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Ces Britanniques qui continuent de venir en Tunisie

Matt-Sullivan

Matt Sullivan, son épouse et ses enfants visitant des vestiges archéologiques en Tunisie.

Des touristes britanniques expliquent à la BBC les raisons pour lesquelles ils continuent de visiter la Tunisie.

Compilation de Michael Ertl et traduction de l’anglais par Marwan Chahla

Les responsables tunisiens demandent au gouvernement de David Cameron d’assouplir sa décision d’interdire aux ressortissants britanniques le voyage en Tunisie, mesure prise au lendemain des deux attentats terroristes du Bardo et de Sousse, qui ont coûté la vie, l’an dernier, à 31 ressortissants du Royaume-Uni.

A la suite de cette interdiction du Foreign Office, les voyagistes et tour-opérateurs ont tout simplement déprogrammé la destination Tunisie et le nombre de visiteurs britanniques dans notre pays a accusé une chute vertigineuse de 90%: entre janvier et avril 2016, seulement 5 980 Britanniques ont visité la Tunisie contre 84.225 durant la même période en 2015. Et tant que cette interdiction de déplacement en Tunisie sera en vigueur, la plupart des polices d’assurance-voyage ne seront pas valables pour ceux d’entre les citoyens britanniques qui oseraient s’aventurer en terre tunisienne.

James-Merriman

James Merriman.

«Un pays tout à fait sûr»

Vendredi dernier, James Merriman est rentré d’un voyage de 4 jours en Tunisie. Durant son séjour, il s’est déplacé à travers le pays par ses propres moyens et, à aucun moment, il n’a éprouvé la moindre crainte. «Certes, il y avait des barrages de police en plusieurs endroits, mais je n’ai eu à aucun moment le sentiment d’être menacé et je n’avais nullement peur pour ma sécurité. Partout où je me suis rendu le manque de touristes était vraiment remarquable. Il y avait quelques touristes russes et un nombre encore moins important de Chinois, mais je n’ai pas eu l’occasion de croiser des ressortissants britanniques», a-t-il constaté.

«Ce qui m’a également frappé, lors de ce voyage, c’est l’attitude des Tunisiens eux-mêmes. Ces gens sont un véritable trésor pour leur pays, un véritable atout. Ils étaient contents de rencontrer un ressortissant britannique et ils n’avaient pas cessé de me présenter leurs excuses pour ce qui est arrivé l’année dernière. Sincèrement, je souhaite que le Foreign Office assouplisse sa mesure d’interdiction de voyage en Tunisie car, honnêtement, mon voyage a tout simplement été excellent et je recommanderais à toutes les personnes de tenter cette expérience et d’accorder à ce merveilleux pays une nouvelle chance», insiste James Merriman.

«Offrir la victoire aux terroristes»

Matt Sullivan, lui aussi citoyen du Royaume-Uni, s’est installé à Sousse depuis septembre 2015, avec son épouse et leurs trois enfants.
Il déclare que la crise que traverse l’industrie du tourisme en Tunisie a été un coup dur pour toute l’économie tunisienne. «Le fait est là: à cause de ce fléchissement de l’activité touristique, les populations locales souffrent énormément. La récession a touché tout le monde dans notre ville: chaque jour, je rencontre des gens qui ont perdu leurs emplois à cause de cela. Pourtant, face à ce désastre, les Tunisiens ne nourrissent aucune rancune envers le gouvernement britannique. Cependant, j’estime que leur colère est, dans une très large mesure, justifiée.

Enfants-de-Matt-Sullivan

Les enfants de Matt Merriman s’amusent bien dans quelque site archéologique en Tunisie. 

«Je sais que pour la majorité des touristes l’avertissement de voyage a fini par vouloir dire que les gens ne peuvent pas se déplacer en Tunisie. La plupart des personnes en sont venues à la conclusion qu’elles ne trouveront pas d’assureur pour couvrir leur voyage en Tunisie. Très rares sont les gens qui savent que, moyennant un petit effort de recherche et un petit peu de porte-à-porte, ils finiront par dénicher cette perle rare de l’assureur qui vous garantira votre séjour en Tunisie.

