«Nabil Karoui est une victime et il est aujourd’hui en prison parce qu’il a refusé de rejoindre leur système corrompu et je défie le Courant démocrate de parler des détails du dossier. Avec les révélations (les enregistrements fuités de la conversation entre les députés Rached Khiari et Mohamed Ammar, Ndlr), ils disaient que si la justice incarcérait Karoui c’est qu’elle est indépendante et si elle le relâchait c’est qu’elle est commandée par Ennahdha. On voit aujourd’hui que se sont eux qui font pression sur le pouvoir judiciaire», a déclaré Seïfeddine Makhlouf, le sulfureux avocat et chef de file de la coalition islamo-populiste Al-Karama, sur le plateau de la chaîne de Nabil Karoui, hier, lundi 22 mars 2021.
Par Imed Bahri
Après ces déclarations, comment se sentent les anti-islamistes qui ont voté en masse en arborant le vote utile pour Karoui durant l’automne 2019 car il allait les débarrasser d’Ennahdha et les sauver des islamistes ? «Mon petit frère Nabil Karoui vaincra les Frérots» (les Frères Musulmans, Ndlr), écrivait sur sa page Facebook l’intermédiaire Youssef Zarrouk, l’un des plus proches amis de l’affairiste véreux, magnat de télévision et de publicité, président fondateur de Qalb Tounes – son instrument politique comme Nessma est son instrument de propagande médiatique – et grand ami de Tarak Ben Ammar, actionnaire de cette chaîne, avec l’autre grand affairiste Silvio Berlusconi.
Souvenons-nous, dans les commentaires sous les statuts Facebook de Zarrouk qui vendait son «petit frère» Karoui comme libérateur de la Tunisie des méchants islamistes, les idiots utiles applaudissaient et sont allés, comme les moutons vont à l’abattoir, voter en masse pour Karoui, qui les trahira en deux temps trois mouvements quelques semaines plus tard… Quoi de plus facile pour un homme sans scrupule comme lui!
«Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose», disait Goebbels
Au même moment, le très agité Seïfeddine Makhlouf, chef de file de la coalition pseudo-révolutionnaire Al-Karama, faisait des attaques contre Karoui son fonds de commerce électoral, lui et ses «frères» Abdellatif Aloui, Rached Khiari, Maher Zid, Ridha Jaouadi, devenus députés entre-temps… À l’époque, ils affirmaient tous que Karoui était un sioniste, un pourri, l’incarnation du système de corruption, en l’arrosant d’insultes, et appelaient à voter pour le très intègre «fils du peuple» Kaïs Saïed, dont le sans foi ni loi Makhlouf s’est même permis d’utiliser la photo, sans aucune permission, dans ses banderoles électorales pour les élections législatives.
Aujourd’hui, ce même Makhlouf insulte Saïed qu’il accuse d’incarner le «système de corruption» et affirme, sans ciller, que Karoui, incarcéré et poursuivi dans des affaires d’évasion fiscale, de corruption financière et de blanchiment d’argent, est une victime et qu’il a refusé d’intégrer ce «système de corruption».
Bref, cet épisode prouve, de la manière la plus éloquente qui soit, la mauvaise foi de Seïfeddine Makhlouf, prouve que c’est un individu sans scrupules qui dit tout et son contraire mais les idiots utiles continuent de le défendre et de justifier l’injustifiable en se couvrant de ridicule. Mais pourquoi Makhlouf et ses «frères» s’adonnent-ils à ce jeu d’une grande malhonnêteté? Et bien tout simplement parce que ce sont les sbires de Rached Ghannouchi, le vieux loup de l’islamisme tunisien et le président du parti Ennahdha, au pouvoir, et appliquent ses directives sans états d’âme.
Cependant, le culotté Makhlouf ne s’est pas arrêté là. Il a défendu hier, lundi 22 mars 2021, sur le plateau de Nessma, les autres actionnaires de cette chaîne : Tarak Ben Ammar et Silvio Berlusconi. Rappelons qu’en 2011, le très agité avocat manifestait devant le siège de la chaîne Nessma et devant les caméras d’Al-Jazeera parce qu’«elle diffuse un film qui représente Dieu en caricature», à propos du film ‘‘Persépolis’’ de Marjane Satrapi, diffusé par la chaîne de Karoui quelques jours seulement avant les élections de l’Assemblée constituante d’octobre 2011, projection dont le timing était très peu innocent car il a profité aux islamistes lors des élections : «Al-islam fi khatar» (l’islam est en danger) criaient-ils à l’époque.
Makhlouf et les deux chevaliers blancs Tarak Ben Ammar et Silvio Berlusconi
Hier sur le plateau de cette même chaîne, qu’hier il vouait aux gémonies, Seïfeddine Makhlouf s’interrogeait, avec une touchante crédulité, comment Ben Ammar et Berlusconi accepterait-ils de blanchir leur argent en s’associant avec Karoui, eux qui sont des grands noms de «la politique, du business et de la culture dans le monde» (sic) comme si on était devant deux saints de notre époque! À entendre le baratineur islamiste dans son exercice de «taqfif», comme on dit dans le dialecte tunisien, on les prendrait pour des chevaliers blancs alors que ce sont deux personnages peu recommandables dont entend le bruit des casseroles qu’ils traînent de l’autre côté de la Méditerranée.
Berlusconi, un affairiste aussi véreux que Karoui, on ne compte plus ses démêlés avec la justice italienne sans parler de son bras droit Marcello d’ell Utri, condamné à la prison pour ses liens avec la Cosa Nostra (mafia sicilienne) et extradé du Liban où il s’était enfui.
Quant au «garçon de bonne famille» Tarak Ben Ammar, rappelons qu’il fait face, en France, de la part de ses créanciers à la saisie de ses comptes en banque, son appartement de Val d’Isère, et les œuvres d’art de sa maison parisienne, mais pas la maison-elle même, détenue par l’intermédiaire d’une cascade de holdings luxembourgeoises et néerlandaises. Tout ceci à cause d’une liquidation louche de l’une de ses sociétés et qui a permis de révéler d’autres casseroles.
Toutefois, les chevaliers blancs Ben Ammar et Berlusconi peuvent, comme leur ami Karoui, compter sur le très agité Makhlouf pour les défendre; il saura le faire avec son culot, sa mauvaise foi, sa goujaterie et sa vulgarité devenus une marque de fabrique des islamistes.
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