Kaïs Saïed est certes obligé de composer avec les choix des partis pour désigner le prochain chef de gouvernement, mais sa marge est plus importante qu’on est tenté de le penser, car les partis représentés au parlement n’ont aucun intérêt à ne pas voter la confiance au prochain candidat au Palais de la Kasbah, au risque de voir le président de la république dissoudre l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Décryptage…
Par Cherif Ben Younès
Intervenu ce matin du mercredi, 15 janvier 2020, sur Shems FM, le dirigeant et député de Qalb Tounes, Iyadh Elloumi est revenu sur la mission politique primordiale dont est chargé le président de la république, Kaïs Saïed, à savoir le choix d’un nouveau chef de gouvernement.
A cet effet, M. Elloumi a souligné qu’il apprécie ce qu’il a appelé «cadre référentiel», donné par le président, et qui consiste à laisser aux partis l’initiative de proposer des noms pouvant accomplir le rôle de chef du gouvernement. Puisque, pour rappel, les différentes parties prenantes parlementaires ont jusqu’à demain soir pour émettre leurs suggestions, par écrit, à Carthage.
Iyadh Elloumi a, par ailleurs, indiqué que l’objectif de Qalb Tounes est que les différents partis proposent une seule personnalité, qui fasse l’objet d’un consensus, et ce afin de faciliter la mission du président, vu que ce processus (du «gouvernement du président») est inédit.
Kaïs Saïed est obligé de composer avec les partis
Le comptable s’est d’ailleurs montré particulièrement optimiste quant à la concrétisation de cette idée, rappelant, à cet égard, la résolution du conflit entre le président de son parti, Nabil Karoui, et celui de Tahya Tounes, Youssef Chahed, et considérant qu’Attayar a, de son côté, «implicitement mis fin à ses réserves concernant Qalb Tounes», en déclarant qu’il collaborera avec tous les partis.
Le dirigeant de Qalb Tounes estime, néanmoins, que le choix de Kaïs Saïed ne doit pas dépasser le cercle des noms (ou du nom, si son souhait se réalise) qui lui seront suggérés. «Sinon, il fera augmenter la pression qu’il aura à subir», a-t-il prévenu, ajoutant qu’il sera, dans ce cas, seul contre tous. «Va-t-il faire en sorte que tout le parlement soit une opposition ?», enchaînera-t-il.
Toutefois, ce que M. Elloumi oublie, ou fait, plutôt, semblant d’oublier, est que si cette hypothèse se matérialise, Saïed n’aura rien à perdre. Par contre le parlement, oui. Puisque si ce dernier n’accepterait pas le chef du gouvernement proposé par le président, il serait, par la même occasion, dissout. Et Kaïs Saïed, qui n’est pas représenté au parlement dans l’actuelle mandature, pourrait très bien le devenir si les élections venaient à se reproduire.
Aucun intérêt à exclure Ennahdha des concertations
Pour l’instant, on en est loin, et Saïed ne semble pas privilégier un tel scénario, pouvant s’avérer chaotique pour le pays. Néanmoins, il serait plus judicieux, pour M. Elloumi, de ne pas chercher à l’exclure du processus décisionnel comme il semble vouloir le faire. D’autant plus que la constitution charge ce dernier de désigner un chef du gouvernement, en collaboration avec les partis, et non pas l’inverse.
Sur un autre plan, Elloumi a indiqué qu’il ne voit aucun intérêt à exclure Ennahdha des concertations autour de la formation du prochain gouvernement, assurant que Qalb Tounes est favorable à un «gouvernement de coalition nationale», englobant toutes les forces politiques, y compris le mouvement islamiste.
Le député a, par ailleurs, estimé que ce dernier s’est montré excessivement prétentieux lorsqu’il a eu l’occasion de gouverner et que désormais, il aura le même poids que tous les autres partis.
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