«Les touristes qui, malgré tout, font le déplacement me disent tous qu’ils se sentent en sécurité et qu’ils trouvent dans le pays toute l’attention dont ils ont besoin. La présence de la police a été remarquablement renforcée et les arrestations de terroristes ont été nombreuses depuis l’an dernier. Je vis avec ma famille en toute sécurité. Et il me semble vraiment que l’interdiction de voyage de notre gouvernement est trop sévère, disproportionnée à la menace terroriste en Tunisie et qu’elle n’aurait plus lieu d’être. Cette interdiction empêche les gens de venir en Tunisie, alors que ce dont ils ont besoin, en réalité, c’est de disposer d’une information juste sur ce qui se passe en Tunisie et de les laisser libres de faire leurs choix, en toute connaissance de cause. Autrement, nous ferions le jeu des terroristes et leur permettrions de gagner la partie. Car, en définitive, il s’agit d’un petit groupe d’individus qui sont en train de causer de très sérieux dégâts à l’économie de tout un pays. Et il me semble que les citoyens britanniques sont privés de leur droit de se prononcer clairement pour le soutien du peuple et contre les terroristes», insiste Matt Sullivan.

«Touchant»

Jane Dutton se rend régulièrement en Tunisie depuis une vingtaine d’années. Elle n’a jamais cessé de la faire, en dépit de l’interdiction de voyage du Foreign Office. Il y a eu tout de même un changement important dans ses habitudes: alors qu’elle pouvait faire six déplacements avant l’interdiction, désormais, ses voyages en Tunisie sont moins fréquents, notamment en raison de la couverture-assurance de ses enfants. Elle explique: «Je continue de me rendre en Tunisie avec des amis –bien évidemment sans mes trois enfants. C’est tout simplement une question de couverture d’assurance: s’il m’arrive de trébucher et de me briser la jambe, je prends l’avion pour rentrer au pays et me fais soigner dans un hôpital au Royaume-Uni; c’est aussi simplement que cela. Par contre, il serait irresponsable de ma part de faire subir à mes enfants pareil retour en catastrophe au pays…

«La Tunisie est un pays fantastique et le peuple tunisien est le peuple le plus gentil qu’il m’a été donné de connaître, durant ma vie entière. J’étais vraiment touchée, lors de mon dernier voyage en novembre, de séjourner dans un hôtel où il n’y avait qu’une trentaine de personnes alors que cet établissement a une capacité d’accueil de 1500.

«L’équipe d’animation était là fidèle au poste et le restaurant était ouvert, comme d’habitude (…) J’ai gardé contact avec le personnel de l’hôtel et j’éprouve une grande peine pour ces gens», se désole-t-elle.

«A présent, avec mes enfants, nous nous rendons dans d’autres pays –qui peuvent être beaux et où les gens sont gentils– mais jamais je n’éprouverai la même loyauté, le même attachement à ces hôtels et leurs personnels que ce que je ressens envers la Tunisie et les Tunisiens. Aucun autre coin de la planète n’a jamais conquis mon cœur autant que la Tunisie», insiste Jane Dutton.

«Une vie de famille rendue difficile»

Lisa et son mari tunisien ne se sont pas rendus en Tunisie depuis l’an dernier. Elle affirme qu’elle fera le voyage le jour où le gouvernement britannique changera son interdiction… Elle déclare: «Je connais beaucoup de personnes qui font le voyage malgré cette interdiction. Mais lorsqu’on a des enfants, on réfléchit à deux fois avant de prendre l’avion pour la Tunisie. Et cela a compliqué notre vie de famille. Par exemple, nous avons raté un mariage en Tunisie et, le mois dernier, mon époux n’a pas pu assister aux fiançailles de son frère. De plus, un de ses cousins qui travaillait dans l’hôtellerie a perdu son emploi.

«La crise a eu des conséquences néfastes sur les commerces et autres affaires. Si le tourisme ne reprend pas dans peu de temps, les chômeurs seront à coup sûr des proies faciles pour les recruteurs du terrorisme. Pourtant, la Tunisie est un si beau pays et le peuple tunisien est si accueillant et chaleureux. Il est affligeant de voir tout un pays souffrir ainsi par la faute de quelques individus. La Tunisie est plus sûre que plein d’autres destinations touristiques, sauf que c’est le seul pays auquel notre Foreign Office impose son interdiction de voyage. Cela ne devrait pas se passer ainsi: qu’on accorde au citoyen britannique le droit de décider de lui-même s’il souhaite ou ne souhaite pas se rendre en Tunisie», conclut Lisa.

 

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