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Pour sortir la Tunisie du stress hydrique

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Dans un pays comme la Tunisie, qui souffre se stress hydrique chronique, la production et la consommation de l’eau doivent être revues de fond en comble.

Par Wajdi Msaed

Le club écolo relevant de l’Association des Tunisiens des grandes écoles (Atuge) s’est intéressé à la problématique de l’eau en Tunisie, lors d’un dîner-débat sur le thème : «Tunisie sous stress hydrique chronique : quelles solutions», organisé jeudi à Tunis.

Les participants, en majorité universitaires, experts, administrateurs et chercheurs, ont d’abord assisté à une intervention présentée par Raoudha Gafrej, universitaire et expert en la matière, qui a fait une présentation exhaustive du secteur de l’eau en Tunisie avec des statistiques sur l’état des différentes ressources (eaux de surface, souterraine et de forage) ainsi que sur leur exploitation, faisant savoir que sur les 36 milliards de m3 que produit la Tunisie en temps normal (11 milliards en année sèche), 13% uniquement sont exploitables. Quant au reste, 17% sont récupérés par le sol, 15% vont pour les forêts et les parcours de pâturage et 55% s’évaporent ou sont déversés en mer.

Nouveaux défis, nouvelles solutions

Avec 419 m3 par habitant et par an, la Tunisie est soumise à un stress hydrique qu’elle subit d’ailleurs depuis plus de 20 ans. Et avec un taux de mobilisation des eaux de surface de 93%, le pays doit faire face à de nouveaux défis liés aux changements climatiques et à l’accroissement des besoins dictés par le développement socio-économique.

Or, explique Mme Gafrej, «le pays a connu, durant l’année 2001-2002, un déficit pluviométrique de plus de 50% à l’échelle de tout le pays et nous n’avons pas vécu la soif comme celle que nous vivons actuellement.»

Peut-on combler le déficit par le biais de l’épuration des eaux usées dites non conventionnelles, ou par la réforme du secteur agricole, grand consommateur d’eau et qui connaît d’énormes problèmes liés essentiellement au vieillissement des agriculteurs, à leur bas niveau d’instruction et au morcellement des exploitations. Ces problèmes, fait remarquer la conférencière, sont à l’origine de la fragilité de l’agriculture pluviale, surtout lors des saisons où la pluviométrie baisse considérablement comme c’est le cas de cette saison 2015-2016.

Le dessalement de l’eau de mer constituera-t-il la solution miracle, sachant que le gouvernement projette la construction de 40 stations de dessalement durant le plan quinquennal 2016-2020?

Mme Gafrej répond par la négative, estimant que la production de ces stations, qui nécessitent des investissements lourds, pourrait être remplacée par la récupération des pertes d’eau occasionnées par le mauvais état des conduites de la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (Sonede), sachant que les taux de perte, qui étaient de 13 à 14% avant 2010, sont évalués à 40% actuellement

Pour Rachid Khanfir, ancien DG au ministère de l’Agriculture, il s’agit de repenser la gestion de la demande et de maîtriser l’utilisation à tous les niveaux. «Il faut que tout le monde sache que la Tunisie est pauvre en eau et se comporte en conséquence», a-t-il dit.

Mohamed Ben Sakka, expert en ressources hydrauliques, estime, de son côté, qu’il ya lieu de revoir les plans directeurs des eaux dont l’élaboration remonte à 1975 et de concevoir une stratégie claire en matière d’utilisation des eaux usées. «La gestion des eaux se fait dans un contexte difficile et l’administration est appelée à faire participer la société civile pour plus d’innovation», a-t-il expliqué

Le stress hydrique? Nous y sommes depuis 1920

Un autre expert, Imed Nouri propose de relever la dotation de 419 m3 par habitant et par an en recourant à d’autres ressources, grâce notamment à une coopération plus active avec les pays voisins, notamment l’Algérie qui est mieux dotée, au développement de la recherche scientifique et au retour aux anciennes pratiques reposant sur la construction des citernes domestiques appelées «majel».

«Le stress hydrique? Nous y sommes depuis 1920», a lancé un autre participant, qui estime qu’avec une dotation de 419 m3 par habitant et par an, on est loin des paramètres arrêtés par la FAO. «Rationaliser la consommation de l’eau est un grand défi dans un climat semi-aride comme celui de la Tunisie», explique-t-il, en appelant à la réadaptation de notre infrastructure en augmentant la capacité des barrages et en assurant leur interconnexion.

Quoi qu’il en soit, la question de l’eau, denrée précieuse s’il en est dans un pays qui en manque beaucoup, nécessite une vision et une gestion globales et rationnelles. «Il y va de la souveraineté du pays», fera remarquer un représentant de la Banque africaine de développement (BAD).

La conclusion qui revient à Raoudha Gafrej peut paraître quelque peu provocatrice : «La gestion de l’eau doit échapper au ministère de l’Agriculture, qui en est le plus grand consommateur». Proposition à méditer…

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