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Des médias français «complices» des terroristes tunisiens

Attentats à Nice et à Tunis: le terrorisme frappe au nord et au sud de la Méditerranée.

Aucun média tunisien n’a osé titrer, comme l’a fait ‘‘Le Figaro’’ pour la Tunisie : «La France est le premier vivier de djihadistes dans le monde occidental».

Par Jamel Dridi

Ces derniers jours, depuis la découverte de la nationalité tunisienne de l’auteur de l’attentat de Berlin, la Tunisie subit une véritable campagne organisée de désinformation (bashing) par certains médias occidentaux et, surtout, français.

La Tunisie serait «le premier vivier du terrorisme mondial» selon ‘‘Le Figaro’’ du 22 décembre 2016. De son côté, David Thomson, pseudo-spécialiste parisien de la question djihadiste, surenchérit dans le ‘‘Huffington Post Maghreb’’ du 20 décembre 2016 en expliquant «qu’il y a un déni tunisien face à la question djihadiste». Rien que ça!

Ces affirmations péremptoires sont pour le moins déséquilibrées au regard de la réalité du terrain surtout qu’elles viennent de journalistes qui, soi-disant, connaissent bien ce terrain.

Les terroristes font payer le prix fort aux Tunisiens

En effet, non seulement, la Tunisie a conscience du danger djihadiste, parce qu’elle en a souffert dans sa chair, mais elle le combat avec force et détermination. Et il ne se passe pas un jour, en Tunisie, sans que les autorités sécuritaires arrêtent un extrémiste religieux ou démantèlent une cellule djihadiste.

Comment pourrait-il en être autrement? La Tunisie a subi, entre autres, les terribles attaques terroristes du Bardo, de Sousse et de Tunis (respectivement en mars, juin et novembre 2015) et de Ben Guerdane (en mars 2016).

Cette lutte quotidienne contre le terrorisme est devenue tellement prioritaire que les budgets des ministères de la Défense et de l’Intérieur ont presque doublé, en quelques années, que des réformes profondes pour perfectionner le système sécuritaire ont été mises en place et que des programmes spécifiques d’éducation ont été lancés dans les écoles, des campagnes de contrôle des prêches dans les mosquées et de dissolution des associations ayant lien avec l’extrémisme religieux.

En réaction à toutes ces mesures et initiatives visant à assécher leurs sources de financement et leurs moyens de recrutement, les terroristes font payer le prix fort aux Tunisiens. On a déjà évoqué les horribles attaques terroristes du Bardo et de Sousse, qui ont endeuillé des familles entières de touristes et porté un coup dur à l’économie du pays, en réduisant les flux touristiques et d’investissements étrangers.

On rappellera aussi les dizaines de militaires tunisiens qui sont morts, ces dernières années, en combattant les terroristes. Ainsi que les dizaines de morts parmi les agents de la police, de la garde nationale et, même, de la garde présidentielle (dont le bus a été attaqué par un kamikaze, en novembre 2014, en plein cœur de Tunis).

Sans oublier les dizaines de civils, parfois de simples bergers, habitants près des régions montagneuses du nord-ouest et du centre, tués ou blessés par des mines plantées par des terroristes ou subissant les razzias de ces derniers.

L’inexplicable acharnement de certains médias français sur la Tunisie

Comment alors ne pas être choqué par ces titres de la presse français qui tiennent davantage de la désinformation que du journalisme objectif et responsable? Que recherchent ces médias dans ce qui s’apparente à une «guerre médiatique»? Veulent-ils salir davantage l’image de la Tunisie pour que moins de touristes s’y rendent et que son économie soit mise à genou? Ou cherchent-ils à faire pression sur le gouvernement tunisien pour qu’il accepte les dictats des pays occidentaux, en matière sécuritaire et autres?

Lorsque, après les attentats en plein cœur de Paris, fin 2015 et début 2016, les médias anglo-saxons ont inclus la France parmi les pays où il ne fallait plus se rendre, les médias français ont condamné ces propos excessifs pouvant avoir des incidences sur l’économie de la France et se sont levés comme un seul homme pour les démentir.

Aussi doit-on regretter le silence d’une grande partie de la presse tunisienne, qui connait les sacrifices des soldats et policiers tunisiens dans la lutte contre le terrorisme, face aux excès des médias français dans le traitement réservé à leur pays.

Les Tunisiens doivent-ils accepter de «se laisser tuer médiatiquement et économiquement» par des médias français qui entretiennent le «tunisian bad buzz», en donnant la parole à des spécialistes autoproclamés du djihad, vivants du djihad-business et qui cherchent à entretenir l’intérêt des clients potentiels de leur prochain livre?

Ces médias et ces pseudo-spécialistes n’ont-ils pas compris qu’en agissant ainsi, ils prêtaient main forte aux terroristes? Une Tunisie encore plus fragilisée n’est-elle pas une proie encore plus facile pour les terroristes ? Est-cela que ces médias recherchent?

Bien sûr, il ne s’agit pas ici de s’opposer à la liberté d’informer, qui reste sacrée, mais d’exiger un traitement plus juste, plus équilibré et plus fin de l’information.

Evidemment qu’il y a un problème djihadiste en Tunisie, comme il en existe aussi dans beaucoup de pays, y compris évidemment la France ! La France, on le sait, est le pays occidental qui envoie le plus gros contingent de djihadistes en Syrie (environ 900), mais aucun média tunisien n’a osé titrer, comme l’a fait ‘‘Le Figaro’’ pour la Tunisie : «La France est le premier vivier de djihadistes dans le monde occidental».

Le problème du terrorisme est grave et sophistiqué, on ne doit pas le traiter de manière simpliste. Et le moins que l’on puisse faire, face à la douleur provoquée par les attentats terroristes, c’est de soutenir tous les Etats et tous les peuples dans la lutte contre ce fléau.

Pour conclure, on rappellera la juste réaction de l’ambassadeur de France en Tunisie, Olivier Poivre d’Arvor, sur sa page Facebook en date du 24 décembre 2016, qui tranche avec les déclarations de certains médias. «Paisible Tunisie. Ce matin dans le journal ‘‘Le Temps’’, belle réponse aux amalgames liés à l’ignoble attentat de Berlin : ‘‘Ce n’est pas avec le manteau de quelques désaxés qu’on habillera 11 millions de Tunisiens qui se battent aujourd’hui sur tous les fronts et sans répit pour la liberté, la dignité et la démocratie’’».

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