La 5e édition de la Nuit des Idées dans sa version tunisienne, organisée par l’Institut Français de Tunisie (IFT), a eu lieu hier, jeudi 28 janvier 2021, dans une version digitale, avec un programme éclectique autour du thème « Si loin, si proche ».
Par Fawz Benali
La Nuit des Idées fête cette année sa 6e édition mondiale et sa 5e édition tunisienne. Un événement francophone interculturel organisé par les différents Instituts Français à travers le monde pour célébrer le dialogue, le libre échange des idées et l’art dans toutes ses formes.
Continuer à échanger, malgré tout
Placée cette année sous le thème « Si loin, si proche », inspiré du titre du film allemand éponyme de Wim Wenders (sorti en 1993), cette édition a représenté un vrai défi afin de continuer à échanger et à diffuser malgré toutes les mesures de restriction et de distanciation imposées par la pandémie du Coronavirus (Covid-19), et ce par le biais des réseaux sociaux qui ont permis d’offrir au public un programme riche et un contenu de qualité.
« Cette Nuit des idées nous conduit à réfléchir quelques moments aux modalités nouvelles entre présentiel et distanciel, entre présence physique, éloignement social et intimité, nouveaux territoires de la culture à l’épreuve du temps », indique la directrice de l’IFT Sophie Renaud, dans son mot de bienvenue.
Cette 5e édition tunisienne de la Nuit des idées coïncide avec le 10e anniversaire de la révolution du 14 janvier 2011 ; l’occasion d’organiser une table ronde en partenariat avec l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC), autour du thème « Esprit de la révolte es-tu là ? 10 ans et toujours vivant », en partant des dessins satiriques de la dessinatrice tunisienne Nadia Khiari, qui vient d’ailleurs de publier « Willis from Tunis : 10 ans et toujours vivant », aux éditions Elyzard.
A travers ce recueil de 10 années de dessins de presse, Nadia Khiari a souhaité montrer l’enchainement des événements qui ont conduit à la situation actuelle en Tunisie. « Il s’agit d’aborder une réalité violente d’une manière décalée, (…) La situation est insupportable et j’essaie de la rendre un peu plus supportable avec mes dessins », explique-t-elle.
Des projets artistiques inédits pour réinventer l’espace
Une autre table ronde a également eu lieu hier à l’IFT dans le cadre de la Nuit des idées, portant sur le thème « la reconquête de l’espace artistique : Art, territoire et formes hybrides », une question plus que jamais d’actualité en ces temps de pandémie, avec toutes ces restrictions sociales qui continuent d’empêcher un grand nombre d’événements, d’activités et de festivals artistiques et culturels d’avoir lieu un peu partout dans le monde. La culture est en effet l’un des secteurs ayant le plus souffert de la distanciation sociale, du confinement et du couvre-feu, ce qui a conduit beaucoup d’artistes, d’institutions et d’acteurs culturels à réinventer et à improviser de nouveaux moyens et de nouveaux espaces pour préserver le lien avec le public.
Jan Goossens (directeur artistique de la biennale Dream City), Selim Ben Safia (directeur artistique du festival Hors-Lits Tunisie), Aymen Gharbi et Mouna Jmal Siala (du Festival Interférences) ont été invités à cette table ronde pour évoquer leurs expériences artistiques inédites qu’ils avaient entamées bien avant la pandémie et qui ont permis de se réapproprier l’espace public et d’investir de nouveaux lieux et de nouveaux supports de diffusion.
Le festival Hors-Lits, né à Montpellier en 2005, est aujourd’hui présent dans 30 villes à travers le monde et dans 15 gouvernorats en Tunisie, une manifestation innovatrice qui permet en effet plus de proximité entre artistes et citoyens. « C’est un format contestataire de création pour dire qu’on est autonome et qu’on peut se réapproprier l’espace privé, sans attendre le soutien de l’Etat », souligne le directeur du festival Sélim Ben Safia.
Le Festival Interférences défend également cette idée de sortir des espaces conventionnels pour exploiter en l’occurrence l’espace urbain de la Médina de Tunis, en travaillant sur l’aspect architectural, qui devient matière à exposer des œuvres sonores et visuelles, toujours en impliquant la communauté locale.
« L’ADN de notre festival est d’être dans une aventure libre, et en permanence en échange avec un contexte », ajoute le directeur artistique de Dream City, qui admet le rôle important qu’a joué le digital durant cette période de confinement, à offrir de nouveaux champs de possibilités et toucher beaucoup de monde. Il a toutefois rappelé les dérives des espaces digitaux qui demeurent « des espaces de contrôle et de surveillance ».
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