Cet article est la traduction en français d’une réponse de l’auteur aux questions d’un journaliste pour le compte d’un média arabe au sujet de la diminution du nombre des visas accordés par la France aux ressortissants des pays du Maghreb : Maroc, Algérie et Tunisie.
Par Mohamed Cherif Ferjani *
La question migratoire est une question humaine avant d’être une question politique. Son traitement doit procéder du principe de l’universalité de l’humain et de ses droits, dont le droit à la libre circulation pour tous les humains, sans aucune autre considération, et par delà toutes sortes de frontières.
Cependant, tous les pays, sans aucune exception, ne l’envisagent que comme des chiffres d’une équation où l’humain et ses droits sont le dernier des soucis des décideurs.
Le paradoxe c’est que les réactions contre le non-respect des droits des migrants visent les États qui violent le moins ces droits, et sont souvent le fait de parties qui n’ont aucune considération pour les droits des migrants et des citoyens dans leurs pays.
Mesures populistes, électoralistes hostiles aux migrants
La France, à titre d’exemple, a fait l’objet de remontrances de la part du Commissaire européen pour les affaires intérieures la désignant comme le pays de la CE qui applique le moins les décisions de reconduite aux frontières : moins de 15% contre 30% pour l’ensemble des pays de la Communauté. En France, les taux d’application des décisions de conduite à la frontière, outre qu’ils sont inférieurs par rapport à l’ensemble de la communauté européenne, sont encre plus faibles pour les ressortissants des pays du Maghreb : 4% pour les Tunisiens, 2% pour les Marocains et 0,2% pour les Algériens, et ce en raison du refus des autorités consulaires des pays concernés d’accorder les laissez-passer pour le retour chez eux de leurs ressortissants contre lesquels de telles décisions sont prises.
C’est là, d’ailleurs, la raison qu’invoquent les autorités françaises pour expliquer leur décision de réduire de 50% le nombre de visas accordées aux Algériens et aux Marocains, et d’environ 30% aux Tunisiens. Faut-il pour autant accepter ces mesures inhumaines et contraires aux exigences du respect des droits humains? Loin de là ! Ce sont des mesures populistes, électoralistes hostiles aux migrants.
Développement de la xénophobie et de la violence dans le monde
Malheureusement, l’aggravation des crises économiques, sociales et politiques, et le développement de la xénophobie et de la violence, au Sud comme au Nord de la Méditerranée, et dans le reste du monde, seront des prétextes pour multiplier ce genre de mesures au détriment des migrants et de ceux qui fuient l’enfer de leur pays d’origine pour les affres des pays d’exil.
* Professeur honoraire de l’université de Lyon 2, France.
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