Depuis quelques jours, le niveau de vigilance en Tunisie est monté à la frontière avec la Libye. Et pour cause, la reprise des combats dans le pays, l’instabilité qui y règne et le trafic d’armes, de munitions et d’êtres humains.
Par Meriem Majdoub
D’ailleurs, il y a quelques jours, un Nigérian a fait parler de lui. De retour de Libye, Kehinde Fatukasi a déclaré qu’il regrettait profondément de s’être embarqué dans ce pays instable, expliquant comment sa famille avait été kidnappée et vendue comme esclave.
Il fait partie des 136 Nigérians bloqués dans le pays, et récemment assistés à rentrer de Libye par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’Union européenne (UE) – dans le cadre du programme d’Assistance aux rapatriés volontaires.
La famille Fatakusi kidnappée et vendue comme esclave
L’homme de 42 ans a déclaré avoir quitté le Nigéria en 2016, accompagné de son épouse et de son fils âgé de six ans. Fatakusi a expliqué qu’en arrivant en Libye, la famille avait été kidnappée et vendue comme esclave, mais heureusement, sa femme a réussi à s’échapper. Selon lui, il a appris par la suite que des captifs étaient vendus à des trafiquants d’organes, ce qui l’avait incité à s’échapper du camp avec son fils. «J’étais là-bas (en Libye) avec ma femme, qui était rentrée au Nigéria. Je crois qu’elle pensait que nous étions morts. Les Libyens nous ont traités comme des esclaves. Vous travaillez sans être payé et beaucoup d’entre nous ont été tués, tous ont assisté aux massacres», regrette Kehinde Fatukasi.
«Nous tous ici ne craignons pas la mort; nous avons déjà vu l’enfer. Les Libyens ne se soucient pas de savoir si vous êtes noir, le traitement qui nous est donné (les Noirs) est identique à celui qu’ils donnent à leurs voisins arabes de Tunisie ou d’Algérie. Une fois qu’ils ont besoin de quelqu’un pour travailler, ceux qui sont choisis doivent les suivre. Toute personne qui refuse de ne pas suivre les ordres sera tuée sur le champ», a-t-il déclaré.
Très souvent, les passeurs abandonnent les migrants
Fatakusi, tout en remerciant Dieu de l’avoir ramené au Nigéria avec son fils en sécurité, a confié qu’il comptait se lancer dans l’agriculture pour survivre. Il a ainsi déclaré : «Les Libyens sont de grands agriculteurs en dépit du fait que leur pays est dans le désert. Je suis rentré au Nigéria avec des outils d’irrigation comme un arroseur d’eau qui m’aideront à tout recommencer. Je vais travailler très dur pour que mon fils reçoive une très bonne éducation et m’occuper de femme. La Libye c’est du passé maintenant !»
La Libye est devenue un enfer pour les parents migrants qui voyagent souvent avec des enfants. «La plupart des migrants ne savent pas où ils s’embarquent. Très souvent, les passeurs les abandonnent, que ce soit sur terre ou même en pleine mer. Résultat : des drames humains à répétition, comme celui qui a causé la mort de huit personnes, dont six enfants, qui ont été découvertes mortes dans un camion frigorifique dans lequel se trouvait une centaine de migrants le 16 juillet 2018, près de Zouara, une ville de l’Ouest libyen», explique Marine Lacroix, cofondateur du site Lecoinparents.fr.
Depuis le 4 avril 2019, des affrontements opposent au sud de Tripoli l’Armée nationale libyenne autoproclamée du général Khalifa Haftar, l’homme fort de l’est libyen et les forces du gouvernement d’union nationale, reconnu par la communauté internationale.
Donnez votre avis