Il se bombe le torse et lorgne des yeux. Il se targue d’avoir pris une initiative de politicien clairvoyant. Il affiche au vu et au su des marchands sa décision de faire interdire la vente de produits israéliens sur les marchés parallèles de la commune du Kram. Cachez-lui ces produits qu’il ne saurait voir exposés. Son marché hebdomadaire, jamais suspendu, et les étalages dans les rues et ruelles du quartier communément appelé «5 Schneider», est le plus grand et le plus couru de la banlieue nord de Tunis. Le maire Fathi Laâyouni se cache derrière son petit doigt. Et nous sert sa démagogie habituelle. Cette fois-ci anti-israélienne. Sahha ennoum, baba!
Par Mohsen Redissi *
Il vient d’ouvrir ses yeux Laâyouni sur la tragédie qui se passe au Moyen-Orient. Pas besoin d’être oculiste ni de porter de longue-vue. Il doit ouvrir l’œil et le bon. Il lui a fallu la mort de 254 Palestiniens dont 66 enfants, 39 femmes et 17 personnes âgées d’après le dernier bilan annoncé par le ministère de la Santé à Gaza pour se rendre compte de l’ampleur du drame. Une vision apocalyptique qu’il vaut mieux corriger.
Le Kram, paradis des produits de contrebande, en provenance d’Israël et d’ailleurs
Le Kram n’est pas une exception. Tous les marchés parallèles et mêmes les circuits officiels de Tunisie sont inondés de produits fabriqués en Israël. Certains le savent, d’autres ferment les yeux pour faire du chiffre. Les doigts des deux mains ne suffisent pas pour pointer du doigt accusateur les offices et les bureaux tunisiens responsables de cette dérive. La vigilance doit être de mise chaque jour à chaque instant. Si le Tunisien tient à son pays comme il tient à la prunelle des ses yeux, les contrefaçons et les produits illicites disparaîtront des étals et ne figureront plus dans les menus ni sur les tables des Tunisiens.
Le cercle des amis arabes d’Israël ne cesse de s’élargir inexorablement du Golfe arabique jusqu’aux rives de l’Atlantique. Aux marchés traditionnels, la Turquie et les pays européens sans exception, viennent s’ajouter de nouveaux marchés gagnés par les Accords d’Abraham entre Israël et les Émirats arabes unis d’une part et entre Israël et le Bahreïn d’autre part. Le Maroc a troqué la reconnaissance d’Israël et le rétablissement des relations diplomatiques contre l’annexion du Sahara occidental. Le nom du Soudan a été rayé de la liste des pays qui soutiennent le terrorisme. Faire des échanges commerciaux, même innocemment, entre toutes ces parties, on finit forcément par perdre de vue la traçabilité de milliers de produits finis ou transformés, ou mêmes agricoles. Aux importateurs tunisiens et arabes de fournir des certificats prouvant l’origine de leurs marchandises. Elles ne doivent pas provenir d’Israël directement ni indirectement. Le transit est banni ainsi que les entreprises traitant avec Israël.
L’Office de boycottage arabe d’Israël (OBI) a été créé en 1945. Les arabes de l’époque y ont pensé avant la création même d’Israël. Son siège à Damas coordonne l’action arabe commune et interdit à ses membres tout commerce avec Israël. Le boycott plus tard s’est intéressé aux personnes physiques et morales quelle que soit la nationalité du partenaire faisant commerce avec Israël. Les sociétés touchées par le boycott figurent sur ses listes noires, elles sont aux alentours de 6.300 compagnies couvrant 96 pays, listes mises à jour tous les six mois.
Une nonchalance généralisée derrière la violation des principes du boycott
Les experts estiment que le manque à gagner pour l’économie israélienne dû au boycott arabe représenterait 3 milliards de dollars par an, l’équivalent de l’aide annuelle des Etats-Unis à Israël. Le boycott a touché des géants comme Coca-Cola, L’Oréal, Sony… Des appels sont lancés en temps de crise pour interdire l’importation ou pour boycotter certains pays qui refusent de répondre aux cris d’alarme des pays arabes et musulmans.
Les efforts fournis par l’OBI et ses bureaux régionaux posent problèmes dans une région où la rigueur et l’exactitude font souvent défaut. Une lenteur administrative entrave le bon déroulement des opérations de contrôle et de vérification des documents. Une nonchalance généralisée provoque une dérive et une violation des principes du boycott.
Ces rapports et ces listes finissent dans les tiroirs des bureaux. On en fait usage que lorsque l’affaire est très grave aux yeux des médias. Plus besoin de faire campagne ou de déclarer un produit non grata dont l’origine reste incertaine, le système est capable de détecter par lui-même toute infraction ou violation des principes du boycott.
Pas besoin de lorgnette ni de verre correcteur ni même avoir un œil de lynx, la vigilance et la rigueur sont les meilleurs remèdes contre la myopie. Encore faut-il l’être 7 jours sur 7, les 12 mois de l’année, ce que le maire islamiste du omet de faire, les effets d’annonce lui tenant lieu de politique.
* Fonctionnaire international à le retraite.
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