C’est le 28 septembre 1995, à l’âge de 48 ans, que Rabah Belamri, poète français d’origine kabyle, est prématurément décédé à Paris. Devenu aveugle à 16 ans, cet écrivain, au clair regard poétique, laisse derrière lui une œuvre importante.
L’écriture, qui caractérise ses romans, poèmes et textes autobiographiques, oscille entre le réalisme et l’onirisme, le passé et le présent, l’Algérie et la France et insiste sur le pouvoir du désir en lequel il voyait une force de transcendance.
Conteur de grand talent, admirateur de Jean Sénac, Rabah Belamri aura connu, comme ce dernier, une mort soudaine et inattendue qui nous prive désormais d’une voix primordiale.
1er poème inédit
Ton cri ma mère
guerrier d’éternité
dormant dans ma gorge
je bâtissais dans son oubli
un jardin clair
quand une épine de ma phrase
a effleuré sa paupière
oh maintiens ton regard clos
demeure en ta nuit gardienne de chimères
n’envahis pas la page d’une salive amère
2e poème inédit
1
cette nuit
la mer manque de tendresse
horizon de roches
afflux de rouille dans les membres
le pêcheur s’épuise à capter son visage
si près de l’abîme
2
les terrasses du sommeil basculent
l’écume se fait banquise
je reviens néanmoins contre ta hanche
dénudé par la rumeur de l’aube
3
même le ciel des prophètes prend feu
à ta crinière
ô Boraq de désir
tes ailes bleuies d’audace
inversent l’œil de la mort
4
ce matin
l’île penche sous son poids de lumière
une fillette court sur la dalle des prières
je reçois les embruns de son rire.
L’oiseau
l’oiseau qui fait courir les bergers
ne viendra pas
la fenêtre restera déserte
cette nuit il chantera pour la rose
(le songe émigre avec le verbe)
l’oiseau qui fait courir les bergers
viendra ce soir
la fenêtre restera ouverte
sur la douleur de la rose
Soleil
tu pars
pris entre le cri et le soupir
tu caresses
tu creuses
tu déposes un soleil au milieu de l’âme
Poèmes publiés par Yvonne Belamri.
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