La Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica) a appelé, ce mardi 19 mai 2020, via un communiqué, à ouvrir une enquête urgente au sein du Parlement sur les circonstances juridiques et procédurales qui ont motivé le retrait de l’initiative législative présentée par un groupe de députés de la mandature précédente, le 3 janvier 2018, concernant un projet de loi relatif à la liberté de la communication audiovisuelle.
La Haica a, sur un autre plan, appelé les médias à faire preuve de prudence lorsqu’ils traitent avec des personnes «connues pour leurs discours de haine d’incitation à la violence», faisant notamment allusion au chef du bloc parlementaire d’Al Karama, Seifeddine Makhlouf, qui a insulté, en fin de semaine dernière, en direct, sur Mosaïque FM, le chroniqueur Haythem Mekki, en le traitant de «chien». ُ
Et ce n’est pas là son premier dérapage du genre, ni celui de ses «frères musulmans» du bloc Al-Karama, des extrémistes qui ont ceci de différent avec leurs alliés d’Ennahdha : ils assument leur extrémisme et l’expriment ouvertement, dans une sorte de jeu de rôles consistant à faire apparaître Ennahdha comme un mouvement modéré.
La commission constitutionnelle a, dans le même cadre, invité les journalistes à s’opposer aux discours violents et incitateurs quelles que soient leurs formes, et ce «sans porter préjudice au principe de la liberté d’expression, du pluralisme politique et de l’accès aux médias, dans une société démocratique pluraliste».
Fallait-il virer Seifeddine Makhlouf du studio après avoir fait preuve d’autant d’insolence sur antenne ? Certainement. Les insultes ne faisant pas partie de la liberté d’expression, une telle décision de l’animateur Elyes Gharbi aurait été un message dissuasif sans équivoque à l’encontre de toute personnalité politique ou autre susceptible d’avoir l’intention, dans l’avenir, de profiter de sa présence médiatique pour régler aussi odieusement ses comptes personnels.
La Haica a, par ailleurs, appelé les journalistes «à tenir à leur indépendance et à leur liberté dans l’exercice de leurs fonctions, à assurer leur rôle conformément aux règles professionnelles et éthiques et à faire preuve de solidarité afin de contrer les tentatives suspectes visant leur mission centrale dans la gestion du débat public.»
Sur un autre plan, la Haica appelé les présidents de la république et du gouvernement, respectivement, Kaïs Saïed et Elyes Fakhfakh, à clarifier leurs positions concernant «les initiatives législatives anticonstitutionnelles visant à limiter le rôle des commissions constitutionnelles», faisant encore allusion à Al Karama, qui avait proposé, il y a 2 semaines, un projet de loi prévoyant l’annulation de l’obligation d’obtenir une licence de la Haica pour pouvoir lancer un nouveau média audiovisuel. Soit, en somme, la porte ouverte à l’anarchie, aux financements occultes, et au blanchiment d’argent.
Cherif Ben Younès
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