le thème «Être vivant» s’est imposé presque comme une évidence. Une inquiétude universelle est désormais partagée par l’ensemble des citoyens du monde face à une réalité anxiogène et un dérèglement climatique qui provoque chaque année de nouvelles catastrophes naturelles.
Être vivant en 2020 c’est donc agir en urgence pour retrouver un certain équilibre écologique, et le programme de cette soirée s’est ainsi orienté en grande partie vers une approche environnementale du thème. Des artistes, des chercheurs, des scientifiques… ont tenté d’apporter leurs constats, leurs savoirs et leurs solutions.
La couleur verte et le décor de la jungle ont habillé les murs de la galerie où le public était convié à plonger dans une réserve naturelle grâce à l’expérience numérique immersive Wild Immersion, un voyage de réalité virtuelle permettant d’admirer la biodiversité des espèces vivantes et de découvrir des animaux sauvages de très près.
L’auditorium a également accueilli une projection inédite du film choc ‘‘A plastic ocean’’, un documentaire britannique signé Craig Leeson et Jo Ruxton ayant fait le tour du monde pour capter des images complètement inédites sur l’état actuel des océans, désormais dévastés par le plastique, et les conséquences irréversibles sur notre santé et sur l’écosystème en général.
C’est d’ailleurs dans ce sens que le directeur du Laboratoire mixte international Cosys-Med Moncef Boukthir est venu parler des dégâts énormes liés aux déchets plastiques, notamment dans la Méditerranée qui se retrouve aujourd’hui dans un état de pollution extrême. Une réalité à laquelle il essaie de remédier avec une équipe de chercheurs tunisiens et français qui étudient l’interaction des contaminants (polluants) avec l’écosystème marin, notamment au golfe de Gabès qui connaît une forte pollution des eaux et une diminution alarmante de la biodiversité. «Avec le changement climatique, certaines îles vont disparaître d’ici une vingtaine d’années et pas mal d’espèces sont déjà en train de disparaître», a averti M. Boukthir.
Les avancées scientifiques au service du vivant
Être vivant c’est aussi pousser les limites du savoir et explorer l’infini ; c’est faire que les avancées scientifiques et technologiques soient au service du vivant.
La nuit des idées était donc aussi l’occasion de rendre hommage à deux fiertés nationales ayant honoré l’image de la Tunisie à l’échelle internationale dans les domaines de la physique et de la médecine : le jeune chercheur Wassim Dhaouadi qui avait réussi à résoudre une énigme vieille d’un siècle et le professeur hospitalo-universitaire Mahmoud Smida qui avait reçu le prix de la meilleure recherche au monde en orthopédie pédiatrique.
De son côté, le directeur du Centre de recherche en microélectronique et nanotechnologie de Sousse Kamel Besbes a évoqué les nouvelles technologies qui permettent à partir de l’espace de mieux observer la terre afin de mieux contenir ses maux, comme les nouvelles applications de télémétrie capables de mesurer la qualité de l’eau et de l’air dans les villes, pour offrir une meilleure qualité de vie aux citoyens. «En Tunisie, nous avons des projets de nano satellites, notamment au Centre de recherche de Sousse», a annoncé M. Besbes.
Les arts et les lettres étaient aussi évidemment au rendez-vous comme chaque année. L’artiste visuelle Hela Lamine, l’humoriste et acteur Nidhal Saadi et le groupe de reggae tunisien Gultrah Sound System ont animé la cour centrale, et la salle de l’auditorium a accueilli une lecture musicale offerte par l’écrivain français Arthur H à l’occasion de la parution de son premier roman ‘‘Fugues’’, accompagné par le musicien Nicolas Repac à la guitare acoustique, mais aussi par l’écrivaine Colette Fellous, qui a édité et intégré ce livre dans sa collection ‘‘Traits et portraits’’. Le livre dresse les deux portraits de l’auteur et de sa mère, ayant tous les deux fugué à leur jeune âge, poussés par une quête de vie et de liberté, un texte qui ne peut que correspondre parfaitement au thème «Être vivant».
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