La sortie médiatique de Abdelkarim Harouni, président du conseil de la Choura au sein d’Ennahdha, ce lundi 26 octobre 2020, sur Mosaïque FM, a prouvé à ceux qui en doutaient encore, que le président du parti, Rached Ghannouchi jouit d’un statut quasi-prophétique au sein du mouvement islamiste.
Par Cherif Ben Younès
Quoi de mieux pour l’expliquer aux médias, ainsi qu’aux «rebelles du parti» (qui ont récemment adressé une lettre à Ghannouchi pour l’appeler à ne pas se présenter pour une nouvelle mandature à la tête du parti), que d’affirmer, sans la moindre gêne, qu’«il est anormal d’appliquer la loi à la lettre» au fondateur du parti.
Celle-là, même les adeptes de certains régimes autocrates n’oseraient pas la sortir. Une affirmation qui montre que si en 1987, Ennahdha et Ghannouchi s’étaient emparés du pouvoir, plutôt que Ben Ali, l’issue du pays, en termes de dictature, aurait été la même.
«Ce n’est pas un directeur que nous souhaitons changer. Il s’agit du fondateur du parti. C’est un homme d’Etat avec 50 ans de militantisme derrière lui. Il faut donc prendre ça en considération», s’est justifié Harouni, estimant que que le 11e congrès du parti, qui connaîtra l’élection d’un nouveau président, est un évènement national d’envergure «qu’on ne peut réduire à un simple article dans le règlement intérieur du parti». Traduire : la loi est là uniquement pour la forme.
Harouni propose, avec le beau-fils de Ghannouchi, Rafik Abdessalem, une solution prétendument intermédiaire, qui répond, d’une part, favorablement à la demande du “groupe des 100” en élisant un nouveau président lors du prochain congrès, et qui permet, d’autre part, au président actuel de garder un statut privilégié au sein du mouvement, celui du «leader», lui permettant notamment de se présenter à l’élection présidentielle en 2024, lorsqu’il aura… 83 ans.
Et ce n’est pas tout, puisque Harouni et Abdessalem proposent également de reporter le congrès, programmé pour cette année, d’un an et demi ou deux ans, tout en gardant, bien entendu, Rached Ghannouchi à la tête d’Ennahdha, et ce, pour la 29e et la 30e année consécutive !
Bref, difficile d’être plus hypocrite quand on prétend être neutre et avoir une solution conciliatrice.
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