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Tunisie -PLF 2021 : on aurait dû remplacer le régime forfaitaire par celui de l’auto-entrepreneur

En Tunisie, toujours, ce sont les contribuables, à travers les impôts les plus injustes et les contributions conjoncturelles décidées presque chaque année, qui doivent supporter seuls le fardeau fiscal pour faire face au Mur de la dette publique, tandis que beaucoup échappent à la fiscalité.

Par Amine Ben Gamra *

Le régime forfaitaire, dont l’apport au budget de l’Etat est presque insignifiant, est l’un des régimes qui encouragent l’évasion fiscale. En effet, les 400.000 personnes soumises à ce régime contribuent à hauteur de 0,2% seulement dans les recettes fiscales de la Tunisie, soit une moyenne de 70 dinars par personne et par an.

Pour corriger cette situation inacceptable et qui a trop duré, le projet de loi de finances pour l’année 2021 (PLF 2021) suggère de supprimer le régime forfaitaire et d’instaurer un nouveau régime spécifique aux petites entreprises dont le chiffre d’affaire ne dépasse pas 100.000 dinars dont l’assiette est déterminer sur la base d’un bénéfice implicite déterminé à partir d’une marge nette fixée forfaitairement selon la nature de l’activité et son lieu d’implantation (zoning). Ainsi, nous allons supprimer un régime forfaitaire pour le remplacer par un autre lui aussi à déterminer forfaitairement.

Le PLF 2021 aurait dû supprimer ce régime et le remplacer par celui de l’auto-entrepreneur surtout que l’ordonnance du chef du gouvernement n°33 du 10 juin 2020 (JORT n°54) a donné naissance à ce régime en Tunisie.

L’auto-entrepreneur bénéficie du régime simplifié de l’entreprise individuelle. Il permet de créer plus facilement une entité à but lucratif, en profitant de démarches administratives et de procédures fiscales et sociales simplifiées.

Les conditions d’obtention du statut d’auto-entrepreneur

Vous pouvez être auto-entrepreneur exclusif si vous répondez aux critères suivants :
– vous êtes une personne physique, de nationalité tunisienne;
– vous exercez individuellement dans le secteur industriel, commercial, agricole, des services, de l’artisanat ou des métiers;
– votre chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 75.000 dinars;
– vous avez une adresse (domicile);
– vous ne disposez pas déjà d’une déclaration d’existence fiscale.

Des démarches de création simplifiées

Toute personne, désirant adhérer au régime de l’auto-entrepreneur, doit déposer une demande d’inscription électronique au :
– Registre national de l’auto-entrepreneur ou remplir un formulaire papier fourni par les bureaux d’emploi et du travail indépendant et les espaces ‘Entreprendre’ relevant de l’Agence nationale pour l’emploi et le travail indépendant (Aneti);
– ou aux bureaux des recettes fiscales ou à ceux de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), et ce, contre récépissé délivré à cet effet.

Une «carte de l’auto-entrepreneur» renouvelable tous les trois ans est délivrée à l’auto-entrepreneur (électronique ou papier) remplissant les conditions d’inscription, et ce, dans un délai maximum de 15 jours à compter de la date de dépôt de la demande.

Calcul et paiement des impôts et des charges sociales

L’auto-entrepreneur bénéficie d’un régime fiscal et social spécifique qui consiste à payer une contribution unique libérée de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, de la taxe sur la valeur ajoutée et de la cotisation au régime de sécurité sociale. La valeur de la contribution unique est fixée comme suit :
– 0,5% du chiffre d’affaires annuel, au titre de l’impôt sur le revenu;
– 7,5 % calculés sur la base des deux tiers du salaire minimum agricole garanti ou du salaire minimum industriel garanti selon la nature de l’activité.

L’auto-entrepreneur peut également adhérer au régime de sécurité sociale pour les travailleurs non-salariés dans les secteurs agricole et non agricole. Dans ce cas, le taux de cotisation augmentera jusqu’à 11% du salaire minimum agricole garanti ou du salaire minimum industriel garanti selon la nature de l’activité au titre du régime de sécurité sociale. Le taux de 11% est réduit à 4% pour les retraités.

Par ailleurs, la contribution unique n’est pas requise au titre de la première année de l’activité à condition que le Fonds national de l’emploi (FNE) prenne en charge le paiement des cotisations sociales pendant cette période.

Les paiements sont faits d’une manière électronique avant 15 jours suivant chaque trimestre.

Les catégories des activités concernées

Les professions exercées en auto-entreprise se répartissent en 4 catégories. Les activités dans le secteur de l’industrie, de l’agriculture, du commerce, des services, de l’artisanat ou des métiers.

La liste des activités dans les secteurs mentionnés est fixée par décret gouvernemental et les avantages octroyés dans le cadre du FNE pour l’appui des entrepreneurs sont également applicables au régime de l’auto-entrepreneur.

L’auto-entrepreneur est exempté au titre de son activité dans le cadre du présent décret loi, du dépôt des déclarations fiscales prévues par la législation fiscale en vigueur et du paiement des taxes sur les établissements à caractère industriel, commercial ou professionnel. Sont également exonérées de la retenue à la source prévue par l’article 52 du code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés, les montants encaissés dans le cadre de son activité.

Les obligations comptables et juridiques

Les obligations comptables et juridiques sont légères et non contraignantes dont notamment :
– disposer d’une carte d’auto-entrepreneur;
– respecter les règles relatives à la concurrence, à la protection du consommateur, à la santé, à la sécurité et aux droits et procédures fiscaux et sociaux conformément à la législation en vigueur;
– fournir des données exactes, complètes et actualisées relatives à sa situation et à l’exercice de son activité;
– déclarer le chiffre d’affaires réalisé dans les délais;
– tenir un registre numéroté et paraphé par les autorités fiscales compétentes, sur lequel sont enregistrées quotidiennement les dépenses et recettes sur la base des documents justificatifs.

* Expert comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptables de Tunisie.

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