«Le gouvernement a envoyé une correspondance à l’Assemblée pour demander le report de la plénière consacrée à l’examen des 2 projets de loi sur des accords avec le Qatar et la Turquie. La pression que nous avons exercée a porté ses fruits et la plénière a été reportée», a annoncé la députée Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL), qui avait saisi, hier, la justice pour faire suspendre l’examen de ces projets de loi controversés.
Dans une vidéo publiée cet après-midi, mardi 28 avril 2020, la députée PDL, a remercié tous ceux qui ont soutenu sa démarche en assurant que ce premier pas est positif mais insuffisant et qu’il faut faire annuler ces projets de loi, une bonne fois pour toute, «pour préserver la souveraineté de la Tunisie, et empêcher la Turquie et le Qatar d’exercer une mainmise sur l’économie nationale, avec la complicité des Frères musulmans», dans une allusion limpide au parti islamiste Ennahdha, représentant des intérêts du Qatar et de la Turquie en Tunisie.
Ces deux pays, rappelons-le, ont une très mauvaise presse en Tunisie pour leur soutien actif au mouvement international des Frères musulmans, dont Ennahdha est membre, et pour les mouvements islamistes en général, y compris armés, à travers le monde.
«Ils ne sont même pas d’accord entre eux. Ceux qui allaient voter pour ce projet craignaient d’être aperçus comme des traîtres. Et le président de l’Assemblée avait, quant à lui, plutôt peur pour ses relations avec le Qatar et la Turquie. Ils ont finalement décidé de voter pour le report mais ils reviendront probablement à la charge», a ajouté Abir Moussi, en assurant qu’elle va envoyer une correspondance à la présidence du gouvernement pour demander l’annulation définitive et officielle de ces projets de loi.
Abir Moussi a également, à nouveau appelé au retrait de confiance au président de l’Assemblée, Rached Ghannouchi : «Soyez clairs dans vos positions, faites comme le PDL, et ayez une seule ligne. Sachez prendre des décisions fermes et retirez la confiance à Rached Ghannouchi, vous voyez bien ce qu’il veut faire du pays», a-t-elle dit, dans ce qui ressemble à un défi lancé aux autres partis progressistes et centristes, qui maintiennent des relations fortes avec le parti Ennahdha, tels Qalb Tounes et Tahya Tounes.
Mme Moussi, qui vient de remporter une bataille et de gagner en crédibilité aux yeux de l’opinion, apparaissant comme l’unique leader politique en Tunisie aux positions claires et tranchées, a ajouté, toujours en s’adressant aux autres partis politiques: «L’État Tunisien est un état de droit, soyez droits dans vos bottes au lieu de vous tenir à l’écart et de n’apparaître que si l’affaire prend de l’ampleur. Nous sommes ouverts pour un front démocrate et nous tendons la main à tous ceux qui veulent sauver le pays, mais ils faut un vrai engagement».
Il est évident que ce front démocrate anti-Ennahdha, que Mme Moussi appelle de tous ses vœux, ne saurait être dirigé que par… elle. Et cette stature d’opposante irréductible, personne dans la scène politique tunisienne ne peut désormais lui disputer, tant les dirigeants des autres partis se sont compromis dans des deals pas toujours nets avec les islamistes. Pour Mme Moussi, la voie pour les élections de 2024 est déjà bien balisée…
Yüsra Nemlaghi
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